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Japon

La mère

aka おかあさん, Okaasan | Japon | 1952 | Un film de Mikio Naruse | avec Kinuyo Tanaka, Kiyoko Kagawa, Eiji Okada, Masao Mishima, Daisuke Kato, Chieko Nakakita,Eiko Miyoshi, Yōnosuke Toba et Atsuko Ichinomiya

Dans le Japon en reconstruction d’après-guerre, la famille Fukuhara tire le diable par la queue. Le fils est tombé malade après avoir respiré des poussières dans une boutique de velours et si le père, surnommé Popeye en raison de sa force physique, a pu remonter sa blanchisserie perdue pendant la guerre, il y a consacré ses dernières forces. Pilier de la famille, la mère ne se résigne jamais, recueillant son neveu pour que sa sœur puisse se former, reprenant la suite de son mari à la blanchisserie… Elle est prête à tous les sacrifices pour le bonheur de ses proches, même s’il se fait au détriment du sien.

En ce début des années 50, Mikio Naruse connaît une période de renaissance après un après-guerre difficile. Le cinéaste fascine par sa capacité à explorer de façon systématique un microcosme, ici une famille assaillie par les malheurs. Par petites touches, sans nous inonder de bons sentiments, il en dresse le portrait tout en l’enracinant dans le quartier populaire où elle habite.

Le Japon présenté ici et que l’on retrouve souvent chez Mikio Naruse est celui des gens de peu. La famille habite dans un quartier où les maisons font aussi office de magasin, où les rues sont encore en terre battue, et qui sont animés par des fêtes populaires et le passage de saltimbanques.

Mélodrame, La mère contient des scènes très émouvantes, mais elles ne submergent pas le film. Regardant ses enfants endormis, mais aussi son mari – alors très malade – seul moment de la journée où la mère Masako peut se laisser aller, elle se laisse envahir par l’émotion. De peur de les réveiller, elle sort dans la rue pour pleurer où elle est filmée en plan moyen. La scène est magnifique.

Les évènements dramatiques font partie du quotidien de cette famille et Mikio Naruse ne les surligne pas. Le décès du fils aîné est ainsi escamoté par une audacieuse ellipse. Le metteur en scène réalise avec beaucoup de délicatesse un mélodrame où l’humour occupe, au même titre que le drame, toute sa place dans le quotidien de la famille Fukuhara.

La mère est un film sur la difficulté à reprendre une vie normale dans le Japon d’après-guerre, qui en porte les stigmates : fils ou mari tués pendant le conflit dans chaque famille, affaiblissement physique provoqué par les privations…

A cette époque de sa carrière, les héroïnes de Mikio Naruse sont confrontées un monde où les règles ont été faites pour et par les hommes, qui sont souvent absents car mort à la guerre. Même sur son lit de mort, le mari de Masako refuse ainsi obstinément de suivre son conseil d’aller à l’hôpital.

Si Masako est au centre du film, en tant que pilier de la famille, sa fille aînée, Toshiko, occupe également une place importante en étant sa narratrice. Tandis que sa mère fait face à des épreuves à répétition, Toshiko apporte en contrepoint un point de vue sensible. Dans la difficulté du présent se laisse entrevoir un avenir meilleur.

Elle présente en voix off sa famille en entame du film. Dans un très bel exemple de son sens du découpage, Naruse nous conduit en train dans ce quartier, dans la rue, puis la maison, où au gré des pièces, Toshiko nous présente ses habitants. Il joue habilement, comme tout au long du film, de la profondeur de champ permise par les grands panneaux coulissant des intérieurs de maisons japonaises.

La mère est sorti sur les écrans français le 9 juin grâce au distributeur Les Acacias.

- Article paru le vendredi 11 juin 2021

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