La Harpe de Birmanie

L’horreur, l’horreur.

La Harpe de Birmanie est un film profondément pacifiste sur l’absurdité de la guerre et les souffrances qu’elle occasionne, vu du point de vue de la religion bouddhiste.

La Seconde Guerre mondiale tire à sa fin pour le Japon. Un groupe de soldats se rend aux troupes britanniques et attend son rapatriement. L’un d’eux, Mizushima, très doué à la harpe dans sa version birmane est chargé de convaincre un groupe de soldats japonais de déposer les armes. Peine perdue et après l’affrontement avec l’armée britannique, Mizushima est porté disparu. Jusqu’à ce que ses anciens camarades croisent un moine birman ressemblant à Mizushima. Mais le mystère reste entier...

Symbolisée par la harpe de Mizushima, la musique, ici, joue un rôle de premier plan. Elle transcende les différences, établissant un pont entre les hommes, même lorsqu’ils ne parlent pas la même langue ou n’appartiennent pas à la même civilisation.

Quelle différence entre la section de Mizushima et celle qu’il tente de convaincre de cesser le combat ! Lors de l’ultime confrontation entre la première et les soldats britanniques, la musique va créer un lien invisible entre ces hommes et permettre d’éviter l’affrontement. Leur décision contraste avec le jusqu’au-boutisme insensé de la seconde.

Lorsque Mizushima réapparaît après la visite d’un moine dans le lieu où a eu lieu ce massacre, le spectateur est alors momentanément saisi d’un doute : est-ce vraiment lui ? Dans ce film fortement imprégné de bouddhisme, Kon Ichikawa met en scène une renaissance. Ses anciens compagnons ne sont pas sûrs que ce moine qui ressemble à Mizushima soit leur ancien camarade car il n’est plus totalement la même personne.

Film pacifiste, La Harpe de Birmanie nous montre les résultats de la guerre dans toute leur horreur. Plusieurs séquences saisissantes montrent des monceaux de cadavres laissés sans sépulture. Le plan des corps sans vie des soldats ayant refusé de déposer les armes dans la grotte fait penser aux œuvres de Gustave Doré dans la maîtrise de l’utilisation des ombres et des lumières. Mizushima semble ouvrir une fenêtre sur l’enfer et comprend qu’il doit rester avec ceux qui ne pourront plus quitter cette terre birmane.

Mizushima et sa section prennent des chemins différents, mais partagent une philosophie commune. Je ne me rappelle pas d’autre film dans lesquels un cinéaste fait autant usage de plans d’un groupe. Les liens qui se tissent entre eux dépassent la simple camaraderie de soldats ayant connu les affres du combat pour se transformer en union sacrée. Ils vont rentrer au Japon pour redresser le pays. A contrario, Mizushima est fréquemment isolé dans un paysage vide : sa quête est personnelle. Sa mission est d’agir pour réduire la souffrance du monde, principe central de la philosophie bouddhique.