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Japon

Alleycat Rock : Sex Hunter

aka Noro-neko Rokku : Sekkusu Hanta | Japon | 1970 | Un film de Yasuharu Hasebe | Avec Meiko Kaji, Tatsuya Fuji, Nobuko Aoki

Est-il vraiment utile de présenter Meiko Kaji ? Certes, elle n’a jamais réellement atteint le rang de star internationale mais a su acquérir un statut culte chez nombre de cinéphiles grâce à deux séries, celle des Sasori (Female Convict Scorpion, quatre films de 1972 à 1973 dont le dernier réalisé par Yasuharu Hasebe) et celle des Lady Snowblood (Shurayukihime, deux film en 1973 et 1974). Des rôles et des films qui ont fait de cette actrice/chanteuse au regard noir et envoûtant, l’une des actrices japonaises les plus marquantes de sa génération pour ce qui est du cinéma d’exploitation. Un statut culte qui fait qu’aujourd’hui on peut trouver une des ses chansons (tirée du film Lady Snowblood) sur la bande originale du dernier Tarantino en date, Kill Bill.

Mais Kaji Meiko ne s’est pas contentée de ces films légendaires et c’est ainsi qu’on la retrouve dans ce non moins culte Alleycat Rock : Sex Hunter, réalisé en 1970 par Yasuharu Hasebe (connu principalement pour Black Tight Killers, 1966, mais également réalisateur de trois films de la série des Alleycat Rock ainsi que des films réputés pour leur violence tels que Assault ! Jack The Ripper, 1976, ou Rape 13th Hour, 1977). Un film à ranger tout à côté de films étonnamment ignorés comme Zero Woman : Akai Wappa (de Yukio Noda, 1974).

"I’m an Alleycat, I can’t control myself."

Mako (Kaji Meiko) est le leader d’une bande de filles à Okinawa qui est plus ou moins le pendant féminin à la bande des Eagles, dirigée par le puissant Baron. Ce dernier est décidé à nettoyer la ville des "halfu", à savoir les mi-japonais mi-américains, surtout depuis le jour où un membre de la bande s’est fait voler sa petite amie par l’un de ces "halfu". Un jour, un homme nommé Kazuma débarque en ville à la recherche de sa sœur Megumi. Il rencontre Mako qui ne tarde pas à tomber amoureuse de ce dernier. Mais le Baron voue une passion purement platonique à Mako et n’entend pas qu’un arriviste la lui dérobe.

On l’aura remarqué, le scénario de Sex Hunter emprunte énormément au film Savage Wolfpack réalisé en 1969 par Hasebe lui-même. En fait, on peut presque affirmer que Sex Hunter est plus ou moins un remake de Savage Wolfpack tant les similarités sont nombreuses. Outre que c’est toujours Tatsuya Fuji qui interprète le rôle du chef de bande, les lieux, le style, des éléments du scénario et certains personnages sont quasiment identiques. Mis à part, et c’est une différence notable, la bande de filles menée par Mako, il y a donc peu de variations.

Alleycat Rock : Sex Hunter est lui aussi très marqué par l’atmosphère très particulière de ces années. Outre un climat très ouvertement anti-américain, il est évidemment question de jeunesse frivole et violente, de drogue et de psychédélisme. Mais Sex Hunter ne se contente pas seulement de surfer sur l’anti-américanisme de façon primaire. Le film est effectivement et paradoxalement très influencé par la culture américaine, d’abord par un environnement où la présence américaine se fait fortement ressentir (base militaire d’Okinawa et omniprésence des publicité pour des marques américaines). Comme tout bon film d’exploitation qui se respecte, il exploite des thèmes issus de la réalité sociale en mettant l’emphase sur les aspects les plus violents, choquants, provocants et évidemment vendeurs (racisme, machisme...).

Surtout, comme Savage Wolfpack, Alleycat Rock : Sex Hunter a tout du western, comme le Baron le dit lui-même à Kazuma. Les emprunts à ce genre sont nombreux (Kazuma comme le cowboy solitaire et Baron comme le méchant) que ce soit sur le fond ou même la forme (duel, vengeance, bande de voyous...). Le tout est évidemment revu à la sauce japonaise et psychédélique. Surtout, les personnages féminins ont une importance toute particulière, un peu à la manière de la plus tardive série des Sukeban (dont beaucoup furent réalisés par Norifumi Suzuki, le réalisateur célèbre pour son Couvent de la bête sacrée, et Yasuharu Hasebe réalisera Sukeban Deka : Daati Marii en 1974).

Meiko Kaji bien sûr est incroyable et campe ici un personnage et un jeu d’actrice qui deviendront sa marque de fabrique dans ses futurs films. Peu de paroles, un regard perçant, un grand chapeau noir qui réapparaîtra dans certains Sasori, pour un personnage de femme dure, habitée par l’idée de vengeance. Meiko Kaji jouera dans tous les films de la série des Alleycat Rock qui s’étend sur moins d’une année. Notons aux côtés de Meiko Kaji la présence de Tatsuya Fuji donc, plus connu pour son rôle dans L’Empire des Sens de Nagisa Oshima et que l’on a pu voir dans le récent film de Kiyoshi Kurosawa, A Bright Future.

Sombrant peu à peu dans la violence, Alleycat Rock : Sex Hunter est en fait assez similaire dans son nihilisme jusqu’au-boutiste à Zero Woman : Akai Wappa, un film lui aussi très influencé par les westerns spaghetti. Il y transparaît surtout l’attrait malsain de Yasuharu Hasebe pour la violence et pour les scènes de viol, qui explosera plus tard dans certains de ses autres films. Une violence sexuelle qui trouve son origine, comme souvent chez Hasebe, dans l’incapacité de certains hommes à avoir une relation sexuelle normale avec une femme.

En grande partie grâce à une mise en scène talentueuse et originale (notamment des effets visuels utilisés avec parcimonie mais toujours judicieusement), Alleycat Rock : Sex Hunter est tout simplement un film immanquable, surtout si l’on est fan de Meiko Kaji et des films d’exploitation japonais des années 70. Un must incontournable.

Alleycat Rock : Sex Hunter est disponible en VHS au Japon.

- Article paru le vendredi 3 octobre 2003

signé Zeni

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