Painted Skin
All about Vicki Zhao.
C’est alors que son armée attaque une tribu de Xiongnu, que le général Wang Sheng (Aloys Chen) sauve la belle Xiaowei (Zhou Xun) de l’emprise libidineuse des bandits nomades. Ce qu’il ne sait pas, c’est que la damoiselle, loin d’être en détresse, est en réalité un Huli jing ("fox spirit "), qui doit se nourrir de cœurs humains pour préserver l’illusion de son enveloppe charnelle... Xiaowei rejoint donc le quotidien de Wang Sheng et des siens.
Quelques mois plus tard, lorsque Pang Yong (Donnie Yen), ancien général disparu depuis plusieurs années, refait surface dans l’enceinte de la ville, Peirong (Zhao Wei), la femme de Wang Sheng qui fut un temps sa promise, lui explique comment, depuis l’arrivée de Xiaowei, un être mystérieux décime la population locale, les cœurs des victimes arrachés. Peirong, jalouse de l’intruse qui s’est éprise du général, lui-même visiblement en émois en sa présence, voit dans l’arrivée de Xia Bing (Betty Sun), dernière d’une lignée de chasseurs de démons, matière à conforter ses doutes quant à la nature démoniaque de Xiaowei. La cabale commence ; mais Wang Sheng, comme tous les hommes sous le charme de la rescapée, refuse de céder à la rumeur. D’ailleurs ce n’est pas tant Xiaowei qui se salit les mains, que son mystérieux acolyte caméléon (Qi Yuwu), amoureux transit qui se charge de la nourrir en muscles cardiaques...
Painted Skin, dernier film de Gordon Chan à ce jour, est une tentative intéressante de pénétration du marché chinois avec une relecture des classiques du cinéma d’horreur/fantasy HK des années 80 et 90. Reprenant à sa guise - et sans Jean Rochefort, Dieu soit loué - un classique du patrimoine littéraire chinois signé Pu Songling, sur l’adaptation éponyme duquel s’était éteinte la carrière de King Hu en 1993 (avec Joey Wong en sempiternel esprit sublime), c’est une œuvre plaisante mais tout aussi déséquilibrée que sa très dommageable bande son. Le mélodrame l’emporte très largement sur toutes ses autres composantes que sont le surnaturel, l’horreur, l’action, et même la comédie, involontaire, au travers du sur-jeu permanent de Donnie Yen, très en forme ou pas du tout, selon le goût de chacun. Surnage de tout cela, hypnotique, l’incroyable beauté de Vicki Zhao Wei, successivement épouse aux cheveux de jais et fausse Bride With White Hair, raison nécessaire et suffisante à notre intérêt tout au long du métrage.
C’est d’ailleurs sur ses épaules que reposent les qualités de Painted Skin. Plastiques, certes, puisque l’actrice rehausse la monotonie picturale de l’ensemble : l’image est belle mais pas transcendante, loin des éclats des blockbusters chinois récents, la constance de la palette employée s’accordant avec l’unité de lieu très restreinte de la narration, dans un manque de moyens et d’ambition qui donne au film des faux airs de pièce de théâtre. Mais c’est avant tout dans l’enjeu émotionnel que Zhao Wei sort Painted Skin de l’embarras. Puisque le film se résume en réalité à de simples chassés croisés amoureux, n’en déplaise à son passionnant et sous-employé folklore, la justesse, retenue ou intense, avec laquelle Zhao Wei lance ses regards, filtre ses émotions entre ses lèvres, exploite l’intégralité de son visage comme terrain d’interprétation – même sans mots – donne un corps saisissant à sa confrontation avec l’autre Femme du film, l’ambigüe Zhou Xun.
Un conflit amoureux qui n’est par contre pas aidé par l’aberrante partition d’Ikuro Fujiwara, dont l’appréciation est inversement proportionnelle à celle de sa chanson de fin, entonnée par la star chinoise Jane Zhang et primée aux Hong Kong Film Awards. Alternant légèreté inappropriée et emphase ridicule, quand, par son absence, elle ne place pas le gros du film dans une suspension embarrassante, la bande son ne cesse de fragiliser un édifice au montage hésitant, entre coupes grossières et effets de zoom syndicaux. Les images de synthèse donnant corps aux créatures maléfiques brisent quant à elles quelque peu l’écrin sublime des femmes de Painted Skin ; le tout l’empêchant d’être autre chose qu’un agréable divertissement. Ce qui n’est déjà pas si mal ; après tout, l’échec relatif de Gordon Chan, peu habitué au genre, a au moins le mérite de souffler autant de chaud que de froid, contrairement à Wu-Ji et consorts de triste mémoire.
On a parlé un temps d’une sortie dans les salles françaises de Painted Skin, qui n’a jamais eue lieu. Restent de nombreuses édition DVD, sous-titrées anglais, à Hong Kong ou ailleurs, pour se pavaner devant Zhao Wei.



