Oasis
Seuls contre tous.
Après Peppermint Candy, Lee Chang-dong - actuel Ministre de la culture coréen - revient sur les écrans français. Le synopsis de sa dernière réalisation, Oasis sonne comme un véritable défi lancé au spectateur. Jugez en un peu.
Après avoir purgé une peine de prison pour avoir tué un balayeur lors d’un accident automobile, Jong-su (Sol Kyung-gu), criminel récidiviste et simplet, rejoint sa famille et tente de se réinsérer. Alors qu’il rend visite à la famille du balayeur qu’il a tué, Jong-su tombe amoureux de sa fille, Gong-Ju (’princesse’ en français), jouée par Moon So-ri. Cette dernière souffre malheureusement d’un grave handicap moteur. Lee Chang-dong nous convie à suivre l’évolution de cette relation peu ordinaire.
Le film n’est pas seulement un défi pour les spectateurs, il l’est également pour le réalisateur, et l’actrice. Difficile de faire du centre d’un film des personnes handicapées sans échapper au pathos, et Lee Chang-dong y parvient. Le réalisateur évoque au passage un sujet presque tabou, celui de la sexualité des handicapés. Quant à Moon So-ri, difficile de reconnaître sur l’écran la ravissante jeune femme qui quelques minutes auparavant nous a présenté le film. Une prestation, qui touche également à la performance sportive, et lui a valu avec raison le prix "Marcello Mastroianni" de la meilleure jeune actrice à Venise en 2002. Dans un registre moins spectaculaire, Sol Kyung-gu nous livre également une prestation de premier ordre.
La trame du récit est finalement assez classique, à une nuance près. La relation entre Gong-Ju et Jong-su se construit à travers les difficultés auxquelles ils sont confrontés, qu’elles proviennent de leurs familles respectives ou de la société. La nuance ici est que justement du fait de leur handicap, ils ne peuvent faire face.
Les deux personnages ne sont pas les seuls à faire leur apprentissage, le spectateur apprend également à aimer Gong-Ju et Jong-su au cours du film. Si le spectateur éprouve dès le début du film de l’empathie vis-à-vis de la jeune femme, et ce pour une raison évidente, le cas Jong-su est plus déconcertant. Pourtant, pour les mêmes motifs qui font de lui un inadapté social (voire ses multiples gaffes tout au long du film), Jong-su n’a pas peur de s’affranchir des conventions sociales. Son comportement va permettre à Gong-ju de s’ouvrir à la vie tout simplement, et ne plus rester accrochée à son poste de radio dans son appartement. Toutefois, l’espace de liberté de ces deux êtres est entouré d’environnement hostile, familial et social, comme l’est une oasis dans le désert.
Une des autres réussites du film est que Lee Chang-dong ne se laisse pas enfermer dans un système. Si l’approche d’Oasis est principalement réaliste, le réalisateur nous fait vivre la vie intérieure de la jeune femme par l’intermédiaire de scènes fantasmatiques qui ponctuent le récit. La caméra agitée de tremblements qui suit Jong-du lorsque, libéré de prison en hiver, celui-ci erre en chemisette à la recherche de sa famille, va ensuite se poser alors que l’on suit l’évolution de ce couple.
Sans rien révéler, fin heureuse ou non, Oasis se termine en apothéose, avec une belle démonstration d’amour de la part des deux protagonistes.
Date de sortie d’Oasis sur les écrans français : le 12 novembre 2003.
Oasis est par ailleurs disponible en DVD coréen.
L’équipe de Sancho tient à remercier Francine Ravel des Grands Films Classiques.


