Sancho does Asia, cinémas d'Asie et d'ailleurs
Japon

Shinde mo ii

aka Original Sin | Japon |1992 | Un film de Takashi Ishii | Avec Shinobu Ôtake, Masatoshi Nagase, Hideo Murota

Troisième film réalisé par Takashi Ishii, Shinde mo ii reste une œuvre méconnue en occident, bien qu’il s’agisse d’une pièce maîtresse dans la carrière de son réalisateur...

Une gare de la grande banlieue Tokyoïte. Il pleut. Hirano (Masatoshi Nagase), un jeune paumé de 22 ans, heurte une femme... Il la suit. Elle, c’est Nami (Shinobu Ôtake) ; elle travaille dans une agence immobilière avec son mari, un homme de 12 ans son aîné. Le jeune homme parvient à se faire embaucher par ce dernier, dans le but d’être près de cette femme dont il est éperdument tombé amoureux...

Lorsqu’il tourne Shinde mo ii en 1992, Ishii n’en est qu’à sa troisième réalisation (ses deux premiers films étant respectivement Tenshi no harawata, Akai memai [1988] et Gekka no ran [1990]), et, tout comme dans ses manga, le personnage central de cette histoire est une femme dont le prénom est Nami. A la fois réticente et attirée par les avances d’Hirano, Nami aime malgré tout son mari ; et c’est là justement, que réside tout l’attrait de cette histoire. Elle est prisonnière de ses sentiments pour ces deux hommes que pourtant tout distingue. Son mari a une situation fixe, tandis que le jeune homme ère sans réel but dans la vie. Malgré l’interdit à braver (surtout pour LA japonaise), Nami va se laisser séduire par Hirano, et ce, bien que leur première "relation" sexuelle fût un viol(!). Le viol, au même titre que son héroïne, est l’un des éléments récurant de l’œuvre d’Ishii (hormis dans le génial Gonin, œuvre "masculine" - les personnages principaux étant des hommes- pourtant empreinte d’une certaine féminité...), à ce propos il s’expliquera d’ailleurs : "[...]ça a un lien avec la violence, les rapports homme-femme, les relations d’agression entre homme et femme. Vous avez observé que le personnage de Nami est aussi présent dans mes mangas. C’est parce que depuis cette époque j’essaie de montrer que la relation de viol est une relation physique qui est très profonde et je veux que le personnage de Nami fasse prendre conscience aux hommes japonais que ce n’est pas une relation superficielle. Nami reprend toujours le discours de la femme qui est violée, agressée, qui souffre de la violence aux mains des hommes. C’est le leitmotiv de la protestation des femmes en général qui souffrent de la violence de leurs relations, pas seulement dans le milieu des yakuza, mais aussi dans leur famille, avec leur copain, etc. C’est une protestation contre la condition de soumission imposée aux femmes."1

Shinde mo ii est une œuvre violente et passionnée ; une passion charnelle mais également psychologique, puisque durant le film, les amants interdits ne font l’amour qu’une seule fois (si l’on excepte le viol qui n’est pas un acte d’amour, réciproque tout du moins). Le seul élément "comique" si l’on peut dire, nous est apporté par une cameo de luxe, en la personne de Naoto Takenaka, qui y interprète un homosexuel à la recherche d’une maison pour lui et son ami... Shinde mo ii est une œuvre mélancolique dont les personnages sont malheureux de s’aimer ; l’amour y devient une souffrance - après le viol, Hirano pleure du fait d’avoir commis l’irréparable et c’est Nami qui le réconforte. Dans un plan séquence très intense, Nami pose une question essentielle : "pourquoi ne puis-je vous aimer tous les deux ?" car là repose son dilemme ; elle ne comprend pas que sous prétexte qu’elle ait rencontré Hirano après son mari, elle n’ait pas le droit de l’aimer autant que ce dernier...

Pour conclure, Shinde mo ii est un film sur l’amour (et sur l’amour que porte Ishii aux femmes), plus qu’un film d’amour, où Eros côtoie Thanatos dans une atmosphère tendue du début à la fin... Le tout est orchestré de mains de maître par Ishii grâce à une mise en scène discrète mais très efficace qui met en avant le travail des acteurs (plusieurs plans séquences fixes), et délicatement mis en musique par Goro Yasukawa qui signe encore une fois une partition envoûtante pour un film magnifique...

1 Interview réalisée par Sylvie Lachize lors du Festival Fant-Asia 98 pour Radio Canada

DVD Zone 2 (Japon) | NTSC | Format : 4/3 - 1:66 | Image : Un pressage correct | Son : Un très bon Mono | Contient le film (avec sous-titres anglais optionnels), le trailer, 25 min. d’interview (Ishii, Ôtake et le producteur) et un livret de 4 pages.

- Article paru le vendredi 15 juin 2001

signé Kuro

Japon

Ah ! Ikkenya Puroresu

Japon

Twinkle

Japon

Godzilla, Mothra, King Ghidorah : Giant Monster All-Out Attack

Japon

Doing Time

Japon

Hiruko the Goblin

Japon

Kindaichi Kôsuke no Bôken

articles récents

Japon

Dernier caprice

Japon

Fleur pâle

Japon

Godzilla Minus One

Japon

Tuer

Japon

L’Innocence

Japon

Récit d’un propriétaire