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Chine | La Chine à Chaillot en 100 films

Le petit jouet

aka Parts from Little Playthings - Small Toys - Xiao wanyi | Chine | 1933 | Un film de Sun Yu | Avec Ruan Lingyu, Yuan Congmei, Li Lili, Luo Peng, Han Langen

Quand la Chine s’éveillera ?

Deux bijoux ornent le générique du Petit jouet, l’actrice fétiche de Sun Yu, Li Lili, mais également "la divine" Ruan Lingyu. Li Lili endosse le rôle que lui attribue fréquemment le réalisateur, celui de la jeune fille éclatante de vie et de sensualité, alors que celui de Ruan Lingyu est plus en nuances.

Le petit jouet retrace le destin d’une femme Ye (Ruan Lingyu) et de ses proches entre 1921 et le début des années 30, de la vie à la campagne aux taudis de Shanghai. Au gré des soubresauts de l’histoire de la Chine : les combats entre les seigneurs de la guerre, l’exode rural, l’invasion japonaise, le bombardement de Shanghai... Ye voit le vide se créer autour d’elle et ses espoirs s’envoler.

Sun Yu file tout au long du film la métaphore du retard de la Chine par rapport aux pays occidentaux et au Japon. Malgré le génie de Ye pour inventer et fabriquer artisanalement des jouets, ces derniers ne peuvent rivaliser avec les productions bon marché provenant des usines occidentales (une inversion de perspectives paradoxale pour le spectateur actuel, qui côtoie le "Made in China" à longueur de rayonnages). De même, les moyens militaires de l’empire du milieu sont des jouets par rapport à ceux déployés par l’armée du Mikado. Une métaphore qu’il illustre par des surimpressions d’images, un procédé que le réalisateur utilise régulièrement dans ses films. Ainsi, la vision des jouets fabriqués par Ye est remplacée par celle du champ de bataille.

La première partie du film est la plus réussie. Sun Yu y fait montre d’une des grandes qualités de son cinéma : l’énergie qui se dégage de certaines séquences. Comme souvent le réalisateur livre une vision idéalisée de la vie à la campagne, qui s’oppose aux difficultés rencontrées en ville. La maison de village où Ye fabrique ses jouets est une véritable caverne d’Ali Baba pour têtes blondes, très bien mise en valeur par la photographie du film.

La campagne représente un cadre social idyllique et l’image de la vie collective. Si on parle souvent, et à juste titre, des héroïnes du réalisateur shanghaien, la troupe d’acteurs, dont il utilise film après film le talent, est trop souvent oubliée. Pourtant, ce film est tout autant celui de Ye que de la petite communauté qui l’entoure.

La deuxième partie, lorsque le film bascule dans le drame, est plus difficile à avaler pour le spectateur actuel car le "message" nationaliste devient plus prégnant. Ne doutons pourtant pas que les épisodes évoqués par Sun Yu avaient une autre résonance pour le spectateur de l’époque. En effet, en janvier 1932, les japonais inaugurent avec Shanghai une sinistre pratique, celle du bombardement des civils dans les villes... Un bombardement qui détruira d’ailleurs une partie des studios de cinéma. Alors que la scène où certains personnages du film aident à la logistique des troupes chinoises, pour finalement participer aux combats fait référence à la résistance surprise de la dix-neuvième armée lors de la défense de Shanghai. Un exploit qui sera immortalisé par un documentaire, Comment la dix-neuvième armée combattit les japonais.

Lors de la scène finale, le personnage interprété par Ruan Lingyu semble interpeller les spectateurs : N’avons-nous pas déjà assez souffert ? Va-t-on encore répéter les mêmes erreurs ?

Diffusé à la Cinémathèque Française (Paris) dans le cadre de la rétrospective "La Chine à Chaillot en 100 films".

- Article paru le mercredi 11 février 2004

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