Doghouse
Six potes, on ne peut plus grands-bretons, délaissent leurs moitiés castratrices le temps d’un week end entre mecs, dans l’idée de remonter le moral de Vince, en instance de divorce. Bitures au programme d’un séjour dans l’un des orifices de l’Angleterre, la petite ville de Moodley où les femmes sont supposées être quatre fois plus nombreuses que les hommes. Une équation qui n’est pas sans déplaire à Neil, dragueur incorrigible qui insupporte même ses amis misogynes, c’est dire, incarné par l’homme sans qui il semble désormais impossible de monter un projet horrifique outre-Manche, Danny Dyer (Severance, Straightheads). Sur place, la fine équipe qui partage la même sonnerie de portable a tôt fait de déchanter, ces dames ayant toutes été transformées en monstres cannibales par un projet militaire top secret. Et pas question de mettre les bouts, puisque la belle Ruth, chauffeuse que Danny préfère appeler Candy, assied sa mutation dégueu à l’intérieur de leur minibus. Assez de tyrannie féminine : au risque de vous les faire trancher, il va falloir redorer vos chibres, messieurs.
Pas question de crier au génie devant la filmographie de Jake West, savant opportuniste fétichiste qui assied son travail dans l’ère du temps avec des bouts de ficelles et de tripaille ; pourtant, comme j’avais pu l’exposer à l’époque d’Evil Aliens, je suis un grand fan de ce jeune homme, dont le talent évident, même quand il marche dans les traces de Shaun of the Dead comme c’est ici le cas, mérite bien plus que l’indifférence du plus grand nombre. Échec critique et public dans son pays d’origine, Doghouse est une illustration supplémentaire de son affection généreuse pour un genre qui le lui rend bien : maîtrisé dans son économie, d’idées et de moyens, rythmé, drôle... du cinéma cadeau pour qui sait apprécier à sa juste valeur la redéfinition explicite de l’expression « finger food ».
Car oui, à la manière de cette infâme « Zombird » fort enrobée qui se délecte des doigts de ses victimes avec moult chantilly, Doghouse est un met délicat qui s’encombre d’un minimum de possibles pour mieux les exploiter. Ainsi, plutôt que de céder à une horde surnuméraire de figurantes cannibales, Jake West s’attache à quelques figures marquantes, chacune dotée d’une apparence et d’une personnalité propres ; au premier rang desquelles on retrouve Emily Booth, figure télévisuelle du fantastique UK déjà à l’affiche d’Evil Aliens, en cousine éloignée de Mindy Clarke, une paire de ciseaux claquant en permanence dans chacune de ses mains. On ne saurait par ailleurs ignorer la demoiselle massive citée en début de paragraphe, prête à se servir de son poids pour décimer nos héros politiquement incorrects.
Son capital sympathie, Doghouse le gagne en retournant contre ses protagonistes les travers très masculins des précédents films de Jake West, délaissant les femmes dénudées pour mieux mettre à mal des hommes mus par la bière et leur libido. Jusqu’à placer les bons copains au service des fantasmes du seul gay de la bande, trop heureux d’avoir trouvé, dans une séance de cross-dressing, une solution pertinente de survie d’un chromosome voyelle menacé... A l’image de ce gag simpliste mais bien amené, couronné d’un splendide « you’ve done this before » au vu du soldat en faction sur place, un peu trop à l’aise en travesti pour être innocent, Doghouse déploie des moments de bravoure simples et efficaces ; et lorsqu’il renverse la vapeur, détournant les discours à la Independance Day au profit d’une remarquable - et vaine, bien entendu - affirmation d’indépendance masculine, on comprend bien que Jake West fait tout ça pour rire, conscient de l’hypocrisie phénoménale de sa démarche pseudo-féministe. Même morte et cannibale, la femme reste son fer de lance cinégénique, qu’elle soit « remote controlled » ou non ! Et la sexualité rampante - potentiellement abjecte même, puisque Neil et ses potes ne peuvent s’empêcher de fantasmer sur ces monstres au féminin - demeure le moteur universel de son cinéma réjouissant.
Doghouse est évidemment disponible en DVD et Blu-ray zone 2 UK, mais il est aussi sorti chez nous chez CTV au cours de l’été 2010.




