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Hors-Asie

The Descent

UK | 2005 | Un film de Neil Marshall | Avec Shauna MacDonald, Alex Reid, Natalie Mendoza, Saskia Mulder, Nora-Jane Joone, MyAnna Burning, Oliver Milburn, Molly Kayll

La sixième guerrière.

Sarah, Beth et Juno sont trois amies, adeptes des sports extrêmes. C’est lors d’une descente en rafting que nous faisons leur connaissance ; à leur arrivée, Paul, le mari de Sarah, et leur fille Jessica les attendent. Pour rire, Beth et Sarah poussent Juno dans l’eau. C’est Paul qui lui tend une perche pour la sortir de la froideur du torrent ; s’ensuit un échange silencieux lourd en sous-entendus... Sur la route du retour, l’attitude de Paul renforce encore cette impression d’une relation tue ; alors qu’il répond aux interrogations de sa femme quant à son air distant, la voiture dérive et heurte de plein fouet un véhicule sur la file de droite. Seule Sarah survit à l’accident.

Un an plus tard. Sarah, accompagnée de Beth, rejoint Juno et trois autres extrémistes dans les Appalaches pour une expédition spéléologique. La descente se devait d’être simple au grand dam de Jenny, adepte des sensations fortes, mais Juno en a secrètement décidé autrement, emmenant le groupe dans un réseau inexploré. Un éboulement plus tard, les six femmes sont prises au piège plusieures centaines de mètres sous terre, un sac de cordes en moins. Et Sarah est persuadée qu’elles ne sont pas seules dans les ténèbres, ce que toutes vont pouvoir rapidement vérifier par elles-mêmes...

La spéléologie... Ses espaces confortables, sa luminosité aveuglante, son confort visuel et auditif... Gloups. A n’en pas douter, cette pratique « extrême », qui vous entraîne dans les entrailles de notre chère planète, se suffit à elle-même pour poser le cadre d’un film d’horreur. Le parcours d’un boyau partiellement immergé, l’effondrement d’un tunnel approximatif, le moindre accroc dans un parcours qui vous fait croire à l’immobilisation ; autant d’éléments qui, filmés intelligemment, suffisent à flanquer une trouille pas possible à bon nombre de claustrophobes qui s’ignorent plus ou moins - dont je fais bien entendu partie. Neil Marshall l’a d’ailleurs bien compris, tant la première partie de ce second opus après l’excellent Dog Soldiers exploite le potentiel panique et oppression de ce sport pas comme les autres. Comme il a de plus abattu une chappe de plomb sur le spectateur en pré-générique, et que la merveilleuse partition de David Julyan, telle une épitaphe, prolonge dans ses envols pénibles la douleur de la mort de Paul et Jessie de façon durable, autant dire que, en compagnie de ces six femmes et sous ces tonnes de pierre et de terre, on se sent bien. A l’aise. Détendus.

Du coup, lorsque Sarah aperçoit, au fond d’une grotte, une forme humanoïde, on se dit chouette ! Sieur Marshall souhaite détendre un peu l’atmosphère, relacher la tension qui se crée en silence entre Sarah et Juno, nous emmener vers d’autres horizons. Après tout, nous sommes dans les Appalaches, et quel état se prête mieux que le Tennessee à une dérive survival ? Hein ? Neil, au fait, où est passé l’humour étalé avec un tel talent visceral dans Dog Soldiers ? Pourquoi t’acharnes-tu de la sorte à nous coller la trouille ? Bon sang, mais quelle est cette créature qui vient d’apparaître derrière Jenny, victime d’une détestable fracture ouverture que tu as « soignée » en gros plan ?????

A partir de cette apparition, rien ne va plus. Nos six femmes vont faire face à une horde de créatures humanoïdes terrifiantes, bien décidées à les mettre en miettes. Au lieu de se livrer au schéma classique du survival, façon victimes hurlantes et impuissantes, Neil Marshall retrousse ses manches et envoie ses belles donzelles faire un bien sanglant turbin. Ca commence logiquement avec Juno, la plus sévèrement burnée de l’équipe, pour se propager jusqu’à une Sarah transfigurée par sa descente littérale dans les enfers, incarnées à l’écran par une épouvantable mare de sang... Pas de dialogues ou presque, cette seconde partie de The Descent, abîme magistrale d’horreur et de brutalité, est un substrat repensé de tout ce que le survival contient de plus effrayant, capable même de renvoyer Alexandre Aja dans ses pourtant si belles Collines. Toutefois, la véritable référence de The Descent est à mes yeux ailleurs, dans un film d’horreur qui n’en est pas un puisqu’il épouse les traits d’une vraie-fausse épopée Fantasy : Le 13ème Guerrier de MacTiernan. Souvenez-vous de cette expédition suicide, au cours de laquelle les héros du chef-d’œuvre de MacT plongeaient dans le repère souterrain des mangeurs de morts, pour y affronter leur mère... c’est à cette scène que s’apparente The Descent, ou plus exactement à la scène absente du film de MacTiernan, qui expliquerait pourquoi « Ibn » ressort de la grotte matriarcale recouvert de sang. Avec cette inversion importante, qu’au lieu de découvrir que leurs monstres sont en réalité des humains, les héroïnes - ou plutôt les victimes - de Marshall découvrent que les humains - ceux qui les traquent, mais aussi les femmes qui les accompagnent sous couvert d’une amitié discutable - sont en réalité des monstres.

Sans faire la moindre concession, Neil Marshall livre ici un film d’horreur parfait : il démarre par un traumatisme pour ébranler notre confort, le prolonge dans l’obscurité, se joue d’un hors-champ qui envahit perpétuellement l’écran sous les traits des ténèbres étouffant les six spéléologues, avant de le le faire pénétrer de plein fouet, couleur écarlate, dans un écran épuisé par les assaults incessants de Sarah et Juno contre leurs agresseurs. The Descent n’est pas un simple film de persécution mais en plus un film d’action au sens propre : même la première victime n’est pas simplement entraînée dans l’obscurité des tunnels, mais le sujet d’un combat acharné entre une créature et la belle asiatique, bestial, régressif. Marshall fait de tous ses personnages des bêtes féroces, luttant pour leur survie mais aussi dans un soucis de vengeance silencieuse, doublant le champ de bataille d’un règlement de compte personnel jamais véritablement explicité mais parfaitement compréhensible... C’est pour tout cela que The Descent est un survival pur et dur, épouvantable et magnifique, sans doute l’un des films les percutants et épuisants des vingt dernières années, qui plus est transcendé par sa nature de film de femmes.... ni plus ni moins qu’un chef-d’œuvre, détestable à souhait !

Sorti sur les écrans français le 12 décembre 2005, The Descent est disponible en DVD à prix réduit ; alors n’hésitez plus !

- Article paru le jeudi 16 novembre 2006

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