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Japon

A Scene at the Sea

aka あの夏、いちばん静かな海 | Japon | 1991 | Un film de Takeshi Kitano | Avec Claude Maki, Hiroko Oshima, Sabu Kawahara, Nenzo Fujiwara, Keiko Kagimoto, Susumu Terajima

Dans son camion benne, Shigeru est fasciné par la mer qu’il contemple parfois à travers le pare-brise lors de ses tournées. Il récupère une planche de surf abîmé à l’occasion de l’une d’elles et la répare avec les moyens du bord. Sans combinaison malgré une mer froide, il se lance dans l’apprentissage de ce sport sous les yeux émerveillés de Takako, sa petite amie, qui comme lui est sourde et muette. Cet intérêt pour le surf va se transformer en une passion à laquelle il va se consacrer entièrement.

Troisième film de Kitano après Violent Cop et Jugatsu, A Scene at the Sea, qui a été diffusé en France après le choc, Sonatine - sa septième œuvre qui le mettra sur la carte du cinéma mondial - représente un changement de registre pour le moins surprenant dans ce début de filmographie. D’importants éléments constitutifs du style du cinéaste japonais sont cependant déjà présents.

Si Shigeru devient un fondu de la glisse, A Scene at the Sea n’a pas comme sujet principal le surf. Il raconte comment par la force de sa volonté, il est possible de dépasser ses handicaps et sortir de sa condition. Tout le monde, des surfeurs aguerris aux jeunes de son âge, va d’abord le brocarder, mais son acharnement à vouloir dominer sa planche va progressivement lui attirer leur sympathie. Le surf sert aussi de toile de fond a sa relation sentimentale, avec Takako, qui est traitée avec beaucoup de simplicité et sans démonstration, à l’image du film.

Shigeru et Takako font partie de ces personnages marginaux qui ont les faveurs de Kitano et qui trouvent avec la plage – à la périphérie de notre société au même titre qu’eux– un lieu où une certaine innocence enfantine reste possible. Elle ne leur offre cependant qu’un répit momentané chez le metteur en scène japonais, avant un dénouement plus sombre.

Si les spectateurs non plus ne manqueront pas d’être touchés par l’opiniâtreté de Shigeru, la réussite de A Scene at the Sea repose sur la mise en scène de Kitano, qui n’a jamais recours à la facilité, pour un film qui aurait pu si aisément tomber dans le pathos.

En choisissant de faire de deux sourds et muets ses principaux personnages, le metteur en scène Japonais donne la priorité à l’image pour raconter son histoire et lui donner un style épuré et bien à lui. Il met son superbe sens du cadre et du décalage au service d’un humour pince sans rire, confinant parfois à l’absurde et qui est l’une des marques de son cinéma.

Cette simplicité est également présente dans l’utilisation de la caméra. Elle est le plus souvent immobile, une stabilité animée parfois par un panoramique accompagnant les personnages dans leurs déplacements. Ces plans immobiles de la mer, des personnes... parfois accompagnés par la musique de Joe Hisaishi, dégagent souvent quelque chose de paisible.

Le goût de Kitano pour la peinture n’était pas encore connu - et il n’était peut-être pas encore peintre - mais il travaille ici par petites touches. Ainsi Takako aide à transporter la planche de surf, même si Shigeru peut la porter facilement tout seul, pour montrer qu’elle le soutient. A la manière d’une peinture impressionniste, l’accumulation d’idées simples dans le film renforce l’émotion générale qui se dégage de l’œuvre.

A Scene at the Sea est un moment de bonheur simple, à savourer sans modération.

A Scene at the Sea est ressorti sur les écrans français le 8 août en version restaurée grâce à La Rabbia.

- Article paru le samedi 11 août 2018

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