La Banda del Gobbo
Due Milian per il prezzo di uno !
Fraîchement débarqué de Corse où il vivotait de petits trafics, Vincenzo Marazzi, alias "le bossu" ("il gobbo"), décide de monter un coup avec trois associés. Si son plan est simple et permet un hold-up a priori sans violence, Perrone, "la sole" et "l’albanais" ne l’entendent pas vraiment de cette oreille ; craignant d’être repérés en raison de la particularité physique de Marazzi, ils décident tout bonnement de se débarrasser de lui une fois leur larcin commis. Mais, la confusion du moment aidant, "le bossu" s’enfuit par une bouche d’égouts... Bien décidé à se venger coûte que coûte, Marazzi, aidé de son frère jumeau Francesco, alias "Monnezza" ("Poubelle" en français), entreprend alors une expédition punitive à travers la capitale italienne...
Umberto Lenzi, réalisateur transalpin connu à travers le monde pour quelques délicieux méfaits cinématographiques du type Mangiati Vivi, L’Avion de l’Apocalypse ou encore Cannibal Ferox, fût l’un des plus dignes représentants du poliziotteschi ; Genre trop souvent éclipsé par son aîné le giallo, le polar italien urbain, infiniment violent et politique, né au tout début des 70’s, est pourtant l’un des courants les plus importants que le cinéma européen ait connu à ce jour. Né dans le climat ultra-violent d’une Italie corrompue dirigée par la mafia, la contrebande et le terrorisme, le poliziotteschi, "successeur" quasi-naturel du western spaghetti (j’en veux pour preuve un film comme l’excellent Città Violenta de Sergio Solima), frappe par sa brutalité, son nihilisme et son aspect hautement contestataire. Ses héros, des flics très souvent borderline, choisissent eux-mêmes la justice qu’ils appliqueront, quitte à outrepasser leurs droits...
La Banda del Gobbo fait donc partie de la vague de poliziotteschi de la seconde moitié des 70’s, réalisé par l’un des maîtres du Genre, pour ne pas dire "le" réalisateur qui lui donna ses lettres de noblesse. Si les ingrédients caractéristiques du Genre sont bel et bien présents, Lenzi, par le biais de son interprète principal, y insère également de l’humour ; Tomas Milian, le plus grand acteur de l’univers, signe ici une performance magistrale, en y jouant les rôles des deux frères Marazzi, tout en co-signant les dialogues du film avec le metteur en scène (les dialogues du "bossu" et de "Monnezza" sont quant à eux signés à 100% par l’acteur). Dès le premier coup d’œil, La Banda del Gobbo a tout du parfait show Milian ; l’acteur né à Cuba en 1933, alors au top de sa popularité transalpine, multiplie les rôles dans les productions italiennes sans la moindre vergogne ; arrivé en Italie en 1959, il y débute sa carrière de comédien dans un cinéma d’auteur -plus particulièrement dans le film La Notte Brava de Mauro Bolognini-, pendant environ sept ans. Puis dès 1966, commence alors pour lui sa carrière au sein du western spaghetti notamment dans l’excellent La Resa dei Conti de Sergio Sollima. Jusqu’à l’extinction du Genre à la fin de la première moitié des années 70, Milian devient un héros populaire en jouant dans de nombreux westerns politiques (ou politisés) tels Tepepa ou l’exceptionnel ¡Vamos a Matar, Compañeros !... C’est en 1974 que va débuter l’ "ère Monnezza", grâce au poliziotteschi, polar d’exploit’ très ancré dans son époque, qui sur une période de dix années va faire de Milian l’un des acteurs les plus appréciés du grand public transalpin...
...Milian, qui signe ici sa sixième et ultime collaboration avec Umberto Lenzi, est donc au sommet de son art, entre mégalomanie paroxysmique et génie pur. Oscillant entre comique et tragique, la double prestation de Milian est tout bonnement fantastique ; de la séquence d’interrogatoire où "Monnezza" pense se trouver face à Jesus en étant questionné par le diable, aux phases vaudevillesques de l’hôpital psychiatrique, en passant par les moments touchants, voire troublants, où "le bossu" est seul face à son image, face à lui-même et à sa différence... La Banda del Gobbo reprend bon nombre d’ingrédients de précédents poliziotteschi réalisés par Lenzi, de Roma a Mano Armata dont il est une suite plus ou moins avouée, à Il Trucido e lo Sbirro dans lequel Milian apparut pour le première fois sous les traits de "Monnezza".
Mais La Banda del Gobbo marque également le clash entre les deux hommes, le comédien ayant obtenu de manière plus ou moins discutable le final cut sur ses rôles. Lenzi quant à lui, culmine dans le Genre en insufflant toute sa fougue à sa mise en scène. En revanche une chose demeure claire comme de l’eau de roche entre les deux hommes, et malgré les dissensions qui les opposent le message du film, porté par une sorte de violence mêlée à une maîtrise artistique incontestable, saura trouver un écho auprès du public italien, et plus particulièrement romain, grâce à son caractère très largement social...
Vincenzo et Francesco, alias "le bossu" et "Monnezza", sont originaires des faubourgs de Rome ; en marge de la société qui ne les accepte pas, tous deux résignés par leur condition peu appréciable, sans le moindre rêve et incapables de s’imaginer un futur radieux... Vincenzo sombre dans la délinquance et la violence, tandis que Francesco tente de vivre en lavant des voitures dans une sorte de garage à la périphérie de la capitale. Paumés, mis au rebut par la société, ces deux marginaux renferment en eux les stigmates d’une grande partie de la population italienne qui se sent abandonnée par les politiques et autres décideurs...
Poliziotteschi typique de la seconde moitié des années 70, La Banda del Gobbo va pourtant plus loin que le simple film de Genre, Lenzi et Milian y insufflant un véritable message social et virulent à l’encontre de la société et du pouvoir en place ; ode à la rébellion drôle et tragique, cet ultime baroud pamphlétaire d’un incroyable tandem auto-annihilé pour des questions d’ego, est sans conteste l’un des plus grands films du Genre, un chef-d’œuvre sans la moindre concession... pourtant on ne peut plus humain.
DVD (Italie) | Federal Video | Pal - All Zone | Format : 1:2:35 - 16/9 | Images : Un magnifique pressage aux couleurs vives, même si le master n’est pas exempt de défauts. | Son : Excellent Mono. | Suppléments : Biographies du réalisateur et des acteurs du film.
Ce DVD contient des sous-titres italiens -pour sourds et malentendants- optionnels.
Le site de référence en matière de poliziotteschi : http://www.pollanetsquad.it/






