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Japon | Animation

Cowboy Bebop : Tengoku no Tobira

aka Cowboy Bebop : Knocking on Heaven’s Door | Japon | 2001 | Un film de Shinichirô Watanabe

Au cours des cinq dernières années, il y a quelques séries d’OAV (Original Animation Video) qui ont particulièrement marqué l’esprit de bon nombre d’otakus. Parmi celles-ci, je pense que l’on peut affirmer que trois séries en particulier ont attiré l’attention d’un public bien plus vaste que les habituels cosplayers : Neon Genesis Evangelion, Serial Experiments Lain et Cowboy Bebop. La première est une relecture extraordinaire des traditionnels "robots" qui ont bercé notre enfance. La seconde est l’une des plus grandes expériences (télé)visuelles de la fin du siècle dernier, première création multimédia véritablement pertinente. La troisième, qui nous intéresse aujourd’hui, procède d’une démarche relativement en marge de la production nippone classique : avec son mélange de SF, de polars très seventies, et ses bad guys on ne peut plus comics, la série est devenue l’illustration auto-réfléxive de l’un de ses propres slogans : "And this new style of art will probably be called ’Cowboy Bebop’".

Trois ans après les 24 (fabuleux) épisodes qui composent la série d’OAV, Knocking on Heaven’s Door offre à Shinichirô Watanabe (co-réalisateur de Macross Plus, rien que ça) l’opportunité de développer son univers (impitoyable - désolé) sur grand écran, avec près de cinq fois plus d’espace narratif que dans la forme télévisuelle de la série - soit 114 minutes de... (voir la fin de l’article). On retrouve donc Spike Spiegel, chasseur de primes nonchalant, et son nostalgique collègue d’infortune Jet Black, à bord de leur vaisseau, le Bebop - en compagnie de Ed, jeune fille étrange mais surdouée en informatique, le canin Ein, et surtout la plus belle femme en cellulo de l’univers - j’ai nommé : Faye Valentine (-soupir-) ; pour une aventure qui, à fortiori, se déroule peu de temps avant la fin de la trame développée au cours de la série (mais qui en est tout de même à peu près indépendante).

Le film commence sur le quotidien plutôt réducteur de nos amis cowboys Spike et Jet, qui poursuivent de vulgaires voleurs dans le but de manger autre chose que des nouilles ramen. Pendant ce temps-là, Ed assiste Faye dans la poursuite d’un hacker hautement recherché du nom de Lee. Alors que la demoiselle Valentine s’approche en vaisseau pour une arrestation dans les règles, elle voit un inconnu en manteau noir sortir de la voiture supposée appartenir à Lee. Quelques instant après, une explosion dévaste les rues que Faye survolait - explosion à laquelle l’inconnu survit miraculeusement. Spike et Jet découvrent les nouvelles à la télé, alors que Faye rejoint le Bebop, bredouille : pendant les trois heures qui ont suivi l’explosion, un virus semble s’être répandu au sein de la population. Les cowboys, alléchés par une récompense de 300.000.000, vont alors se mettre en chasse de Vincent, un terroriste biologique hors du commun...

Si Cowboy Bebop, dans sa forme épisodique, est aussi remarquable, c’est pour un certain nombre de raisons. La première, bien sûr, c’est sa réalisation à toute épreuve, qui se rapproche d’une logique live rarement aussi poussée dans le milieu de l’animation : simulation de différentes focales, effets de profondeur de champ, mouvements de caméras travaillés et montage au rasoir ; toute la gamme des effets cinématographiques est utilisée avec brio par Watanabe pour faire vivre les vingt-trois minutes qui composent chacun des épisodes de la série. Ensuite, sa narration trompeuse fonctionne sur une alternance attente/action qui rappelle les polars américains des années 70, maitrisée à la seconde près - et ce aussi bien au sein de la trame globale que pour celle de chaque aventure. Enfin, l’univers protéïforme dans lequel évoluent Spike, Faye et Jet termine de placer Cowboy Bebop dans une autre galaxie : l’architecture futuriste cohabite sans peine avec celle de nos villes modernes, les rues du Japon se confondent avec celles de New York et San Francisco, le far-west est confronté à l’urbanisme avec une approche que l’on pourrait rapprocher de celle développée par un certain Don Siegel (hasard ou hommage ?) dans Dirty Harry, et les modes vestimentaires plutôt rétro sont en plein contraste avec les gadgets SF qui s’étalent au fil des plans. Rajoutez à cela la bande-son (toujours) exceptionnelle de Yôko Kanno (Escaflowne, le premier segment de Memories - Magnetic Rose), hybride propriétaire de jazz, de blues et de nombreuses formes musicales libres, et vous obtenez un univers aussi disparate que redoutablement cohérent - et passionant

A l’annonce de Knocking on Heaven’s Door, les plus sceptiques doutaient de la viabilité de l’esprit Bebop sur la durée d’un long-métrage ; nul doute que le résultat les laissera aussi pantois que moi. Car Knocking on Heaven’s Door est bien le plus bel épisode de la série la plus surprenante de ces dernières années (les deux derniers épisodes mis à part, évidemment) : une histoire sublime servie par un scénario sans failles, une réalisation de toujours aussi bon niveau, et surtout ce blues caractéristique qui place Cowboy Bebop dans une optique millénariste particulièrement désabusée, mais de façon crédible.
Les néophytes peuvent apprécier le film dans sa quasi-globalité (seules quelques références à la trame de la série récompensent les plus fidèles), et nul doute que tous ceux qui s’y risqueront y trouveront leur compte. Avec ses problématiques humaines portés à une échelle in/sur-humaine, Knocking on Heaven’s Door est sans doute le portage d’OAV sur grand écran le plus réussi de tous les temps, un chef-d’oeuvre du film noir, et la confirmation (si besoin était) du talent nonchalant de Shinichirô Watanabe.

Ah oui, j’oubliais : 114 minutes de BONHEUR. Que dire de plus ?

Cowboy Bebop : Knocking on Heaven’s Door sortira en DVD au Japon au mois de janvier 2002, sans sous-titres. Désolé !

Addendum - 01/10/03 : Cowboy Bebop sort en salles en France aujourd’hui, et est disponible en DVD un peu partout, sous-titré !

- Article paru le dimanche 4 novembre 2001

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