Reversal of Fortune

Il y a des jours avec, et puis...
Kang Seung-Won (Kim Seung-Wu), ancien champion de golf potentiel, est trader dans la société Dongwon Securities. Incompétence ou perte momentanée de mojo et de groove, peu importe ; toujours est-il que Seung-Won perd de l’argent en quantités astronomiques, et que les clients le fuient comme la peste en faveur de ses collègues. Célibataire endurci - pas évident de trouver chaussure à son pied lorsque votre idéal est une femme qui, comme votre mère, est droitière mais épluche les fruits de la main gauche -, Seung-Won vit avec sa sœur divorcée et est au bout du rouleau. Les menaces de Ma Gang-Sung, gangster échaudé qui lui a fait signé de force une assurance-vie et le condamne à un accident fatal dans les deux semaines s’il ne récupère pas son investissement, ne sont pas pour le réconforter ; pas plus que le fait d’avoir perdu la maison familiale en boursicotant. Qu’importe : en ce jour maudit Seung-Won est victime d’un spectaculaire accident de la route, suite à une rencontre... avec lui-même, teint en blond ! Notre triste héros se réveille alors dans une réalité alternative, dans la peau du champion de golf qu’il aurait dû devenir. Une réalité a priori fort agréable, puisqu’il y est même marié - avec toutefois quelques battements d’aile - avec Han Ji-Young (Ha Ji-Won)...

Reversal of Fortune est une comédie romantique tout ce qu’il y a de plus traditionnel. A tel point d’ailleurs que, dans le paysage cinématographique actuel, plongé dans l’ombre de l’humour à la American Pie et autres films d’adolescents (dans lequel Ha Ji-Won a elle-même œuvré à l’occasion de Sex is Zero), il en deviendrait presque exceptionnel. Pas un gros mot ou presque, de même pour la violence, la vulgarité ou le sexe gratuit : Reversal of Fortune est une comédie populaire qui oublie de manger à énormément de râteliers vendeurs, certes, mais qui ne perd jamais son objectif de vue pour autant. A savoir, raconter une belle histoire de "seconde chance".

Seung-Won en effet, est catapulté dans une réalité alternative à première vue dorée, mais qui s’avère vite être un leurre. Son double décoloré, s’il a accompli le rêve qu’il a lui-même autrefois délaissé, est un monstre, aussi bien avec ses amis qu’avec sa famille. Sa femme d’ailleurs "n’en peux plus de le haïr" et rêve de divorcer. "Notre" Seung-Won lui, s’il n’a pas connu la gloire, a eu l’occasion d’apprendre au cours de sa chute sociale et personnelle, l’essentiel des valeurs humaines. On s’amuse alors de le voir s’énerver contre les photos de ce double grossier, lui en vouloir notamment de s’être fait écarter du lit de Ha Ji-Won, et tenter de se reconstruire une image positive. Loin d’être caricaturaux, ces moments d’énervement sont traités de façon crédible, sans que le caractère fantastique de la situation soit pour autant laissé de côté. Tous les personnages sont traités avec cette même retenue, Han Ji-Young notamment étant soigneusement dépeinte en femme meurtrie et pourtant généreuse par une Ha Ji-Won toujours merveilleuse. La redécouverte de son mari qui, inexplicablement, est devenu adorable, est un réel plaisir pour le spectateur.

Si l’on devait faire un reproche à Reversal of Fortune (qui n’a donc vous l’aurez compris, absolument rien à voir avec son homonyme signé Barbet Schroeder de 1990), ce serait le déséquilibre de la narration, l’évolution alternative de Seung-Won étant si agréable à suivre qu’elle paraît bien trop rapide au regard de l’ensemble. Mais le charisme des comédiens aidant, et grâce à un twist final aussi imprévu que charmant, cette comédie classique emporte facilement l’adhésion du spectateur, conquis par une dose bienvenue de sourires et d’optimisme.