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Corée du Sud

Some

Corée du Sud | 2004 | Un film de Jang Yun-Hyeon (Chang Yoon-hyun) | Avec Go Su, Song Ji-Hyo, Lee Dong-Gyu

Un coup de feu retentit dans le noir. Une jeune femme, Yu-Jin, le visage éclaboussé de sang, ouvre les yeux, et se souvient d’un homme. Puis l’on remonte dans le temps, environ 24 heures auparavant, alors que l’histoire que l’on s’apprête à regarder est rembobinée sous nos yeux. Yu-Jin vient d’emménager dans son nouvel appartement ; un homme sonne à sa porte et lui confie un lecteur de mp3, qu’elle doit remettre à l’ancien locataire des lieux lorsqu’elle le verra. Un geste apparemment anodin, mais qui va bouleverser la vie de la jeune femme, employée par l’équivalent à Seoul de notre Info Trafic. Au même moment, l’inspecteur Sung-Joo poursuit une voiture lancée à plus de 160 km/h. Le conducteur de cette dernière est passablement drogué, et une aire de travaux aura raison de son insolence routière. Sung-Joo prend possession du portable du défunt, et poursuit sa traque indéterminée. Celle-ci l’amène au cours de la même soirée, à croiser le destin de Yu-Jin, poursuivie par ceux-là même que Sung-Joo semble rechercher, indirectement. Cette collision entre Yu-Jin, Sung-Joo et un groupe de malfrats, marque pour la jeune femme le début d’une journée rythmée par une familiarité déconcertante ; à commencer par sa rencontre avec le détective, qu’elle est persuadée d’avoir déjà croisé. La collision, humaine, devient alors aussi temporelle dans la résolution de l’enquête de Sung-Joo, dont l’objectif est de prouver l’innocence de son supérieur, accusé d’avoir dérobé 10 millions de dollars de drogue saisie par la police...

Jang Yun-Hyeon est un réalisateur rare ; en dehors de ses activités récurrentes de producteur, plus de nouvelles de sa casquette de réalisateur depuis l’incroyable Tell Me Something (La sixième victime - 2000). Some n’est d’ailleurs que son troisième long-métrage en six ans, depuis ses débuts derrière la caméra en 1998 avec The Contact. Mais l’homme est un orfèvre, un obsédé de la mécanique narrative et de son adéquation avec la forme cinématographique, autant visuelle que sonore. Some démontre une nouvelle fois l’incroyable ambition du réalisateur en matière de concepts cinématographiques ; il s’agit ici d’intégrer implicitement la notion de déjà vu au moteur narratif du film, sans pour autant plomber l’intérêt de la résolution d’une enquête tentaculaire. L’exercice est d’autant plus difficile que le film débute par sa propre fin ; le déjà vu ressenti par Yu-Jin se superpose alors à l’anticipation forcée du spectateur, pour revêtir par moments un caractère fantastique. Se pourrait-il que cette jeune femme ait réellement déjà vécue cette journée auparavant ?

Some étonne avant tout par la complexité magnifique de son écriture et de sa mise en scène ; son moteur fonctionne en boucle sur lui-même, avancant au rythme de ses propres anticipations et acceptant dès lors de n’exister que dans le cadre cinématographique. Some est une histoire qui ne peut se dérouler ailleurs que sur un écran, les jonctions, temporelles et physiques, qui lui permettent d’avancer ne pouvant fonctionner que sur un écran, au travers d’une multitude d’interfaces (écrans et caméras de contrôles, téléphones portables, GPS). Il y a longtemps déjà que le téléphone portable est utlisé comme outil de montage ; jamais cependant nos techniques de télécommunications et géolocalisation auront été à ce point utilisées en tant que vecteurs de mouvement, au point de devenir le véritable lieu de l’action, mais aussi de son interprétation et de sa résolution.

Comme avec Tell Me Something, il est difficile de parler de Some sans gâcher le plaisir qui accompagne sa découverte. A l’image de celui-ci, qui transcendait l’art cinématographique par une maîtrise de ses composantes qui allait jusqu’à l’incarnation matérielle de sa bande-son, Some est une œuvre incroyablement consciente. Si le couple Go Su / Song Ji Hyo n’égale pas le charisme de celui formé par Han Seok-Gyu et Shim Eun-Ha, et si l’on peut regretter une toute dernière séquence dont le ton est bizarrement inadéquat avec le reste du métrage, Some n’en reste pas moins une oeuvre remarquable, traitant des problématiques inexorables du destin avec toute la maîtrise d’une narration réellement multimédia - et donc parfaitement contemporaine.

Some est disponible en DVD coréen dans une luxueuse édition double DVD, présenté dans une copie anamorphique à même de restituer la beauté de la mise en images, et accompagnée de sous-titres anglais.

- Article paru le mardi 5 avril 2005

signé Akatomy

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