In Hell
L’enfer ce n’est pas que les autres...
Kyle Leblanc est un architecte en poste dans une ville au fin fond d’un pays de l’ex-U.R.S.S. Sa femme Grey, esseulée dans leur maison bleue et froide, souhaiterait le voir rentrer plus tôt le soir. Lorsqu’enfin Kyle parvient à se libérer de ses obligations architecturales, c’est pour trouver sa femme à demi nue et gisante dans son sang... elle est morte.
A peine a-t-il le temps de comprendre la situation, qu’un homme lui saute à la gorge. Plein de rage aveugle, Kyle poursuit son assaillant, à travers la moitié de la ville. Mettant à sac pas moins d’un tramway et plusieurs autres véhicules à mains nues, Kyle est menotté et donc stoppé dans son élan vengeur. Par chance, le meurtrier est lui aussi arrêté et traduit en justice. Malheureusement pour Kyle, un pot de vin bien placé permet à l’assassin d’obtenir un formidable non-lieu. Alors, à la sortie du tribunal, Kyle saisit l’arme d’un policier et abat le meurtrier de sa femme. Maintenant jugé pour homicide, Kyle écope de la perpétuité dans une des nombreuses prisons que compte le Kazakhstan. Dorénavant, il erra en enfer à vie.
Pendant la fouille d’intronisation de rigueur, Kyle a toute les peines du monde pour escamoter une photo de sa femme. Ce ne sera d’ailleurs qu’en échange de son alliance que cette dernière lui sera restituée. Cette simple tentative de castration psychologique de la part des gardiens, n’est rien en comparaison de ce qui attend les nouveaux venus. Car dans ce camp de travail, les nuits sont ponctuées d’étoiles, de pleurs, et de cris de détenus roués de coups et violés. Aussi quand Kyle croise le regard d’Andrei le violeur, il croit revoir l’assassin de sa femme et surtout son rictus au sortir de la salle d’audience, et alors, poussé par une colère qu’il ne se soupçonnait pas posséder et encore moins catalyser, il lui saute à la gorge, comme le ferait un gamin se battant pour la toute première fois. Cette singulière altercation lui vaudra sa première isolation aux côtés d’un autre malheureux, ne s’exprimant plus que par gémissements bestiaux.
Au sortir du trou, Kyle se familiarise avec le fonctionnement de la prison. Deux bandes rivales organisent des combats sous couvert des gardiens et surtout du Général en charge de la « bonne marche » de l’établissement pénitentiaire, qui de son côté s’occupe des paris clandestins au coeur de soirées vodka/prostituées. Il apprend également qui est le détenu 451, seul résident de couleur et responsable du meurtre de tous ceux qui partageaient sa cellule... et peut être de celui de Kyle, nouveau copain de chambrée.
De nouveau aux prises avec le sexuellement entreprenant Andrei, Kyle est envoyé en isolement pour une durée plus indéterminée que jamais. Et lors de ce second retour sur soi, Kyle prend la décision de laisser éclater sa fureur, sa colère, sa douleur pour la/les muter en une violence qu’il ne concevait pas...
...mais c’est d’abord la perte de son soi.
Ringo rempile et s’associe avec Jean-Claude pour la 3ème fois. Après un Maximum Risk des plus jouissifs, grâce à l’apport de la perfection faite femme, Natasha Hentsridge, et au très français Jean-Hughes Anglade. Après un duo rigolo Michael Rooker/Van Damme, dans le bon enfant et déjà surprenant Replicant. Place en 2003 à un Jean-Claude barbu, ravagé de douleur, pas si doué en arts martiaux que ça, un peu moins cabotin et plus humain. C’est un Van Damme en proie à de sérieux doutes, face à la perte de sa femme, à la découverte de forces brutales enfouies au plus profond de son être, celles qui vous font oublier les principes moraux pour lesquels vous voulez que l’on se souvienne de vous, après votre mort..
