Buddha’s Palm
A l’époque des Song, le grand Bodhisattva, après sept années de méditations, invente les neufs styles de la Paume de Bouddha, le plus puissant des arts martiaux. Attaqué par les autres clans qui convoitent son secret, le maître décède, non sans avoir transmis son savoir à son disciple, Gu Hanhun aka Nuage Pourpre. Rendu furieux par le décès de son maître, celui-ci se venge sous le nom de Dieu des Nuages Pourpres. Au cours des batailles qui s’en suivent, seuls quatres personnes peuvent prétendre le vaincre : Sun Biling aka les Anneaux Volants, Liu Piaopiao aka les Clochettes Volantes, la Main Mortelle du Tonnerre et le Grand Pied Céleste. Après l’ultime bataille de Tianshan, les cinq combattants disparaissent...
Vingt ans plus tard, à la Villa des Nuages de Fumée... Long Jianfei est l’objet des railleries de ses camarades. Défiguré par amour pour la belle Liu Mingying, qui se voit contrainte par intérêt politique d’épouser Cœur Glacé, Jianfei va affronter l’usurpateur. Il échoue et se voit projeté d’une falaise, rejeté. Sauvé par en vol par une étrange créature ailée - Gros Bêta - il est amené au pied de la Grotte de l’Isolement, où l’attend le Dieu des Nuage Pourpre, désormais aveugle. Celui-ci lui raconte son histoire : trompé par ses adversaires, il a perdu la vue à la suite d’une chute. Sauvé alors par une belle inconnue, il apprend par la suite son identité - Liu Piaopiao - et la chasse. C’est pourquoi il est seul, depuis près de dix ans. Hanhun souhaite prendre Jianfei pour élève, justement parce que celui-ci refuse tout d’abord d’apprendre la Paume du Bouddha, et qu’il est un peu stupide. Notre héros finit par accepter. Désobéissant à son nouveau maître, il part récupérer un œuf de dragon, capable de lui rendre la vue. Les deux hommes se rapprochent, Jianfei devient le fils adoptif du Dieu des Nuages Pourpres. Celui-ci va le charger de retrouver Liu Piaopiao. Mais les adversaires du maître apprennent que celui-ci est en vie, et souhaitent se venger de ses méfaits passés...
Avant le célèbre Zu, Warriors from the Magic Mountain de Tsui Hark, la Shaw Brothers s’était déjà essayé au film d’arts martiaux à grand spectacle, faisant pénétrer le cinéma HK de plain pied dans le monde des effets spéciaux post-Star Wars. Un bonheur que le film qui s’en suit, Buddha’s Palm de Taylor Wong, avec dans le rôle principal Derek Yee (futur réalisateur de Viva Erotica), passeur de ce monde ahurissant, ultra-speed et parcouru de personnages délirants, de combats dantesques et de guerriers en tous genres, explicité par un narrateur omniscient qui tiendrait presque du commentateur. Au cours d’une heure et demie de narration à faire pâlir de simplicité la trame de Legend of Zu, Buddha’s Palm nous confronte en effet à des créatures dont les ailes sont faites de moquette, à un enfant se servant d’une vilaine tumeur au visage, remplie de pus dévastateur, pour venir à bout de ses adversaires, à des musiciens maléfiques (qui préfigurent l’une des séances d’anthologie de Kung Fu Hustle), à l’homme à la jambe en caoutchouc, capable de s’étirer à l’infini et j’en passe... le tout à grand renfort d’effets spéciaux kitchissimes, dessinés à même la pellicule, sans aucune préoccupation de réalisme - et c’est tant mieux -, pour donner vie à la Palme du Bouddha et autres sabres laser à base de souffle de dragon (Constantine anyone ?)...
Il faut dire aussi que le terme favori des scénaristes anglophones, « suspension of disbelief » s’applique ici sans peine, tant on est assailli par une action incessante et délirante, portées par une multitude de personnages plus ou moins importants... on croise même à plusieurs reprises Lo Lieh, incarnant le Sâge des Iles du Levant, un combattant loufoque précédé de son propre jingle... Il est difficile de résumer toutes les qualités aberrantes de ce Buddha’s Palm, presque aussi rapide finalement que Zu, qui lui succèdera l’année suivante, et classique au même titre. Les personnages sont peut-être moins beaux que ceux, emblématiques, du film de Tsui Hark, mais ils figurent tout de même au panthéon de l’imaginaire hongkongais. A lui tout seul, Buddha’s Palm renferme en effet plus d’idées, de mises en scène et martiales, que l’ensemble de la production mondiale de l’année écoulée, je vous l’assure ! Bref, un spectacle hallucinant et presque erreintant, que l’on ne peut que se réjouir de retrouver ainsi restauré. Du grand Shaw Brothers, jouissant de décors sublimes, d’une musique délirante et de prestations grandioses... du cinéma total, en quelque sorte !
Buddha’s Palm fait partie de la seconde salve de films de la Shaw Brothers distribués par CTV, qui sort le 22 septembre 2005. Le travail de restauration de la copie est magnifique, et la bande-son en surround est excellente. En guise de suppléments, un entretien avec Candice Yu, Shaw Yin-yin et Gordon Chan (en tant que directeur, à l’époque, du département des effets spéciaux de la Shaw). La classe.






