Chaka - The Lonely Hitman
’Chaka’ : terme japonais signifiant flingue, pistolet.
Takeshi Watanabe a commencé sa carrière comme assistant réalisateur sur Boiling Point de Takeshi Kitano en 1990. C’est ce que l’on peut appeler bien commencer une carrière. Ensuite, il a réalisé à un rythme régulier principalement des films de yakusa pour le marché de la vidéo (V-cinéma). En 1998, il réalise Chaka qui sera suivi un an plus tard de Chaka 2. Chaka - The Lonely Hitman est interprété par nul autre que la star du genre Riki Takeuchi. Outre ce fait notable, Chaka vaut pour sa réalisation soignée et un scénario qui ne cache pas ses lacunes derrière des gunfights à profusion.
Shima (Riki Takeuchi), yakusa bras droit de son boss et tueur à gages réputé, souffre d’une maladie des reins. Interné à l’hôpital, il y rencontre Junko, une infirmière. Lorsque Shima est blessé par balle, elle se rend chez lui et le soigne. Peu à peu une relation naît entre eux et Junko tombe enceinte. Mais Shima ne peut se soustraire aux obligations de son clan, au grand dam de Junko...
Bien que de facture relativement classique, Chaka parvient à se faire une place dans le monde pourtant bondé des films de yakusa. Outre une réalisation remarquable, il met l’accent sur les personnages et plus particulièrement sur celui de Shima. Ce dernier, s’il est bien le héros de cette histoire, n’est pas un héros au sens strict du terme ; a savoir qu’il est faillible et brutal. C’est avant tout un être humain souffrant de solitude, capable du meilleur quand il aime sincèrement Junko, recueille un chaton ou éprouve de la compassion envers les autres. Mais aussi capable du pire lorsqu’il viole Junko ou abat froidement ses ennemis. Ponctué de scènes violentes, le film ne bascule jamais dans une vaine surenchère et fait même preuve d’une étonnante sobriété. Plusieurs scènes sont tournées avec une sincérité réelle, ce qui les empêche de tomber dans la mièvrerie. Ainsi les scènes avec le chaton (que l’on peut voir comme un alter ego de Shima, tous deux à la recherche d’une mère) ou l’amour naissant avec Junko. Sur un autre plan, citons l’intégration parfaitement réussie du meurtre du boss ennemi en parallèle avec la naissance de l’enfant de Junko, ou encore une très belle scène toute de simplicité où Shima s’entretient avec le fantôme de son boss.
Takeshi Watanabe exploite dans Chaka des thèmes récurrents de ses œuvres. D’abord l’idée de la répétition ici représentée par les enfants de Shima (dont on peut supputer qu’il vengera son père) et du boss ennemi (qui fera certainement de même...), et ensuite l’omniprésence du passé et un goût pour les "fantômes". Si ces derniers thèmes ne sont cependant qu’à l’état de germe dans Chaka, ils reviendront avec force dans ses films suivant, Chaka 2 et Koroshiya Pazuzu.
Chaka doit également sa réussite aux acteurs. Riki Takeuchi y interprète avec sobriété et sérieux - si l’on exclut le fait de le voir sortir régulièrement de l’hôpital en survêtement pour aller aider son boss - un tueur pris dans une spirale de violence où, comme c’est le cas de nombreux films ninkyou (de yakusa), il doit choisir entre son clan et sa famille. Un choix qui se traduit souvent - et je ne vous le cacherai pas, c’est également le cas ici - par la mort du héros après qu’il ait accompli sa mission. Dans le cas présent, Shima ne pouvait que mourir puisque par sa faute, son boss était mort.
Evitant les effusions de sang gratuites ou toute touche, même discrète, d’érotisme, Chaka est un film de yakusa qui, s’il n’offre guère de véritable nouveauté dans le sujet traité, fait preuve de sobriété et fait la part belle aux personnages plutôt qu’à l’action, chose rare dans les films de V-cinéma. Une petite perle du genre.
Chaka est uniquement disponible en VHS au Japon (Toei Video, Ref. VRZF00434).