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Hors-Asie

Punch Drunk Love

USA | 2002 | Un film de Paul Thomas Anderson | Avec Adam Sandler, Emily Watson, Luis Guzman, Philip Seymour Hoffman... et les sept sœurs de Barry Egan

1h40 de troubles du comportements et d’amour... par dessous tout !

Barry Egan est vendeur de ventouses. Barry Egan n’a pas une, mais sept sœurs. Barry Egan a un costume bleu qu’il vient de s’acheter et qu’il ne quitte plus. Barry Egan téléphone beaucoup. Barry Egan a sept sœurs très "lourdes". Barry Egan arrive très tôt au travail et rend service à Lena Leonard (Emily Watson) et récupère un "petit piano" abandonné dans la rue. Barry Egan a remarqué que s’il achetait pour $3000 de pudding, il pourrait gagner des millions de kilomètres en avion sur les vols de la compagnie aérienne associée à la promotion. Barry Egan n’a jamais pris l’avion. Barry Egan ne supporte pas qu’on lui parle de marteaux et de vitres brisées. Barry Egan est seul, malgré ses sept sœurs. Alors Barry Egan va appeler une ligne de sexe par téléphone. Mais Barry Egan est trop gentil et il ne voit pas venir le chantage et l’extorsion de fonds.

Devenu la cible d’une maîtresse-chanteuse, Barry Egan est à cran et pète les plombs avant de passer à table entouré de ses sept sœurs : il a vraiment un problème avec les portes-fenêtres, Barry Egan. Barry Egan est intrigué par cet harmonium récupéré sur le trottoir. Barry Egan est maintenant racketté par les hommes de mains de sa maîtresse-chanteuse. Mais quelqu’un arrive dans la vie de Barry Egan.

Barry Egan est amoureux de Lena Leonard. Lena Leonard est tombée amoureuse de Barry Egan après avoir vu sa photo.

Lena Leonard demande à Barry Egan de lui rendre service. Lena Leonard a remarqué que le piano de Barry Egan était celui abandonné dans la rue. Lena Leonard se demande à quoi sert tout ce pudding. Lena Leonard est l’employée d’une des sœurs de Barry Egan. Lena Leonard est divorcée et n’a pas eu de petit-ami depuis six mois. Lena Leonard tente le tout pour le tout et invite Barry Egan à dîner. Lena Leonard ne trouve pas que Barry Egan est un attardé. Lena Leonard ne comprend pas pourquoi Barry Egan a démoli les toilettes de ce petit restaurant romantique. Quand Barry Egan dit qu’il compte aller à Hawaï, Lena Leonard est enchantée car elle s’y rend aussi. Lena Leonard part pour Hawaï. Barry Egan achète du pudding et prend l’avion pour la première fois.

Barry Egan ne sait pas dans quel hôtel Lena Leonard est descendue. Barry Egan appelle sa sœur et s’énerve pour la seconde fois du film de façon assez spectaculaire. Barry et Lena sont enfin ensemble. Barry et Lena sont désormais inséparables. Barry pense qu’il est hors de question que Lena retourne vivre toute seule. Lena est d’accord avec Barry, alors ils rentrent tous les deux chez Barry.... Mais leur amour va être mis à dure épreuve...

Ma foi, quel drôle de couple que celui formé à l’écran par Anderson. Réunir la star ultra-comique et ultra-connue Adam Sandler, et Emily Watson, actrice d’un certain cinéma indépendant, pour incarner ces deux "malades d’amour" relevait d’un pari osé, très osé. Deux acteurs aux antipodes géographiques et cinématographiques, dans une sorte de comédie romantique, dirigée par l’homme qui a pris la fâcheuse double habitude de beaucoup faire parler ses acteurs, et de faire durer ses films près de 3 heures. Mais attention, pas de blague hein, Magnolia est un sacré chef-d’œuvre. La maîtrise d’Anderson est telle que le seconde partie du film ne connaît quasiment plus de dialogues, mais seulement de la musique ("It’s not going to stop") - et quelle musique !!

