Deewangee
Jean-François Richet réalise une nouvelle version du célèbre Assault on Precinct 13 de John Carpenter... Trois Hommes et un Couffin traverse l’Atlantique, séduit la moustache de Tom Selleck et devient Three Men and a Baby... L’Inde s’inspire de succès américains pour en tirer des versions longues destinées à son propre marché... Les idées cinématographiques circulent aujourd’hui dans le monde entier, donnant lieu à plusieurs versions selon les différents marchés, et nous offrant ainsi différentes déclinaisons d’un même thème. Positif. D’autre part, par ce biais, elles touchent un public plus large, plus facilement puisqu’elles sont préalablement adaptées. Positif. Malheureusement, ce travail de digestion en amont nuit sans doute à la gymnastique intellectuelle du public, à sa curiosité, contribuant ainsi à la chute neuronale des masses.
N’allons pas imaginer pour autant que la production du remake indien de Primal Fear soit une action préméditée du gouvernement ; Deewangee est un pur produit de l’entertainment business et l’on ne va pas s’en plaindre. Écrit et réalisé par Anees Bazmee, ce thriller nous place au centre d’un triangle amoureux ; étonnant pour un film indien... Raj (Akshaye Khanna) est un brillant avocat, intègre, qui n’a jamais perdu un seul procès. Lors d’une soirée organisée par une maison de disques, il tombe sous le charme de Sargam (Urmila Matondkar), icône du label susdit. Quelques heures plus tard, Tarang (Ajay Devgan), un ami d’enfance de Sargam, est retrouvé les mains ensanglantées non loin du corps d’Ashwin Mehta, le boss de la maison de disques. Tarang étant naturellement accusé de ce meurtre particulièrement violent, Sargam insiste auprès de Raj pour qu’il prenne la défense de son ami. Celui-ci accepte sans hésiter, mais également sans se douter de ce qui l’attend...
Comme la plupart des productions locales, Deewangee repose en premier lieu sur son casting : avant de poursuivre sa carrière avec Bhoot et Qayamat, Ajay Devgan nous sert ici une prestation efficace sur un classique de la composition dont je ne peux malheureusement vous révéler la teneur sans briser l’un des ressorts du film. Certes, le registre des détails de son jeu reste assez limité mais il s’avère suffisamment convaincant pour rendre le personnage crédible. Affublée d’une paire de lentilles à faire pâlir de jalousie Legolas, Urmila Matondkar (Bhoot) se la joue rockstar entre deux feux virils pour une prestation dispensable. Quant à Akshaye Khanna, il quitte ses yeux de cocker qui lui servaient parfaitement dans Dil Chahta Hai pour donner la réplique à Ajay Devgan dans un registre tout aussi tordu.
C’est d’ailleurs l’une des forces de Deewangee : l’affrontement entre les deux protagonistes masculins donne lieu à une surenchère de machiavélisme intéressante et crédible. Soulignons également l’accent porté sur le meurtre d’Ashwin, commis à l’arme blanche ; sa représentation est assez audacieuse pour un film indien puisque doigts coupés et giclées de sang ne nous sont pas épargnés.
Musicalement, les codes du genre sont respectés : nous avons droit à plusieurs intermèdes romantiques en Suisse allemande ainsi qu’aux changements décomplexés de décors/costumes en un claquement de doigts... du bonheur... Mention spéciale pour les bruitages nés d’une banque de sons particulièrement réduite.
Bref, Deewangee, c’est du cinéma de divertissement indien basé sur un scénario à suspense américain. Et ça fonctionne plutôt bien. D’ici à ce que ces flux d’inspirations donnent naissance à un remake de Kuch Kuch Hota Hai par Gérard Pirès...
Deewangee est disponible en DVD indien.


