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Corée du Sud | Festival du film asiatique de Deauville 2013

Pieta

aka 피에타 | Corée | 2012 | Un film de Kim Ki-duk | Avec Lee Jung-jin, Jo Min-su, Kang Eun-jin, Woo Gi-hong, Cho Jae-ryong

Pieta est revenu du festival de Venise 2012 auréolé du Lion d’or. Je n’ai aucune idée de la valeur des autres films présentés lors de cette manifestation, mais celui de Kim Ki-duk, repris par la 15ème édition du Festival du film asiatique de Deauville, m’a particulièrement impressionné. Le réalisateur coréen a concocté un cocktail détonnant en mélangeant rancœur, amour maternel et argent.

Abandonné à sa naissance, Kang-do est collecteur de dettes dans le quartier de Cheonggyecheon à Séoul, où sont concentrés de petits ateliers de métallurgie. Ces bâtiments brinquebalants font tache dans la ville et vont être remplacés par des immeubles semblables à ceux des quartiers environnants. Le jeune homme fait son métier sans aucun état d’âme, broyant les genoux ou les bras de ceux qui n’ont pas les moyens de rembourser leur dette. L’argent reçu des assurances en dédommagement leur servira à payer l’usurier, même s’ils sont handicapés à vie et dans une situation pire qu’auparavant. Sa routine macabre est interrompue par l’apparition d’une femme qui se présente à lui comme sa mère...

Mes seules réserves au sujet du film concernent la trop grande rapidité avec laquelle Kang-do accepte cette mère rejetée avec violence dans un premier temps. Certaines scènes de sexe qui noircissent trop son personnage m’ont aussi paru superflues. Elles m’ont semblé n’avoir d’autre but que de choquer le bourgeois.

Toute la puissance de Pieta réside dans le scénario malin du réalisateur coréen, au-delà de certaines facilités. Ce film renforcera l’image d’un cinéma coréen violent véhiculée par l’échantillon des films distribués en occident. Mais, sans faire un faire un mauvais jeu de mots, la violence dans Pieta est tout sauf gratuite. Elle est le résultat d’une société gangrenée par l’argent.

Ces petits entrepreneurs se jettent dans les bras des usuriers parce qu’ils sont pris à la gorge par leurs donneurs d’ordre, nous fait comprendre le réalisateur au détour d’une conversation téléphonique. Ceux-ci leur imposent des prix trop bas pour qu’ils puissent vivre convenablement du fruit de leur travail. Ils n’ont donc pas seulement à craindre la violence froide de Kang-do, qui est sans doute aussi utilisé comme nettoyeur pour faciliter la renaissance immobilière du quartier.

Kim Ki-duk montre bien sûr ces actes de violence, mais sans tomber dans la surenchère. Les sons des articulations qui craquent ou des machines qui broient suffisent à faire frémir... Mais aussi leurs conséquences pour les personnes qui les subissent. Étalées devant nos yeux, elles sont encore plus terrifiantes que la violence.

Le cinéaste coréen pourra être accusé de noircir le trait, mais pas de tomber dans le manichéisme. Toutes les victimes de Kang-do ne sont pas innocentes, certaines sont même plus manipulatrices que manipulés. Le film de Kim Ki-duk est une charge contre le pouvoir corrupteur de l’argent qui provoque un renversement des valeurs. Il est ainsi capable d’avilir jusqu’à l’amour le plus pur : celui d’une mère pour son enfant.

Pieta a été présenté hors compétition au cours de la 15ème édition du Festival du film asiatique de Deauville. Il sortira le 10 avril en France.

- Article paru le mardi 26 mars 2013

signé Kizushii

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