Jeepers Creepers 2
"Every 23rd spring, for 23 days, it gets to eat."
Quelques jours après les évènements tragiques vécus par Trish et Darry Jenner, nous voici de nouveau plongés au cœur du printemps de choix du Creeper. Tous les 23 ans pendant 23 jours, la redoutable et perverse créature sort de son hibernation le temps de se nourrir. Au milieu d’une campagne superbement photographiée, aux couleurs paradoxalement automnales, le jeune Billy Taggart s’apprête à faire les frais du vingt-deuxième jour de cette faste période. Attelé à l’installation de nouveaux épouvantails sur le terrain familial, l’enfant est persuadé de voir l’une des effigies de paille tourner la tête - une réminiscence certaine du "That’s not my scarecrow..." du premier opus. Sous les yeux impuissants de son grand frère et de son père, Billy est enlevé par le Creeper.
Jour 23. Le car scolaire qui ramène une équipe de basket, ses trois cheerleaders et autres coachs à domicile, est victime d’une étrange attaque : quelqu’un a volontairement lancé un projectile fait d’ossements dans l’un des pneus de leur véhicule. Parvenant tout de même à se remettre en route, le bus est victime d’une seconde agression, qui l’immobilise définitivement sur l’une de ses jantes. Le Creeper fait rapidement son apparition, emportant ses victimes une par une dans le ciel...
Il était évident que l’excellent Jeepers Creepers de Victor Salva, comme tout "sleeper" qui se respecte, ne pouvait rester sans suite. Et ce d’autant plus qu’il nous avait présenté une créature fascinante en la personne du Creeper, laissant volontairement planer le flou autour de ses origines et possibilités.
Si le premier opus puisait sa force de la découverte de cette effrayante créature, qui lui permettait de jouer le jeu d’une trame évolutive, sans véritable objectif, course-poursuite protéiforme, le second doit bien sûr prendre en compte notre connaissance (même partielle) du Creeper. Ceci impose donc à Salva de trouver de nouveaux mécanismes pour surprendre le spectateur.
Après une superbe séquence d’introduction, qui donne le ton en matière de réalisation et de montage (la première est splendide, réussissant l’exploit d’être parfaitement gothique en plein jour ; le second est superbement rythmé), Jeepers Creepers 2 s’éloigne donc de son illustre grand frère... pour s’engager sur la pente glissante du slasher claustrophobe. Un drôle de choix à première vue, Jeepers Creepers premier du nom étant intéressant notamment parce qu’il trouvait ses origines en amont de la vague de films de teenagers des nineties...
On se rend compte alors que Salva souhaite s’intéresser à autre chose : la capacité d’un groupe d’adolescents à s’autodétruire par le biais de préjugés, de racisme, d’homophobie - et plus largement, de la peur. Ainsi le supposé héros du film s’impose-t-il rapidement comme étant un être détestable, et laisse donc le devant de la scène à un autre personnage - et ainsi de suite. Avec pour seule constante : la présence menaçante du Creeper, qui tente par tous les moyens de s’introduire dans le bus, après avoir soigneusement enfermé ses proies à l’intérieur.
A une exception près (la blondinette qui souffre de visions de Darry et Billy, la mettant en garde contre le démon), le Creeper est le seul personnage du film à être honnête. Physiquement changeant certes (ses séquences de transformations, mêlant effets mécaniques et numériques, sont toujours aussi recherchées et réussies), mais "mentalement" constant, simplement obnubilé par une faim équitable et magnanime. Il est aussi le seul véritable intérêt de cette (trop) longue séquence groupée, qui éloigne Salva de la force, rurale et gothique, du premier opus. Lorsque le film s’écarte du bus immobilisé, le réalisateur explore une nouvelle voie, courte mais intéressante : un croisement très second degré du film d’action et du film d’horreur. Plus de discours social ici, mais une identité de film bis (très Tremors) qui aurait mérité un peu plus de place.
Jeepers Creepers 2 est donc bien moins réussi que la première aventure du Creeper. Salva échoue partiellement à retrouver la force acharnée du premier film, trop désireux d’offrir une sous-couche sociale et personnelle à son œuvre. Reste tout de même une réalisation à toute épreuve (le jet de l’ "étoile d’os" dans le pneu !!!), et surtout le Creeper, figure ambiguë et obscène parfaitement adaptée au bestiaire fantastique de ces débuts de millénaire.
Date de sortie en salles en France : le 4 février 2004.
Jeeper Creepers 2 est par ailleurs disponible en DVD Zone 1 NTSC (USA) et Zone 2 PAL (UK).

