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Japon

OneChanbara : The Movie

aka Chanbara Beauty – OneeChanbara | Japon | 2008 | Un film de Yôhei Fukuda | Avec Eri Otoguro, Manami Hashimoto, Tomohiro Waki, Chise Nakamura, Satoshi Hakuzen, Hiroaki Kawatsure, Tomoya Nagai, Sari Kurauchi, Ai Hazuki, Tarô Suwa, Tetsu Watanabe

Il suffit d’un scientifique, avec un penchant pour les expériences sur la résurrection, pour vous foutre en l’air un pays. La preuve : le docteur Sugita est responsable de l’invasion de zombies qui a réduit le Japon – et peut-être même le monde – à néant ou presque, et plongé les survivants dans le chaos. Parmi ces victimes potentielles des non-morts, condamnés à se nourrir de leurs proches et amis un jour ou l’autre, une lueur d’espoir : la silhouette d’Aya, vêtue d’un bikini de cuir et d’un boa blanc, son sérieux impassible et la lame de son épée... Flanquée d’un sidekick inutile et bavard, Katsuji, elle détruit tous les zombies sur son chemin, avec pour seul objectif de retrouver sa sœur Saki, responsable de la mort de son père et traitre à la cause des humains. Katsuji lui, a perdu sa frangine aux assauts des non-morts, et la belle Reiko, motarde et fine gâchette qui ne tarde pas à rejoindre leur combat, a dû elle-même abattre sa fille. Ensemble, ils se rapprochent du bastion de Sugita – et de l’affrontement avec Saki. Aya retrouvera-t-elle le sourire un jour ?

Voilà une chose rare : une adaptation de jeu vidéo qui soit meilleure que le matériau d’origine. On a beaucoup hurlé ces dernières années, contre telle ou telle adaptation cinématographique d’un univers vidéoludique, les supposées purges d’Uwe Boll notamment. Rappelons toutefois, que l’homme qui a osé Postal a adapté des jeux plus ou moins médiocres ou qui, en l’état, n’avaient aucun intérêt à être transposés sur grand ou petit écran (Far Cry sans Joseph Zito ?). Osez me soutenir que House of the Dead partait avec un scénario solide... Adapter un jeu – sauf si celui-ci possède une narration linéaire et riche – c’est en extraire le concept pour créer quelque chose de nouveau, et non pas tenter de reproduire ce qui est inimitable – à savoir le gameplay. Pour un autre exemple réussi – car oui, j’estime que House of the Dead l’est -, prenez le Ryû ga gotoku de Miike, substrat extrapolé du jeu Yakuza.

Ce n’est pas comme si la série à l’origine de OneChanbara : The Movie, était constituée de jeux de l’ampleur d’un Shadow of the Colossus. Les titres, à l’origine développés par D3 dans le cadre de leur collection Simple 2000 sur PS2 [1], sont des jeux sans le sou et bourrés de défauts, beat-them-all dont l’intérêt se résume – c’est simple comme l’indique le nom de la gamme – à lancer une héroïne en bikini à l’assaut de hordes de zombies. C’est génial sur papier, mais les contrôles sont foireux, la gestion des caméras atroces, les décors tristes à mourir et le gameplay répétitif à souhait. Il y a bien un intérêt – une originalité presque - au niveau de la gestion de la durabilité des lames, mais la passion qui court en filigrane autour de ces titres revient simplement à son concept : bikini + sabre + zombies + gore. Et ça marche. La preuve ? Je les ai tous. [2]

Ça n’engage que moi, mais ça a le mérite de justifier mon affection pour OneChanbara, le film. Rien que l’annonce du projet avait suffi à m’émoustiller, alors pensez à ma réaction le jour où l’affiche a fait son apparition online... Yôhei Fukuda a compris qu’il y avait dans les jeux matière à faire un vrai film fantastico-fétichiste ; qu’il suffisait pour cela de dynamiser les combats, d’avoir de belles actrices, des zombies plus rapides et quelques idées de mise en scène, à même d’exploiter les pouvoirs injustifiés – en dehors du cadre de la transposition d’un jeu – de la belle Aya. Et le résultat est bien là : OneChanbara transcende son budget limité à la force du poignet, jouit pleinement du look absurde d’Eri Otoguro – avec son boa blanc constamment immaculé, l’avantage du sang numérique -, oppose lames et armes à feu (comme dans le dernier épisode de Cowboy Bebop) et fait des personnages du jeu les super-héros qu’ils ne parvenaient jamais vraiment à être sous forme de pixels. C’est jouissif, sans temps mort, bon enfant et vraiment bien mis en scène, et ça nous touche la où ça fait du bien : au cœur et au bas-ventre. Parce qu’Aya tout de même, avec ses bouts de cuir, ses bottes et son chapeau de cowboy, son côté frigide et son ventre Weight Watchers, sa lame miroir et ses déplacements instantanés, et même sa transformation en Super Sayen, constitue l’une des choses les plus belles et les plus généreuses que le Japon nous ait offert cette année. Le « chanbara de ma soeur » porte de plus bien son nom, car au milieu des hordes de zombies et des effets numériques décriés par certains, ploient de hautes herbes qui ne demandent qu’à hériter du western et du film de sabre pour déployer l’affrontement, fraternel au féminin, d’Aya et de Saki.

Saki, bien évidemment affublée d’un costume sailor et jetée dans l’histoire pour justifier le combat d’Aya, renforce le côté assurément fan service du projet, et enfonce un peu plus le coup : et si, au lieu d’adapter de "grands noms" de l’histoire du jeu vidéo, on se contentait d’extraire le potentiel de titres simplets et honnêtes comme ceux exploités ici ? On peut toujours rêver, tant qu’à taper dans le catalogue D3, que nous parviennent The Earth Defense Force, The Daibijin et autres The Zombie vs Ambulance ou encore du côté de Cavia, Bullet Witch. En attendant, on reprendrait bien un peu d’Aya, de travellings en plongée sur une horde de zombies dépecés dont les membres ne cessent de s’envoler vers nous, et d’un hymne J-Pop pour emballer tout ça. Parce que ceux qui nous lisent depuis longtemps savent bien comment se résume, symboliquement, la passion de certains de nos rédacteurs : les zombies et hitomi, c’est la vie. Ce qui en dit long sur OneChanraba : The Movie, n’est-ce pas ? Ce n’est peut-être pas du Romero, mais c’est quand même un rayon de soleil.

Pour l’instant, OneChanbara n’est disponible qu’en DVD japonais sans sous-titres. Mais soyez sûrs que, quelque part entre The Machine Girl et Tokyo Gore Police, le titre trouvera rapidement sa place dans le catalogue d’un éditeur occidental.

[1Le simple parce que les développeurs font dans le bas de gamme, le 2000 parce que du coup c’est pas cher – c’est le prix en Yen, en gros.

[2D’ailleurs, la série s’apprête à débarquer chez nous sur Wii, retitrée Bikini Zombie Slayers. Perso, la juxtaposition de ces trois mots garantirait, même si je n’y connaissais rien, un achat à l’aveugle.

- Article paru le lundi 13 octobre 2008

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