In Hell fait appel au plus bas des instincts dont l’homme est capable de faire preuve : l’instinct animal, celui qui nous fait aimer le goût du sang dans la bouche. A cet instinct s’ajoutera bien vite celui de survie : un mélange des plus détonnants et dont l’instrument est Kyle. Fukasaku avait déjà abordé à maintes reprises dans ses Jingi naki takakai, au travers du personnage incarné par Bunta Sugawara, l’enfer que représente le rejet d’un homme par une société hostile qui se refuse de l’intégrer, de le supporter, de le garder en vie. Bien évidemment Ringo se sert de la microsociété carcérale pour illustrer son argumentation. Ce qui peut paraître plus simple que la prouesse de Kinji (qui lui se servait da la société japonaise en pleine occupation américaine d’après guerre en guise de cellule invisible mais palpable), n’en reste pas moins un tour de force majeur dans les filmographies de Jean-Claude et Ringo.
In Hell est un film brillant au casting de méchants très pointu. Jean Claude n’a sans nul doute jamais été aussi convaincant et ce malgré l’acharnement exemplaire de l’animateur Arthur, trublion à oreillette ô combien pas drôle et à la voix si horripilante qui a fait passer Van Damme pour un abruti en diffusant le plus souvent possible certaines images dont le mot « aware » est le centre d’intérêt. De toute façon, il y aura bien encore 17 millions de téléspectateurs devant la première chaîne nationale le soir de la Saint Sylvestre, alors pourquoi s’en faire. Du moment que le peuple s’amuse, il ne gronde pas. Mais laissons là ces considérations toutes personnelles et terminons cet article...
Une convergence cinématographique peu explorée plane sur In Hell. Lam ainsi que les scénaristes, ont laissé la part belle à la véritable star du film : la Rédemption. Maintes fois abordée sous toutes les formes possibles et inimaginables par une pléiade de réalisateurs. Obtention du pardon pour Fukasaku et son Kenkei tai soshiki, remplir son devoir de père trop absent pour Soderbergh et son The Limey, juste cause et honneur pour Nolan et son Insomnia. Mais personne n’avait penser à ce type de rédemption à plusieurs étages...
Je m’explique. Pour Kyle, de ne pas avoir pu sauver sa femme, de ne pas avoir été assez souvent auprès d’elle, les rares moments passés en sa compagnie qui lui paraissent dérisoire en comparaison du temps passé sur les chantiers, tout cela le ronge. Ah le remord de ne pas dire assez souvent à son entourage, sa famille, l’être magnifique qui partage votre vie... qu’on l’aime tout simplement. Le remord est un état d’esprit assez puissant pour rendre aveugle et sourd à tous conseils. D’ailleurs, Kyle conservera la photo de sa femme durant toute son incarcération, et ce malgré sa mutation en bête. Il la conservera auprès de lui mais ne sera plus à même de la distinguer ; il lui faudra un événement déclencheur (que je vous laisse découvrir) pour redevenir humain et c’est cette photographie, symbole de sa vie passée et heureuse, qui l’épaulera.
Ah au fait après le sympathique The Quest (mais parfaitement !!) on attend avec impatience l’aboutissement de Kumite, sa prochaine réalisation (tournage courant 2005 et sortie prévue en 2006).
Une édition DVD Metropolitan Film existe en zone 2. Au programme, du 5.1 en VF et VO et même une piste supplémentaire française en DTS pour les riches et équipés. Des sous-titres français. Suppléments : des bandes annonces de la plupart des films de J.C, filmographies de J.C et Ringo, un making of d’une quinzaine de minutes et pour finir 40 minutes d’interviews diverses (chef opérateur, producteur et réalisateur). Un très beau pressage pour un film aux teintes sombres.
En zone 1, DVD édité par Columbia. Disponible en plein cadre et au format original (1.85). Ce DVD comprend des sous-titres uniquement français. La piste V.O est en 5.1 et complétée par trois autres pistes en stéréo (anglais, français, espagnol). Une petite featurette rend l’acquisition de ce DVD guère intéressante.
D’autres éditions existent un peu partout en Europe.