Alors oui bien sûr on a encore le droit à des plans-séquences en steady-cam, intérieur/extérieur qui suivent le personnage, mais là où se situe la différence c’est que cette méthode de mise en images va servir le récit et découler directement du comportement propre du personnage. Par exemple la nonchalance de Barry Egan se retrouve dans le lent déplacement de la caméra : elle a toujours l’air d’être en retard et Barry Egan doit faire une pause pour qu’elle puisse le rattraper.

Punch Drunk Love marque aussi une évolution dans la façon de concevoir une narration. Ici plus de musique à tout va. D’ailleurs les chansons ont bel et bien disparues. Tout comme ses illustres "collègues" Anderson avait pris l’habitude de coller de la musique sur la plupart des scènes d’exposition, de dépression ou d’épanouissement des personnages. Cette façon de faire est flagrante dans Boogie Nights : l’ouverture du film, le succès fulgurant de Dirk Diggler et bien entendu sa chute. Mais elle est aussi présente dans Magnolia : Julianne Moore qui craque devant le pharmacien, John C.Reilly qui fait sa déclaration à une jeune paumée.

Punch Drunk Love est un film sur la recherche de l’amour, l’envie d’être amoureux et finalement d’être libre et heureux. Car après tout dans la vie, il nous suffit de donner de l’amour à notre entourage pour en recevoir en retour. Barry Egan ne manque pas d’amour, ses sœurs l’adorent, son collègue (Luis Guzman) est prêt à faire n’importe quoi pour lui, mais Barry Egan souhaite recevoir de l’amour pour ce qu’il est vraiment et non pas pour ce qu’il paraît être : un farfelu un peu allumé qui n’explique rien de ses obsessions.

Barry Egan est en fait la personne la plus normale qui soit. Et s’il est caractériel et sujet à des crises de colère, c’est dû à la présence de ses sœurs qui lui pourrissent la vie en le prenant pour un attardé. Imaginez une sœur qui appelle toutes les deux minutes pour savoir ce que vous faîtes et qui vous "engueule" pour avoir dit "Je suis en train de travailler là." et multipliez tout cela par sept.

Mais dîtes-moi avec tout ça, je ne vous ai pas parlé d’Adam Sandler, ni même d’Emily Watson et encore moins de la dimension qu’ils apportent tout deux à leur couple. Comme dit précédemment, ils ont tout pour être "non-réunissables" à l’écran. Mais ne serait-ce pas justement l’atout principal du film, sa force ? Grand Dieu non. En effet l’atout du film ce n’est pas ce couple, ou le trio Sandler-Watson-Anderson. L’atout du film c’est la symbiose qui existe entre tout le monde. Vous savez au cinéma il y a un phénomène rare qui peut se produire : c’est quand tout est réuni sur un plateau pour atteindre la perfection. C’est carrément le cas du dernier quart d’heure de Scaramouche (voir article, ou mieux le film pour vraiment comprendre), mais aussi du plan final de Quattro Mosche di velveto grigio (Quatre mouche de velours gris de Dario), ou bien Ben-Hur qui regarde mourir Messala, le regard du soldat Witt pendant la quasi totalité de The Thin Red Line. Bref sachez que cela existe et que Anderson a trouvé le moyen de maîtriser ce phénomène.

Avec Punch Drunk Love, Paul Thomas Anderson a atteint le sommet de son art. Oublié le jeune surdoué du Sundance Institute, époque Hard Eight, époque "j’écris beaucoup de dialogues". Fini le très bon technicien du volontairement scabreux Boogie Nights, et du non moins exceptionnel Magnolia. Place à l’étonnant et au fraîchement déifié P.T. Anderson, pardon Paul Thomas.

La vie - pour une fois - c’est comme le cinéma chez Paul Thomas Anderson, simple comme un Punch Drunk Love.

En salles !

- Article paru le mardi 18 février 2003

signé Takeuchi

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