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Hors-Asie

Piranha 3D

USA | 2010 | Un film d’Alexandre Aja | Avec Elisabeth Shue, Steven R. Mcqueen, Kelly Brook, Jessica Szohr, Adam Scott, Jerry O’Connell, Ving Rhames, Riley Steele, Christopher Lloyd, Richard Dreyfuss

Dying to get wet !

On pourrait presque croire que le Grind de MTV a été ressuscité le temps d’une semaine de Spring Break, deux dizaines de milliers de jeunes abrutis s’étant réunis pour danser et picoler sur le lac Victoria, en Arizona. Les poitrines exhibées se disputent l’attention du plus grand nombre ; comme l’illustre celle de Danni (Kelly Brook), actrice porno en tournage pour la caméra de Derrick Jones (Jerry O’Connell), qui n’est certainement pas étrangère à l’enrôlement forcé de Jake (Steven R. Mcqueen), notre héros, pour une journée de mensonge à Julie Forester (Elisabeth Shue), sa shérif de mère. Alors qu’il devait s’occuper de ses petits frères et sœurs, il les achète pour suivre l’équipe en tant que guide éclairé des eaux locales, accompagné bien malgré lui par l’élue retrouvée de son cœur, Kelly (Jessica Szohr), décidée à se dévergonder pour renouer avec le jeune homme. Ce qui aurait pu être sympa si, la veille, alors que Richard Dreyfuss pêchait tranquillement sur le lac au son d’une réminiscence des Dents de la mer, un mouvement tectonique – précipité par la chute sous-marine d’une bouteille de bière en guise de battement d’ailes de papillon - n’avait pas libéré d’une grotte souterraine une horde de piranhas préhistoriques.

Il est bien connu qu’un nouveau format vidéo n’est véritablement durable que lorsqu’il est adopté par l’industrie du porno ; et, si tant est que la 3D souhaite étendre sa rentabilité au-delà du réassort d’Avatar dans nos salles, il va bien falloir qu’elle se décline dans nos salons, et passe sous les fourches caudines du cinéma pour adultes. Alexandre Aja l’a bien compris en récupérant l’entreprise Piranha 3D, remake du classique bisseux de Joe Dante écrit par John Sayles (l’homme à qui l’on doit des merveilles de la trempe du Secret of Roan Inish, Eight Men Out et autre City of Hope), gonflé par les scénaristes de Sorority Row en véritable romp softcore. Le hardcore, si l’on excepte un déchiquetage de chibre à faire pâlir la pub Haribo et la présence de la Digital Playground girl Riley Steele, entre autres professionnelles, Aja se le garde pour le massacre orchestré de cette génération American Pie, qu’il s’efforce du même élan, bienveillant et outrageusement mercantile, de satisfaire.

Son talent de metteur en scène, Aja le met pendant la majeure partie de Piranha 3D au service de notre lubricité, exploitant la 3D bien plus intelligemment que Cameron n’a pu le faire avec les Na’vis. Qui se préoccuperait d’une fantaisie bariolée et quasi-asexuée, quand on peut profiter des attributs de Kelly Brook en 3 dimensions ? Le coup du jokari laisse la place à pléthore de poitrines et fessiers exhibés, Aja allant jusqu’à filmer ses sirènes entièrement nues dans un ballet aquatique gratuit, symbole exacerbé du machisme on display, dans lequel la 3D se découvre un nouveau potentiel. Franchement, vous faire vomir dessus en stéréoscopie, c’est pas le bonheur ?

Ça, c’est pour le beurre de cacahuètes, gras et pourtant délicieux. La confiture de fraise, elle, débarque avec la franchise d’Aja en matière de démembrement, éviscérations et autres effets hallucinants, pratiqués sur tous mais de préférence sur des figures familières et de vraies pornstars en goguette, trop occupées à dévoiler leurs flying boobs pour imaginer se faire bouffer jusqu’au nombril. Tout heureux du piège pré-pubère qu’il met en place avec brio, délaissant longtemps la foule d’adolescents pour mieux les exploser en fin de parcours, le réalisateur de La Colline a des yeux et Haute Tension se complait dans le racolage et l’esbroufe d’une hyper-réalité sexuée. Un peu comme Twilight, mais en mieux puisqu’exclusivement adressée aux hommes : si les filles ont l’œuvre de Stephenie Meyer pour se mordiller les lèvres, nous, messieurs, avons Piranha 3D. Et pour ça Alexandre, nous te disons merci.

Parce qu’en plus, notre Twilight à nous, esprits malades, n’a rien d’une éternelle hésitation frustrée. Le paroxysme de Piranha 3D est d’une violence absolument surréaliste, mise en scène avec une perversité savante, somme de micro-anticipations terrifiantes et toujours satisfaites. Comme lorsque, dans sa fuite égoïste, un ado aux commandes d’un hors-bord, responsable de plus de morts en quelques secondes que les poissons eux-même, voit son moteur momentanément empêtré dans les cheveux d’une baigneuse. Un court instant suffit à faire monter la sauce de l’horreur à venir, dévoilée plein écran avant de passer à l’outrage suivant. Ne pas rincer, et recommencer. Jusqu’à ce que les eaux de Victoria Lake soient uniformément rouges, notre estomac passablement retourné.

Non content d’outrepasser les obligations de son cahier des charges, mouchant au passage bon nombre de grosses productions avec un film simplement converti en 3D mais réfléchi en ce sens lors d’un tournage traditionnel, Alexandre Aja soigne comme toujours sa réalisation, encombre la surface de ses eaux pour augmenter le rendu tri-dimensionnel, redonne une seconde jeunesse à Elisabeth Shue, et fait d’un spectacle estival sciemment débilitant, un petit chef-d’œuvre aussi jouissif qu’inattendu. N’en déplaise au merveilleux Inception, plus aisément recommandable, le voilà, mon film de l’année !

Piranha 3D est sorti sur nos écrans le mercredi 1er septembre 2010.

- Article paru le dimanche 5 septembre 2010

signé Akatomy

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