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Japon | Animation

Arrietty - Le petit monde des chapardeurs

aka Karigurashi no Arrietty - 借りぐらしのアリエッティ | Japon | 2010 | Un film de Hiromasa Yonebayashi | Scénario de Hayao Miyazaki

Pour le nouvel An, le studio Ghibli nous offre son dernier film animé, Arrietty – Le petit monde des chapardeurs. Habitué des sorties pascales pour les deux derniers opus, le studio retrouve une période Noël-Nouvel An particulièrement propice à une plongée dans l’enfance, chère à Miyazaki. C’est de cela qu’il s’agit ici, avec un film qui retrouve simplicité et naïveté, loin du symbolisme fascinant mais complexe de certains chefs d’œuvre du maître. Retour aux sources pour le créateur de Petit Panda, Totoro et Ponyo ? On pourrait le croire. Sauf que si Hayao Miyazaki est bien à l’origine du scénario d’Arrietty, il n’en est pas le réalisateur. Confié à un jeune dessinateur du studio, Hiromasa Yonebayashi, le coup d’essai est digne du maître. Et ça n’est pas rien.

Arrietty est une chapardeuse. Mesurant une quinzaine de centimètres, elle vit avec sa famille, lilliputienne également, dans les fondations d’une vielle maison de campagne japonaise. Subsistant des petits vols qu’ils opèrent chez leurs géants voisins, ils doivent impérativement rester cacher, sous peine de voir leur mode de vie et leur communauté menacés. Mais un jour, Arrietty est aperçue par Sho, un jeune garçon malade venu se reposer dans la maison de sa grand-mère…

Même si l’histoire est, à l’image de la thématique du film, « empruntée », on ne peut s’empêcher d’y retrouver la patte du maître Miyazaki. Impossible par exemple de ne pas penser à Mon voisin Totoro. Les deux films commencent même de manière similaire, dans une maison à l’exil de la ville. La nature y est omniprésente, ainsi que l’ombre de la mort, qui plane sur Sho comme elle planait sur la mère de Satsuki et Mei. Le spectateur y retrouve également la même joie simple à participer aux aventures miniatures d’Arrietty, dans un monde qu’elle découvre à l’occasion de ses premières chapardes. Cependant, malgré toutes ces similitudes, le film se démarque indéniablement des œuvres de Miyazaki. Plus à l’image des réalisations de Isao Takahata, Hiromasa Yonebayashi se lance dans une réelle exploration des interactions entre ses personnages. La relation entre Arrietty et Sho grandit de manière naturelle tout au long de l’histoire et cette sincérité permet au spectateur d’entrer pleinement dans l’histoire, en dépit de sa fantaisie et de son imaginaire. Au travers de la différence de taille, le film traite d’amitié et, au sens propre comme au figuré, des rapports humains (à peu près un dixième, ici).

L’existence d’un monde minuscule et caché est d’ailleurs le principal emprunt que fait Miyazaki à l’histoire originale (le livre de Mary Norton) en l’adaptant de manière personnelle mais finalement fidèle dans l’esprit. Cette contrainte se transforme alors en force. Grâce à une exceptionnelle attention aux détails, une des marques de fabrique du studio, le petit monde des chapardeurs devient particulièrement immersif pour le spectateur. Jouissive, l’inventivité des accessoires qui met en scène les petites choses de la vie à l’échelle d’Arrietty et de sa famille (escalier de clous, scotch/chaussures de varappe, bouteille/fenêtre, etc.). Étonnants, les bruitages qui transforment une aiguille en épée, le tic-tac d’une horloge ou le réfrigérateur en intense ambiance sonore. Bluffants, enfin, les effets permis par l’animation qui expose tour à tour les mêmes décors sous un rapport d’échelle totalement différent. On passe ainsi d’un monde à l’autre, tantôt humain, tantôt chapardeur, sans aucun problème d’adaptation.

Trimballé au gré des points de vue et à la suite d’une Arrietty virevoltante, le spectateur vit au rythme effréné du film, son principal attrait. Si la mélancolie propre à tous les films du studio est bien présente, elle est ici largement compensée par des mouvements de caméra vifs, des personnages qui courent le plus souvent pour compenser leur petite taille, et enfin une musique légère et parfaitement adaptée. La bande originale de Cécile Corbet – coup d’essai là aussi - fait mouche et sa sonorité celtique toute en cordes pincées complète naturellement la tonicité et la gaieté de l’ensemble. Si l’on ajoute à cela les tons vifs et les couleurs chaudes du monde d’Arrietty, ainsi que le graphisme toujours superbe des productions Ghibli, on obtient un premier film qui tient plus que ses promesses. Emballant.

On reprochera juste une fin un peu rapide qui délaisse une relation humaine, bâtie solidement tout au long du film, pour une alternative tout juste ébauchée, ainsi que quelques stéréotypes un peu marqués qui, s’ils font sourire, constituent d’inutiles ajouts à une œuvre simple et belle. On préférera donc retenir la performance de Hiromasa Yonebayashi qui semble avoir pris un pied fou à jouer de la rencontre de tous ces univers (humains/chapardeurs, Orient/Occident), ainsi qu’une bande originale qui ne dénote pas dans la longue liste des succès de Joe Hisaïshi. La relève semble assurée, l’avenir de Ghibli s’annonce passionnant, quelle meilleure façon de nous souhaiter la bonne année ?

Arrietty - Le petit monde des chapardeurs sort sur les écrans français le 12 Janvier prochain.
Un grand merci à Katia Simon et WayToBlue.

- Article paru le mardi 4 janvier 2011

signé David Decloux

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