Cutie Honey
Alors que les Américains n’en finissent plus de nous ressortir des super héros issus des comics, les Japonais semblent bien partis pour faire de même. Et cette année apparaît particulièrement riche en adaptations au cinéma de manga. Go Nagai est surtout à l’honneur puisque outre l’attendu Devilman et les inaperçus Maboroshi Panty et Kekkou Kamen, c’est Cutie Honey qui vient de débarquer sur les écrans de l’archipel.
C’est Hideaki Anno (Ritual et Love & Pop pour les films, Evangelion pour l’anime) qui a été chargé de la réalisation, et en dépit de toute ma bonne volonté (et un gros faible pour Love & Pop), Cutie Honey ne peut être difficilement qualifié d’autre chose qu’un très mauvais film. Le problème principal de Cutie Honey est qu’il ne s’agit de nulle autre chose que du V-cinema que l’on veut nous faire passer pour un véritable film. Malheureusement, à être assis ainsi le cul entre deux chaises, le film finit par se péter la gueule de lui-même, et ce à peine les premières minutes écoulées.
Passons rapidement sur un scénario d’une telle linéarité que plus aucun réalisateur n’aura à rougir d’un scénario un peu moyen lors d’une prochaine adaptation d’un manga/comics à l’écran. C’est toujours ça ! D’autre part, le film ne semble pas disposer d’un budget beaucoup plus confortable que n’importe quel film de série B straight-to-vidéo. Les quelques sponsors (Au, Family Mart et j’en passe) ont cependant le droit à une bonne visibilité...
Evidemment, lorsque l’on entend cosplay et érotisme (Cutie Honey se déguise régulièrement et l’accent est systématiquement mis sur son côté sexy), on pense tout de suite à Takao Nakano, le grand manitou du genre. S’il ne fait guère de doutes que ce dernier a largement emprunté à Go Nagai, son style est tout de même identifiable entre mille et il n’a jamais prétendu à autre chose qu’un cinéma fauché, érotique et amusant. Une formule qu’il a su parfaitement exploiter.
Hideaki Anno se contente quant à lui de faire du Nakano tout public et s’il retire évidemment toute composante trop érotique ou vulgaire, il élimine au passage l’humour, ce qui fait qu’il ne reste plus grand chose à apprécier dans Cutie Honey. Le résultat est donc une ennuyeuse suite d’effets spéciaux lamentables (même Nakano fait mieux, on est ici plus au niveau d’un épisode de San Ku Kai), de personnages mal interprétés et sur-joués (Eriko Sato qui interprète Cutie Honey est particulièrement mauvaise), que l’absence chronique de véritable second degré rend particulièrement stéréotypés.
De ce naufrage, peu de choses à sauver si ce n’est deux-trois scènes d’animation très courtes. A ce propos, Hideaki Anno aurait certainement mieux fait de se cantonner à l’anime, et c’est d’ailleurs ce dernier qui supervise Re:Cutie Honey, un des anime produits pour fêter les 20 ans du studio Gainax. On pourra également retenir un visuel intéressant style 60s sur certaines scènes où soudain on semble transporté dans un tout autre film. Dommage que ces passages se comptent en secondes et qu’ils apparaissent comme des sortes de clips incongrus au beau milieu du film.
Cutie Honey est tout simplement un film ambitieux sans s’en donner les moyens (visiblement ils ont été dilapidés dans une voiture de sport, le reste n’est que du bricolage vidéo élémentaire ou des décors et costumes très moyens), voulant toucher un large public (exit la lubricité voire une certaine perversité présente chez Go Nagai), mais qui au final ressemble à un mauvais épisode de Kamen Rider version féminine. Dans le genre, je ne peux que conseiller de visionner plutôt Queen Bee Honey de Takao Nakano, qui bien que n’étant pas ce qu’il à fait de mieux, est nettement plus amusant et mieux réalisé que cet insupportable nanar prétentieux qu’est Cutie Honey.
Cutie Honey est sorti sur les écrans japonais le 29 mai 2004.

