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Hors-Asie

MirrorMask

USA | 2005 | Un film de Dave McKean | Avec Stephanie Leonidas, Jason Barry, Rob Brydon, Gina McKee, Dora Bryan, Stephen Fry, Andy Hamilton, Simon Harvey

Helena est jongleuse dans le cirque tenu par ses parent, Joanne et Morris Campbell. Alors que pour beaucoup d’enfants, la vie du cirque est synonyme d’un rêve enchanteur et mystérieux, Helena elle, convoite une vie normale... Malheureusement pour elle, son souhait va être exhaucé : quoi de plus réel en effet, que la maladie qui frappe sa mère et l’envoie à l’hopital, laissant la jeune fille et son père, ainsi que tous les membres de la troupe, dans une douloureuse expectative ? Alors qu’elle s’endort la veille de l’opération de Joanne, Helena se retrouve plongée dans un univers onirique, prenant sa source dans les innombrables dessins qui ornent les murs de sa chambre. Dans celui-ci, tout le monde porte un masque et la Reine des Ténèbres est en passe de l’emporter sur la Reine de la Lumière, piégée dans un sommeil profond ; à moins que quelqu’un ne mette la main sur le MirrorMask, objet dont personne ne sait l’apparence ou l’utilité, et encore moins où il se trouve...

MirrorMask est le premier long-métrage de l’illustrateur Dave McKean, célèbre pour son association avec Neil Gaiman sur les couvertures de la série Sandman, ou encore pour l’étonnant roman graphique Cages. McKean n’est pas pour autant un nouveau venu dans le milieu cinématographique, ayant déjà à son actif deux courts-métrages, dont l’exceptionnel N(eon). Passionné d’arts numériques et de la notion de layers, qui lui permettent d’associer matières et éléments graphiques de natures distinctes (photos, dessins, peinture...), McKean est un véritable créateur, de mondes et de sensations, usant de sa propre perception pour enrichir la notre, sur nous-même et le monde qui nous entoure. N[eon] déjà, jouait à merveille de ces couches d’images pour exposer de façon multi-dimensionnelle le parcours émotionnel, fait d’images, de réfléxions et d’impressions, au sens pluriel du terme, de son héros. MirrorMask est une adaptation grand public de cette démarche, visant à donner corps à l’imaginaire maîtrisé et pourtant tellement libre de l’auteur Neil Gaiman.

Neil Gaiman est un homme qui, dans toutes ses œuvres, qu’elles soient illustrées ou non, s’est toujours passionné pour les mythes et les croyances, leurs retranscriptions réelles et littéraires, et la collision de leurs incarnations et perceptions. La base de son univers repose sur un principe simple : nous construisons, par nos croyances et notre système de valeurs, qui définissent nos appréciations comme nos appréhensions, notre propre univers, ses règles, ses entités bénéfiques et maléfiques. La non-acceptation de ces règles conduit à un conflit interne, une dissocation qui ne peut trouver résolution que dans une plongée dans notre personnalité. Il en est de même pour l’univers onirique dans lequel se retrouve plongé Helena : ses dessins y prennent vie, et les deux faces du monde - l’une claire, l’autre obscure - sont définies par les deux faces, admises comme antagonistes dans l’existence des entités dessinées, d’une feuille de papier. Tandis que l’une est vouée à l’exposition, l’autre est forcément condamnée à la dissimulation. Le choix de l’une ou de l’autre en tant que représentation, est une parfaite illustration des orientations de chacun.

Ce monde est donc le lieu du débat qui tiraille la jeune femme (fabuleuse Stephanie Leonidas), entre son acceptation du rêve de son père, dans lequel elle joue un rôle primordial - la survie du cirque en tant que divertissement contemporain -, et sa volonté de partager avec le reste du monde une vie « normale ». Les fenêtres qui ornent ses dessins sont autant de points d’observation entre l’univers onirique et une réalité transformée, investie par une projection d’Helena plongée dans les affres de cette réalité imaginée : conflits parentaux, relations avec les garçons... et permettent à Helena de prendre conscience qu’elle appartient à un monde en marge, dans lequel elle est capable de s’affirmer et faire une différence. Et peut-être même trouver l’amour...

Inquiétant dans bon nombre de ses visuels, MirrorMask est pourtant un conte fabuleux doublé d’un tour de force graphique, rendu possible autant par le génie de McKean que par le talent du studio Jim Henson. Chaque image est un tableau mouvant, empli de particules et d’ombres qui lui confèrent une vie particulière, entre l’illustration, la photo truquée et l’imagerie numérique. Mais jamais ce monde, dans son exhubérance, ne semble fabriqué et c’est là toute la réussite de MirrorMask : pour la première fois sur grand écran ou presque, un réalisateur parvient à mettre en images de façon cohérente l’univers intérieur qui, s’il est accepté, définit de façon cohérente le mode de vie de chacun d’entre nous. Il convient d’accepter de s’y plonger, sans se positionner par rapport au regard des autres, pour s’y reconnaître, derrière un masque qui, plutôt que de dissimuler notre réalité, exprime, dans sa nature de miroir, nos plus profondes aspirations. MirrorMask est un hymne à la différence qui n’est pas celui de l’excentricité, mais bien du respect de la personnalité, fantastique et magnifique.

Privé d’une sortie en salles en France, MirrorMask est désormais disponible en DVD zone 2 français.

- Article paru le mercredi 15 novembre 2006

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