R-Point
Belle de nuit en Ao Daï...
Aficionados du cinéma d’horreur/d’épouvante dans ma prime jeunesse cinéphage, j’avoue que celui-ci me laisse désormais un peu froid. R-Point fait exception car il n’abuse pas d’effets et fait appel à l’intelligence du spectateur. Koon Soo-chang, réalisateur et scénariste, montre son savoir-faire avec une petite dizaine d’acteurs, une grande batisse abandonnée et quelques paysages de brousse.
Après les succès de Silmido et de Taegukgi, les films de guerre ont le vent en poupe en Corée. R-Point n’a pas atteint les scores faramineux du précédent, mais les moyens et le public visés ne sont pas les mêmes. Le choix de situer l’action lors de guerre du Vietnam n’est sans doute pas étranger à l’engagement sud-coréen en Irak auprès des américains. Les coréens leur avaient déjà rendu la politesse au vietnam, dette de sang de la guerre de Corée oblige.
Des soldats coréens sont envoyés en mission de secours à quelques jours de leur libération. Un message radio d’une section coréenne disparue il y a plusieurs mois au R-Point a été captée. L’objectif de cette nouvelle mission sera d’en rechercher les survivants.
La zone nommée R-Point a ceci de spéciale qu’elle n’est pas occupée par le Viêt-cong. Elle a été anciennement le lieu d’un massacre de civils lors d’une invasion par les militaires chinois, perfide albion du Vietnam. Depuis lors, les hommes qui y entrent et ont du sang sur les mains sont condamnés. L’esprit du lieu est une jeune vietnamienne vêtue de l’ao dai traditionnelle, qui a vécu à l’époque de la présence française.
L’aspect purement militaire du film aurait mérité d’être un peu plus réaliste. On a parfois du mal à juger crédibles certains comportements de ces soldats engagés dans une mission de guerre. Ce qui, il est vrai, facilite le travail du réalisateur et ne devrait pas gêner le plus grand nombre. Un de ses autres points faibles réside dans sa musique grandiloquente. Un défaut qu’il partageait avec nombre de films présentés à Udine.
En revanche, le réalisateur évite avec raison l’abus d’effets de surprise, qui à mon goût tombent bien trop souvent à plat dans ce genre de film. Les effets gores sont également limités. R-Point pourrait donc décevoir les amateurs du genre. Koon Soo-chang privilégie l’approche psychologique.
Le réalisateur ne cherche pas à manipuler le spectateur, mais fait appel à son intelligence. A l’image des personnages du film, il est petit à petit amené à ne plus prendre pour argent comptant ce qu’il a devant les yeux. La méfiance s’installe chez ces soldats : le soldat qui est devant lui, est-ce fantôme ou un camarade qui a été possédé ?
Le climax est un modèle du genre. D’une part, le scénario aboutit à son dénouement inéluctable. Et de l’autre, la tension qui s’est accumulée tout au long du film se libère dans une explosion de bruits, de musique et d’images. Elle cloue le spectateur sur son siège.
De la guerre comme une psychose collective qui pousse les êtres humains à s’assassiner les uns les autres. Le message ainsi délivré par le film n’est pas non plus étranger à mon goût pour celui-ci.
Présenté au cours du 7ème Far East Film Festival d’Udine, R-Point est notamment disponible en DVD coréen sous-titré anglais.


