Dong
« J’espère aussi que ma peinture restitue quelque chose. La dignité que possède tout être humain ».
Cette confidence du peintre chinois, Liu Xiaodong, son ami Jia Zhang Ke pourrait la faire sienne. Dong est le documentaire que le réalisateur chinois a consacré à ce peintre et où il a puisé l’idée de son dernier long métrage, Still Life. MK2 a décidé de sortir une édition DVD contenant les deux films. Une association bienvenue, le scénario de Still Life a été écrit pendant le tournage de Dong et ils possèdent certaines scènes communes. Fiction/documentaire, la ligne de partage des eaux pour ces deux films est d’ailleurs floue et illustre bien l’approche du réalisateur chinois.
Jia Zhang Ke a suivi son ami peintre Liu Xiaodong, venu exécuter dans la région des Trois Gorges une série de toiles géantes centrées sur les corps de travailleurs. Toujours dans la même thématique, le réalisateur chinois va plus tard l’observer peindre de jeunes thaïlandaises à Bangkok. Dong n’est pas tant un documentaire sur la création de tableaux que sur la démarche artistique du peintre. On l’aperçoit aussi bien pratiquer ou évoquer son art, que s’exercer à un tao de kung fu sous la pluie.
Jia Zhang Ke s’écarte parfois tout à fait de la peinture pour s’intéresser aux personnes rencontrées dans la région, qui sont le sujet des oeuvres de Liu Xiaodong. Dong culmine, pour moi, sur la rencontre entre le peintre et la famille de l’un de ces modèles passés de vie à trépas. La caméra entre dans l’intimé émotionnelle de ces gens de peu touchés par le deuil. Emotion, puis libération par le rire devant les peluches aux couleurs chatoyantes que le peintre offre de la part de ses enfants à ceux du défunt. On découvre avec Jia Zhang Ke, qu’il y a dans cet épisode matière à faire de la fiction. Plus tard en Thaïlande, la caméra suivra une des modèles après sa séance de pose pour l’accompagner jusque chez elle. Et finalement, n’est-ce pas cela le souhait profond du réalisateur ? Mettre sa caméra dans les pas d’une personne quasi-inconnue et en faire surgir une création cinématographique ? Dong montre d’ailleurs l’importance accordée par Jia Zhang Ke au parcours. Rarement dans un film, la caméra aura passé autant de temps dans des moyens de transport aussi variés : ferry, barque à moteur, camionnette, rickshaw...
L’édition DVD contient également un documentaire sur Jia Zhang Ke : « Xiao Jia rentre à la maison ». Le réalisateur Damien Ounouri a suivi le retour du réalisateur chinois dans sa ville natale, Fenyang. Le documentaire s’avère très intéressant, mais aurait gagné à être resserré. Au gré de pérégrinations dans les lieux de tournage de ses premiers films, Jia Zhang Ke évoque ses origines, sa vision de l’évolution de la Chine et du cinéma, tous les deux étroitements liés. Le documentaire est ponctué d’extraits de ces premiers films, mais également d’entretiens avec ses principaux collaborateurs qui évoquent la façon de travailler du réalisateur.


