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Manhunt

aka Rovdyr – Backwoods | Norvège | 2008 | Un film de Patrik Syversen | Avec Henriette Brusgaard, Lasse Valdal, Jørn-Bjørn Fuller-Gee, Ninni Bull T. Robsahm

Cela fait quelques années déjà, que la Norvège s’impose sur les écrans du monde entier comme l’un des nouveaux viviers du cinéma d’horreur. Pendant que les américains se perdent en d’incessants remakes, la chambre noire de l’Europe joue de la richesse de ses paysages, propres à la définition de sa propre menace redneck, pour revenir aux sources des différents sous-genres horrifiques qui s’en nourrissent. Si Cold Prey constituait ainsi l’un des plus remarquables slasher contemporains, Manhunt, premier film de Patrik Syversen, s’inscrit au panthéon des survival les plus purs et séminaux de l’histoire de la violence dégénérée.

Au volant du van qui les conduit dans une parenthèse forestière, le très désagréable Roger, petit ami de Camilla, exaspère Jørgen et Mia, frère et sœur. C’est en s’arrêtant dans une station service, pour faire le plein et se restaurer, que nos héros se frottent pour la première fois à l’animosité des autochtones, qui voient d’un mauvais œil ces citadins en goguette. Camilla fait une désagréable rencontre aux WC, griffée par un ivrogne vissé sur le trône, et Roger manque de jouer des mains avec d’insultants convives. Lorsque le groupe se remet en route, il est abordé par une jeune autostoppeuse désorientée, qu’ils emmènent avec eux en dépit du désaccord de Mia. Sur la route, le van est dépassé par un quatre-quatre ; lorsqu’elle voit le véhicule, la jeune femme panique, demande à descendre immédiatement, encourage son escorte à prendre la fuite. Avant même qu’ils aient pu réagir, l’autostoppeuse est abattue d’un coup de fusil en pleine poitrine, et nos héros sont agressés par trois hommes, muets et armés. Seule libre de ses mouvements, Mia se fait dessouder la cheville d’un autre coup de feu, avant d’être achevée à l’arme blanche. Black out.

Dans une affirmation évidente de ses intentions cinématographiques, Syversen situe l’action de son jeu de massacre en 1974, année de production de Massacre à la tronçonneuse. Pas de roadkill en plein écran, certes, et la densité de la végétation norvégienne se substitue à l’aridité du sud des Etats-Unis, mais les emprunts au chef-d’œuvre de Tobe Hooper sont évidents en début de métrage. Son quatuor protagoniste à tendance hippie – ce ne sont pas les couettes de la délicieuse Henriette Brusgaard qui me contrediront -, comme son équivalent Texan à cinq pétales, amorce sa descente en enfer à bord d’un van, au sein duquel Syversen construit une dynamique similaire à celle du groupe mené par Sally Hardesty : une tension adolescente initiale, un souffre douleur en la personne de Jørgen, dont la nature de geek est le penchant culturel du handicap physique de Franklin, l’arrivée de la violence par un vecteur extérieur en auto-stop... Le réalisateur excelle d’emblée au jeu de la variation sur le même thème, crée familiarités et différences par le truchement de références.

Manhunt toutefois, affirme très vite une personnalité propre, dans le silence de sa menace – autrement plus prégnante que celle, tout aussi forestière mais à mon sens très surestimée, des Proies de Gonzalo Lopez-Gallego –, qui renforce la sécheresse de ses exécutions autant qu’elle dénude cette chasse à l’homme de la moindre explication. Syversen du coup, peut se concentrer sur l’essentiel : la perversité des chasseurs, la douleur de Camilla, son passage de victime à bourreau... Avec une efficacité redoutable et une grande variété dans ses déclinaisons de la persécution et de la torture gratuite, jamais accentuées par une image à la froideur remarquable, Syversen ne se regarde pas le nombril et nous plonge dans la violence la plus pure qui soit : celle pratiquée par jeu, par simple plaisir, sans un mot ni raison ou motif. Le comportement est une donnée absente de Manhunt, dans lequel tous les rapports sociaux s’effacent au profit d’un rapport brut, d’actions et réactions, à la brutalité meurtrière : le désir de survie, qui définit explicitement le genre transcendé par ce premier film. Graphiquement et nerveusement détestable, inhumain au point de refuser longtemps de donner visage à ses agresseurs, nihiliste et condamnatoire, Manhunt est une œuvre courte et simple, qui ne s’embarrasse ni d’effets ni de discours, ne se justifie jamais et s’excuse encore moins. En un mot : une merveille.

Manhunt est disponible en DVD et Blu-ray chez Studio Canal, dans une copie scope qui lui fait en tout point honneur.

- Article paru le mercredi 23 septembre 2009

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