Kodoku Meatball Machine
Joie, bonheur, festivités retenues : Yoji (Yôji Tanaka) se réveille et constate sans le moindre entrain matinal qu’il célèbre ses cinquante ans. Seul, incapable de collecter les dettes dont il a la charge pour un patron humiliant, pas plus à même de déclarer sa flamme à la belle Kaoru (Yurisa) qui travaille dans une librairie d’occasion, et traversé de douleurs abdominales... L’ascension inversée de Yoji sur l’échelle de l’accomplissement personnel culmine dans la découverte de son cancer, et le déclenchement du compte à rebours de ses derniers mois à vivre. Alors que le ressentiment gronde, il ne cesse de croiser le chemin d’Eihi Shiina, appliquée à tracer un insolite marquage routier dans tout Tokyo en chantonnant, pendant qu’un globe de verre lancé à travers l’espace se rapproche de la Terre. Lorsque celui-ci termine sa trajectoire et vient placer la zone délimitée par Eihi Shiina « sous le dôme », des Necroborgs attaquent les isolés et les transforment en armes grotesques. Le cancer de Yoji, plus fort que les parasites, va lui donner un avantage sur l’envahisseur, ainsi que la force de protéger Kaoru...
C’est en 2012 que la déferlante Sushi Typhoon, créée seulement deux ans auparavant, s’arrête aussi violemment qu’elle s’en est arrivée, et que s’étiole le joyeux splatter avec lequel Yoshihiro Nishimura et ses amis nous ont abondamment éclaboussé le temps de quelques perles dégénérées (The Machine Girl, Tokyo Gore Police, Helldriver, Zombie Ass : Toilet of the Dead et j’en passe). Il faut attendre 2017 pour que Nishimura renoue avec l’univers de Meatball Machine, l’un des précurseurs du genre, entre le gore et le cyberpunk, sur lequel il avait assis sa réputation de spécialiste des effets spéciaux et du maquillage barré, et retrouve son stock d’hémoglobine et de membres sectionnés pour lui livrer une suite des plus réjouissantes : Kodoku Meatball Machine.
Bien plus restreint en ambition que le ras-la-gueule Helldriver, Kodoku Meatball Machine est un film au dimensionnement heureux, porté par la cohérence même de son concept d’isolement : en se restreignant à une portion congrue de la capitale japonaise, Nishimura concentre son film sur un nombre adéquat de protagonistes, qu’il fait passer de l’introduction enjouée (véritable film dans le film, exceptionnelle) au cœur sanguinolent du film avec brio : un quatuor de justiciers, des hôtesses malhonnêtes, un stalker motorisé de Kaoru... toutes les figures présentes dans la mise en place de la chute du quinqua incarné avec une conviction bluffante par Yôji Tanaka, sont transportées dans le délire quasi-tokusatsu au cœur du film, qui opposent entre elles toutes les mutations grand-guignolesques des Necroborgs.
Comme ses prédécesseurs, Kodoku Meatball Machine est un joyeux bordel baigné de sang et d’idées saugrenues, écrin fantastique à la folie visuelle et au savoir-faire en matière d’effets de plateau de Nishimura. On repassera pour le rendu des effets numériques – Nishimura ne faisant même pas semblant de faire un effort... Mais qu’importe, quelle joie que ce rodéo seins-nus de Kaoru, le soutien-gorge en guise de bride, sur un prétendant transformé en homme moto, assemblage de mécanique et de barbaque ! Le film est mené tambour-battant jusqu’à sa conclusion hilarante, dans laquelle on pourrait déceler un clin d’œil au moteur narratif de l’immortel Bad Taste de Peter « je me suis perdu dans la 4K HDR à la gloire de Tolkien » Jackson. C’est n’imp, c’est assumé de bout en bout avec une maitrise narrative remarquable, et c’est bon !
Kodoku Meatball Machine est disponible en Blu-ray + DVD en mediabook avec trois couvertures au choix chez les Allemands de Midori-Impuls, malheureusement dépourvus de sous-titres anglais. Il est aussi disponible en Blu-ray, avec sous-titres anglais, aux USA.




