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aka The Stranger from Afar | Japon | 2004 | Un film de Takashi Shimizu | Avec Shinya Tsukamoto, Tomomi Miyashita, Kazuhiro Nakahara, Miho Ninagawa

Takashi Shimizu s’est fait un nom grâce aux quatre films de la série Ju-on, ainsi qu’au remake imminent américain qu’il a lui-même réalisé. Suite à la série Eros Bancho, Euro Space a lancé une autre série intitulée Horror Bancho qui est constituée de quatre films d’horreur en DV. Les films seront sur les écrans nippons en octobre.
Takashi Shimizu a été chargé de réaliser l’un de ces films. Intitulé The Stranger from Afar (présenté à la biennale de Venise cette année), il s’agit d’un film assez déconcertant qui se repose beaucoup sur son acteur principal, Shunya Tsukamoto.

The Stranger from Afar, pour être franc, commence plutôt mal. Avec son aspect de faux film amateur, un son à la Ring et le thème de la TV, on est en droit de craindre le pire. Encore un des ces films d’horreur japonais du moment se dit le spectateur, commençant déjà à s’assoupir. Il lui faudra d’ailleurs dépasser les vingt premières minutes pour commencer à se dire que cela valait finalement le coup de patienter un peu.

Le film débute comme un plagiat légèrement confus de Ring, mâtiné de Ju-on et Kairo avec en filigrane une attaque contre les médias, la TV en particulier :

« Il n’était pas terrifié parce qu’il a vu quelque chose ; Il a vu quelque chose parce qu’il était terrifié ». Une phrase que l’on pourrait reformuler ainsi : « La TV ne nous montre pas les événements qui existent mais les événements existent parce que la TV nous les montre ».

Quand en plus le film devient une sorte de Voyage au Centre de la Terre à la nippone, il y a de quoi être décontenancé.

Matsuoka (Shinya Tsukamoto) est un caméraman freelance. Il est obsédé par les images et passe son temps à filmer. Mais surtout il désire expérimenter la terreur. Il veut savoir ce qu’est la vraie terreur, quitte à en mourir. Suite à un fait divers dans le métro, il acquiert la conviction que la clé de sa recherche se trouve sous Terre. Il se rend dans le dédale obscur des couloirs souterrains de Tokyo et en ramène quelque chose, ou plutôt quelqu’un ...

C’est à partir de ce point que Shimizu parvient enfin à stabiliser quelque peu son film. Si le film ne devient pas beaucoup plus clair (un peu comme Ju-on, on se contente d’assister à quelque chose sans que la moindre explication ne soit fournie), il devient plus cohérent. Peu à peu on appréhende la personnalité singulière de Matsuoka qui ne semble pas tout à fait sain d’esprit. Le film emprunte plus au cinéma fantastique et d’horreur classique qu’à la tendance horreur asiatique, avec ses revenants et autres fantômes vengeurs aux cheveux longs, en passant par les coups de téléphone mystérieux. Sans être aussi gore que Mermaid in a Manhole, The Stranger From Afar joue plus sur l’hémoglobine que sur la terreur pour parvenir à ses fins. On assiste alors à une sorte de version sanglante et vampirique de L’Enfant Sauvage. L’exercice périlleux (presque aucun dialogues, seulement la voix off du narrateur, c’est-à-dire Matsuoka) est finalement plutôt réussi, surtout grâce à la présence de Shinya Tsukamoto, absolument parfait dans ce rôle.

The Stranger from Afar ne peut cependant s’empêcher de céder aux sirènes de la mode et quelques scènes peu originales et un peu pataudes viennent parfois briser la simplicité d’une histoire certes classique mais habilement racontée. Les vrais faux fantômes, appels téléphoniques inquiétants et l’omniprésence de la TV font partie de ces petits égarements très dispensables.

La redéfinition du mot « terreur » au cœur de ce film mais aussi de l’ensemble de l’œuvre de Shimizu est une entreprise passionnante à suivre. The Stranger from Afar est, personnellement, au moins aussi intéressant que Ju-on (voire plus, ce dernier restant un peu trop superficiel à mon goût), même s’il partage quelques défauts avec ce dernier. Parfois kitsch (Shimizu veut nous faire sa version de Jigoku  ?), hermétique (voire incompréhensible) et maladroit, le film est sauvé d’une part par un retour au film d’horreur basique (un genre qui semble en voie de disparition au Japon), une histoire au final assez simple et universelle et enfin par l’excellence de l’interprétation de Shinya Tsukamoto.

The Stranger from Afar faisait partie de la sélection Digital Cinema de Venezia 61.

- Article paru le vendredi 24 septembre 2004

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