Blood
Bloody fucking failure !
Blood, c’est l’histoire d’une certaine Miyako Rozmberk. Non contente d’être tombée dans un baril de consonnes étant petites, cette aristo superbe est aussi un vampire, qui s’est autrefois offert un compagnon d’éternité en la personne d’Ukyo Kuronuma, sabreur qui lui était venu en aide alors que Tôkyô s’appelait encore Edo. Blood, c’est aussi l’histoire de Hoshino, détective rangé aux Cold Cases nippones, qui fait bien chaude figure face à son homologue américano-télévisuelle : Lily Rush et son anémie blafarde, érotisme contradictoire d’anorexie et de blancheur de peau. Parce que des deux, c’est pourtant lui le vampire ; converti par la belle Miyako au cours d’une enquête sur un meurtre en passe de tomber sous le coup du délai légal de prescription. Une jeune nurse drainée de son sang quatorze ans auparavant dans l’ancienne demeure de Dame Rozmberk, dont l’assassin serait Ukyo, qu’Hoshino surprend en plein festin vampirique avant de se faire battre comme plâtre et d’être sauvé par le sang de Miyako...
Huh. Aux commandes de Shinobi, Ten Shimoyama avait réussi à mes yeux, à trouver un équilibre pertinent entre l’immobilisme et le mouvement, à marier le contemplatif soigné au spectacle vidéoludique rapide. Comment expliquer du coup, l’improbable débâcle de Blood, téléfilm pénible et moche, qui plombe une trop implicite histoire d’amour et de destins croisés à la force de son inertie narrative, somme sans intérêt de raccourcis improbables ? Comment exprimer l’ennui qui nous saisit à chaque instant du film, même face à la sublime nudité de Dame Sugimoto ?
Blood est un film de papier glacé, obsédé par la symétrie et les aplats de couleurs haute définition. Artificiel à l’extrême, il maltraite le mythe des vampires – qui, ici, sont bardés de maquillage chaleureux et se promènent en plein jour – et l’érotisme qui, de tout temps, lui a été associé. Shimoyama lisse chacun de ses visuels à coups de numérique propret, déploie une palette de couleurs qui détruit les détails, jaunit ses protagonistes et oblitère la moindre texture. D’incroyablement humaine, presque palpable devant la caméra de Takashi Ishii, Aya Sugimoto se retrouve réduite à la somme de ses formes, certes délicieuses, mais simplement figurative. A aucun moment le réalisateur n’essaye-t-il de saisir ce que l’actrice, fantasme exacerbé, avait su abandonner aux deux opus de Hana to Hebi : alors victime forcenée, capable de détruire la masculinité de tout un chacun à la force de l’appropriation des abus sexuels qui lui étaient infligés, elle devient dans Blood une amazone centerfold, plus offerte aux autres qu’à son propre plaisir.... Un comble pour une vampire surannée qui s’octroie les compagnons de son choix pour une éternité plus ou moins longue, les chevauche sans cesse de sa superbe !
A l’image de cette féminité réductrice, Blood ne développe rien, n’attire jamais l’œil ni n’émoustille – bien qu’il se targue d’une classification adulte largement usurpée. Shimoyama se contente de juxtaposer discussions plates, combats minimalistes et accouplements destinés à la TNT, délaisse les fluides et les zones d’ombres, supprime les noirs d’un univers pourtant né de l’obscurité. Ses acteurs ne sont pas dirigés, tout juste unidimensionnels, l’écriture est stupide et surtout, j’insiste, l’image est affreuse, caricature d’un cinéma HD sans le moindre grain. Heureusement, le film est court ; ce qui permet de réduire, un tout petit peu, l’affront fait à Aya Sugimoto : car même face à ses incroyables attributs, je n’ai pu m’empêcher, tout au long de Blood, de consulter ma montre pour connaître l’échéance du supplice. Quasi homonyme phonétique, Bored aurait été un titre plus approprié pour ce qu’il convient d’appeler, d’un terme très « webcritique » dont vous me pardonnerez l’emploi - une fois n’est pas coutume -, une véritable purge cinématographique.
Déception dantesque, Blood est disponible en DVD au Japon, sans sous-titres, ainsi qu’en VCD et DVD HK sous-titré anglais.





