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Japon

Kanto Wanderer

aka Kanto Mushuku - The Woman Sharper - Les Vagabonds de Kanto | Japon | 1963 | Un film de Seijun Suzuki | Avec Akira Kobayashi, Chieko Matsubara, Hiroko Ito

Une bonne occasion que la diffusion de Pistol Opera au cours de la dixième édition de l’Etrange Festival pour revenir sur les films de Seijun Suzuki...
Réalisé la même année que le célèbre Yaju no Seishun (La Jeunesse de le bête), ce Kanto Wanderer est une variante subtile du film de yakuza traditionnel.

Katsuta (Akira Kobayashi - Black Tight Killers), un membre rebelle du gang Izu-gami, tente de vivre sa vie dans le respect du code des yakuza - a tel point d’ailleurs que même son boss finit par le regarder avec dédain, le considérant comme étant trop sérieux. Diamond Fuyu - qui fait quant à lui partie du gang Toshida-gumi, est loin d’être aussi propre sur lui - y compris dans ses sentiments pour une jeune écolière, Hanako. Malheureusement pour lui, la jeune femme est liée au gang Izu-gami.
La perte de leur dernière maison de jeu est une mauvaise nouvelle pour les Izu. Katsuto se rend donc chez Fuyu dans le but de parvenir à un accord avec les Toshida. Sur place, ce n’est pas le gangster qu’il trouve néanmoins, mais sa soeur Tatsuko. La jeune femme - tricheuse émérite au jeu - est l’ancienne amante de notre héros, les sentiments duquel sont loin d’être éteints. Mais Tatsuko est désormais mariée à un certain Okaru-Hachi, un homme plus âgé lui aussi enclin à la tricherie...

Du choix difficile à effectuer entre l’amour et la loyauté... Ce Kanto Wanderer de 1963 est un film de yakuza assez lent, à la trame complexe, qui privilégie les ambiances et les attitudes aux actions - choix judicieux puisque le film se propose de suivre le cheminement moral de Katsuta, qui sera amené à choisir entre "les vêtements blanc" (l’habit des prisonniers) et les "vêtements rouges" (la couleur des hommes honorables).
Mais si Kanto Wanderer mérite d’être vu par tous les fans des films du réalisateur, c’est avant tout pour son travail incroyable sur l’image et la réalisation.

Seijun Suzuki est en effet un réalisateur qui a toujours privilégié l’esthétique à la narration - c’est d’ailleurs ce qui lui vaudra d’être renvoyé de la Nikkatsu en 1967 après Branded to Kill, sous prétexte qu’il tournait des films incompréhensibles. D’un autre côté, ce sont sans aucun doute les conditions de travail imposées par le studio qui ont amené Suzuki a développé un cinéma principalement visuel, souvent qualifié de "pop avant l’heure". Une contrainte qui aboutit sur des trésors visuels...

Car Kanto Wanderer est un véritable festin pour les yeux. Les couleurs et les éclairages sont travaillés à un degré qui est aujourd’hui rarement atteint - y compris dans un pays aussi "esthétique" que le Japon. L’exemple le plus merveilleux de ce travail est la scène au cours de laquelle Katsuta se remémore, face à la belle Tatsuko, l’évènement qui a marqué à vie sa joue gauche d’une longue cicatrice. Au terme du flash-back, Katsuta plonge ses yeux dans ceux de son ancienne amante. Au cours d’un même plan, l’éclairage est modifié trois fois : le bleu et le rouge environnants (toujours mélangés de façon surprenante) laissent d’abord la place à l’obscurité, puis nos deux héros se retrouvent seuls éclairés - le décor autour d’eux ayant complètement disparu. Ce choix stylistique - doublé d’une certaine prouesse technique - sert à Suzuki pour appuyer visuellement les transitions émotionnelles des personnages. Il y recourt d’ailleurs de nombreuses fois au cours du film, notamment dans l’une des dernières rencontres entre les deux amants.

Au cours de l’une des seules scènes d’action du film, Suzuki annonce très clairement le final d’un autre de ses chefs-d’oeuvre, La Vie d’un tatoué. Le combat au sabre qui oppose Katsuta à deux autres gangsters renvoie directement à celui qui cloture le film que Suzuki tournera en 1965 : même utilisation d’un cadre fixe, même destruction des murs de papier, même emploi de la couleur rouge qui, ici, inonde littéralement la pièce / l’écran. A partir de cet instant, le film enchaîne d’ailleurs les merveilles de réalisation (la marche sous la neige, la colère de Katsuta entièrement teintée de bleu).
Seijun Suzuki parvient donc - une fois de plus - sans difficulté à s’approprier un film sur lequel il n’avait au départ aucun contrôle... et ce n’est pas nos mirettes ébahies qui vont s’en plaindre !

Kanto Wanderer est uniquement disponible en DVD japonais (DVN-44), sans sous-titres.

- Article paru le mardi 27 août 2002

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