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Hong Kong | Chine

Mulan

aka Hua Mulan | Chine / Hong Kong | 2009 | Un film de Jingle Ma Chor-Sing | Avec Vicki Zhao Wei, Aloys Chen, Hu Jun, Jaycee Chan, Nicky Li, Yu Rong-Guang, Lu Xujin, Vitas, Xu Jiao

Depuis ses débuts en tant que réalisateur avec Hot War, Jingle Ma n’a pas réellement excellé dans le domaine de la subtilité, plus à l’aise dans le registre du divertissement crétino-coupable (Tokyo Raiders, Silver Hawk) que dans celui de l’émotion. On se demande dès lors pourquoi il s’est attaqué à la légende de Mulan avec autant de sérieux et pathos. Colossal atermoiement de plus de deux heures, cette nouvelle vision de l’un des mètres-étalons du cross gendering délaisse aussi bien le potentiel comique des quiproquos sexuellement erronés que celui, éminemment visuel, de batailles spectaculaires, pour se concentrer sur les multiples épanchements émotionnels d’une Mulan confrontée à la dure réalité de la responsabilité militaire. Une orientation que l’on perçoit d’emblée, dès notre rencontre avec une Hua Mulan (Zhao Wei) dont le père (Yu Rong-guang) voit d’un mauvais œil les peu féminines aptitudes martiales, et qui, sitôt ce dernier appelé sur un front qui ne saurait convenir à son âge et sa santé, quitte silencieusement son domicile pour servir à sa place, grimée en homme, dans le conflit contre les caricaturaux pilleurs Rouran. Aucune emphase dans cette décision qui reste intérieure ; élan pseudo féministe potentiellement intéressant, mais qui assied une impossibilité pour le spectateur de ressentir quoi que ce soit par lui-même. Au cours du condensé à venir de douze et quelques années d’excellence militaire, Mulan sera une adaptation aberrante, balisée d’une poignée de citations et bardée de ponctuation, mais terriblement dénuée de texte.

Le film de Jingle Ma avance ainsi comme s’il avait lui-même une armée aux trousses, offrant une palanquée de réactions à des actions qui nous seront, au mieux, rapportées. L’entraînement de Mulan, son accession à la responsabilité, la découverte de son secret par son ami Wentai (Aloys Chen), la difficulté de délaisser les sentiments au sein d’une chaîne hiérarchique… autant de points essentiels du récit qui sont survolés par le réalisateur, au profit d’une espèce de biographie rapportée, parcours scripté de faux ressenti, qui s’efforce de dicter au spectateur le spectre de ses émotions, de préférence les larmes plutôt que le rire. On peut comprendre que Ma n’ait pas souhaité céder aux facilités de boulevard d’un Mo lei tau, mais pourquoi délaisser à ce point la dualité, essentielle, de Mulan ? Même la scène du bain, superbement photographiée, au cours de laquelle Wentai comprend que l’un de ses hommes est une femme, refuse de proposer le moindre érotisme. D’un revers de manche, le final du film rappellera qu’une femme n’avait pourtant rien à faire sur un théâtre d’opérations mais qu’importe, cela fait longtemps que les autorités ont pardonné sa tromperie au Général Mulan. Soit, n’en parlons plus ; nous ne l’avons jamais réellement évoqué de toute façon.

Puisqu’il favorise autant, à juste titre d’une certaine façon, les aptitudes réelles à la considération des sexes, on aurait aimé que Mulan s’abandonne un peu plus au grand spectacle, qu’il nous offre la possibilité de mesurer le talent guerrier de la jeune femme à l’écran. Mais sur ce point comme sur les autres, Jingle Ma fait globalement l’impasse de la démonstration en faveur de quelques bilans réducteurs, obsédé par le maelström intérieur de son héroïne. Certes, Zhao Wei, magnifique comme à l’habitude, fait étalage de sa propension à exceller dans l’incarnation de toutes les émotions, mais celles-ci restent distantes, décontextualisées à l’image. Mulan passe donc son temps à se languir dans une souffrance exclusive, appuyée par une bande son qui pille la vague Hans Zimmer post-Gladiator avec la même partialité que celle qui définit son adaptation tronquée. Ne restent donc de l’influence du stakhanoviste épique que les vocalises lancinantes, qui achèvent de rendre le film hautement dépressif. En dépit de sa photographie magnifique et de son actrice sublime, Mulan, globalement consternant, n’a d’épique que son égocentrisme larmoyant.

Mulan est disponible un peu partout, de la Chine à l’Angleterre, en supports numériques sous-titrés anglais.

- Article paru le mardi 5 avril 2011

signé Akatomy

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