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Ballroom Dancing

aka Strictly Ballroom | Australie | 1992 | Un film de Baz Luhrmann | Avec Paul Mercurio, Tara Morice, Bill Hunter, Pat Thomson, Gia Carides, Peter Whitford, Barry Otto, John Hannan, Sonia Kruger, Kris McQuade, Pip Mushin, Leonie Page, Antonio Vargas, Armonia Benedito

Quelque part en Australie... Le jeune danseur Scott Hastings, célébrité locale, est promis au meilleur avenir : ses parents mais aussi son professeur de danse, savent que cette année sera la sienne, et qu’il remportera la Pan Pacific, l’une des compétitions de « Ballroom Dancing » les plus prestigieuses qui soient. A condition bien sûr, que le danseur arrête de danser ses propres pas et s’en revienne à un style plus académique, comme demandé par Barry Fife, président de la Fédération... Mais Scott ne veut rien savoir ; peu importe que sa partenaire le quitte trois semaines avant la compétition fatidique, il s’ennuie dans ces danses qui ne sont pas les siennes, et veut dancer comme il l’entend. Fran, jeune débutante qui s’est éprise du rebelle, lui propose alors de devenir sa partenaire. D’abord sceptique et limite insultant, Scott ne tarde pas à découvrir le potentiel de la jeune australienne d’origine espagnole, et renforce sa volonté de suivre son propre chemin. Mais sa mère et Fife ne l’entendent pas de cette façon...

Premier long métrage de Baz Luhrmann tourné en 1992, Ballroom Dancing est aussi le premier volet de sa « Red Curtain Trilogy », qui s’étendra sur près de dix ans, avec Romeo + Juliet (1996) et Moulin Rouge ! (2001). On y découvre le goût du réalisateur pour le kitsch bon enfant et la comédie théâtrale (il s’agit d’ailleurs de l’adaptation d’une pièce), ainsi que bien entendu, sa passion pour l’expression musicale, corporelle et visuelle. Visiblement doté d’un budget limité, Ballroom Dancing est cependant bien loin des délires de caméra et de montage de ses deux successeurs ; il s’agirait presque en tout point au contraire - dans la forme du moins - d’un film classique. Bien loin d’être une critique (car le film est simplement magnifique), ce point vise à souligner le rôle singulier de cette œuvre au sein de la courte filmographie du réalisateur ; rôle qui se trouve non pas dans la mise en place d’un édifice stylistique, mais dans l’énonciation d’une démarche. Ballroom Dancing plus qu’une œuvre de jeunesse, est un prologue en forme de lettre d’intention, un manifeste.

Scott Hastings est mû par un amour authentique de la danse ; non pas celle que l’on enseigne mais celle que l’on invente. Un personnage qui, en moins sensuel et tragique, renvoie à Kyoko, l’héroïne du roman éponyme de Ryu Murakami, dont l’approche de l’expression corporelle constituera, à terme, la finalité du danseur australien ; à savoir une forme libre, en marge des pas « officiels », née du ressenti et du laisser-aller, et non pas de la répétition et du conformisme académique. C’est une telle forme de danse que Scott caresse, parfaitement volontairement, sans être capable de l’exprimer ; c’est pourquoi l’intervention de Fran et de sa famille est nécessaire, aussi bien pour le conforter dans l’intelligence de sa décision, que pour lui faire comprendre qu’un tel choix implique un suivi du rythme non pas externe, mais bel et bien interne.

En quoi la démarche de Scott Hastings est-elle alors, au sein de l’œuvre de Baz Luhrmann, une lettre d’intention ? Le réalisateur exprime ici sa volonté de faire du cinéma, de traduire les émotions en gestes et en musiques, mais en s’affranchissant d’une forme classique. S’il est encore lui-même Scott Hastings aux commandes de Ballroom Dancing, il deviendra telle Kyoko - et donc tel Scott à la fin du film - aux commandes de Romeo + Juliet et Moulin Rouge ! Le premier pose les bases d’une expression cinématographique complètement libre, affranchie de toute classification, et se permet de plus de traduire un ressenti personnel du texte de William Shakespeare. Romeo + Juliet n’est pas une réécriture de la pièce originale, juste une interprétation - au sens scénique du terme - unique. Moulin Rouge ! quant à lui, pousse encore plus loin l’appropriation d’une culture musicale, et sa remise en forme qui, à mille lieux de la trahison, s’affirme par sa justesse et sa pertinence.

Tel son jeune protagoniste, Baz Luhrmann a choisi de danser suivant ses propres pas, tout en respectant la musique et la vie qui l’inspirent ; choisi de vivre sa vie et ses choix pleinement, car « une vie vécue dans la peur, est une vie vécue à moitié ». Ca lui vaut peut-être d’être montré du doigt par certains académiciens old school ; mais nous savons tous qu’au bout du compte, c’est la génération Luhrmann qui l’emportera, tant qu’elle parviendra à s’affranchir des conventions avec une honnêté aussi merveilleusement et intelligemment affirmée.

- Article paru le mardi 26 avril 2005

signé Akatomy

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