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Hors-Asie

Kaojikara

France | 2007 | Un film d’Eric Dinkian | Avec Karin Shibata, Xavier Legrand, Alexandre Leycuras, Françoise Durand, Thomas Baudeau, Daravith Chan Fah, Monirith Chan Fah

Une jeune japonaise, qui a décidé de venir vivre en France en dépit du désaccord de ses parents, se fait agresser par son petit ami dont le visage est devenu flou. Elle s’enfuit et se rend compte que, tout autour d’elle, les gens sont victimes du même anonymat effrayant, qu’elle est la seule à être restée la même, et donc autre...

Kaojikara est le premier court-métrage d’Eric Dinkian, confrère de DeVilDead et feu Mad Asia, aboutissement de trois ans de travail dans l’indépendance la plus complète. Métaphore graphico-sonore sur le thème de l’identité, Kaojikara est, en dépit de sa courte durée, un film réfléchi et abouti, techniquement remarquable. Si l’on en croit les propos du réalisateur – et quelle raison aurions-nous de ne pas le faire ? -, le terme Kaojikara « désigne une personne au visage si particulier qu’il provoque une forte sensation physique à celui qui le contemple ». Cette sensation, qui peut dès lors être d’attirance et/ou de répulsion, est au cœur de l’expérience Kaojikara.

Lorsque l’héroïne du film se réveille pour découvrir le visage, flou et mouvant, de l’homme qui partage sa vie, sa première réaction est bien évidemment la peur, le dégoût. Pour le spectateur, il s’agit plus d’une étrangeté ; notion qui pourrait revenir aussi bien à l’étrange qu’à l’étranger. C’est de cette dualité qu’il est ici question : en admettant que les visages qui l’entourent lui sont étrangers, c’est sa propre différence qu’admet l’exilée. En jouant sur le fait que l’étranger puisse être étrange, Dinkian instaure une métaphore visuelle et sonore à même de s’inscrire – et c’est certainement conscient au vu de l’importance du paysage urbain dans ce parcours identitaire - dans la filiation de l’œuvre de Tsukamoto. Chaque mouvement de caméra, chaque effet sonore, est pensé pour faire de la narration un flot physique, le langage des vibrations, des grésillements et des tressautements remplaçant avantageusement celui des mots pour transmettre l’émotion et souligner, dans sa nature et ses effets, la différence. Celle-là même qui n’existe, au quotidien, que dans le regard de l’autre, ici incarné dans celui de l’héroïne.

Le fait que Kaojikara ait été tourné en japonais, avec une actrice japonaise, n’est pas étranger à notre intérêt pour ce court-métrage. Il souligne de plus la fascination que le visage japonais, plusieurs fois incarné dans le film – celui de l’actrice certes, mais aussi à tous les niveaux de la décoration de son appartement – exerce non seulement sur le réalisateur mais sur nous même, passionnés d’Orient. Dans cette singularité, qui est aussi l’affirmation d’une différence cinématographique volontaire, Kaojikara termine donc d’assurer sa remarquable cohérence.

Kaojikara est visible en ligne, avec sous-titre anglais ou français au choix, sur le site officiel du projet (www.kaojikara.com). Il est par ailleurs disponible sur l’édition DVD française du Nightmare Detective de Tsukamoto.

- Article paru le lundi 29 septembre 2008

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