Sector 7
Cela fait un moment que l’équipe de l’Eclipse, plate-forme pétrolière située dans le secteur 7, au sud de l’île de Jeju, échoue à trouver du pétrole ; aussi le vétéran Ahn Jung-man (Ahn Sung-ki) est-il appelé pour coordonner le départ des troupes dépitées. Une décision que sa nièce (de cœur, a priori) Hae-Joon (Ha Ji-won), jeune femme plus burnée que ses collègues masculins, prend plutôt mal, bien décidée à assurer à elle seule l’indépendance énergétique sud-coréenne. Bien lui prend de convaincre Jung-Man, qui supplante discrètement le capitaine en place, de mettre sa mission en suspens, le temps d’un dernier forage, puisque celui-ci est un succès. Happy happy joy, plus personne ne part et les ouvriers de l’extrême peuvent s’en retourner à leurs petits flirts, courses de motos (sur plate-forme, tout à fait) et autres séances de tir. Sauf que trois mois plus tard, catastrophe : un monstre terrifiant et baveux à souhait, cousin de la singulière créature de The Host, investit l’installation et grignote la petite équipe. On peut le comprendre : moi aussi je croquerais bien Ha Ji-won.
C’est d’ailleurs pour elle, autant que pour Pétrole Ahn Sung-ki, que j’ai eu envie de m’asseoir devant cet écueil estival coréen de l’année passée qu’est Sector 7, plus que pour ses velléités tridimensionnelles ou un vrai-faux héritage du film mutant de Bong Joon-ho. Peut-être est-ce sciemment que Kim Ji-hun a sabordé l’écriture et la mise en scène de son film de monstre, dans l’espoir d’en faire lui aussi, à sa façon, un film monstre, en marge de tout schéma classique… Ses choix audacieux ? Réduire les protagonistes à des clichés peau-de-chagrin, jouer d’un comique déplacé, détruire le suspense en dévoilant sa créature de fait, d’un coup d’un seul, et la surexposer dans un déluge de ralentis en apesanteur. Incapable, contrairement à l’éléphant de mer géant de Tchernobyl qui sert d’antagonisme, de s’affranchir des lois de la physique et de bondir vers des cieux plus cléments, Sector 7 délaisse une brillante idée d’écriture et s’enfonce tranquillement dans un n’importe quoi certes divertissant, mais tout de même décevant.
Car oui, il y a bien une excellente idée au cœur de Sector 7, exposée au cours de l’aveu de la culpabilité de Jung-man dans l’avènement de leur bourreau gluant au sang inflammable (twist honteux par ailleurs) : la découverte d’un organisme des profondeurs, sorte de petit poisson transparent capable de brûler pendant des heures et des heures. Soit une réponse souffre-douleur à la crise énergétique, à même de poser plein de questions difficiles – faut-il cramer une espèce pour assurer notre confort ? – et d’esquisser une approche profonde du film de monstre en haute mer, de faire de la créature un martyr écologique. Malheureusement Kim Ji-hun tient plus de George Pan Cosmatos que de Bong Joon-ho ou James Cameron, et délaisse complètement cet astucieux potentiel.
Alors soit, certains me diront qu’il est tout autant astucieux de balancer des motos sur une plate-forme offshore pour assurer le spectacle, et ce n’est pas faux. Le problème c’est que, incapable de justifier leur présence, Kim Ji-hun joue la carte de la nonchalance et ne la retourne jamais, contraint de traiter l’ensemble de son film avec le même aplomb. Ainsi n’avons-nous même pas le temps de redouter la créature que déjà elle apparait, plein écran, que l’on visite son garde-manger, l’affronte et découvre son point faible. C’est qu’on a d’autres trucs à faire quand même, faudrait voir à ne pas trop traîner, profiter de l’immense Ahn Sung-ki ou du talent de la merveilleuse Ha Ji-won, qui est finalement la seule à se battre réellement ici, en tant qu’actrice et en tant que protagoniste… Du coup, forcément, Sector 7 ne connait pas plus de temps mort que de suspense, et parvient à divertir sans jamais sombrer dans le pénible ou l’atermoiement, sautant d’idée risible en idée stupide. Il aurait toutefois mieux fait de s’affirmer rejeton discret d’Un Cri dans l’océan plutôt que se jeter ainsi, en 3D IMAX, en pâture à l’opprobre critique et populaire.
Sector 7 débarquera en DVD et Blu-ray chez nous, sous la bannière de TF1 Vidéo, le 17 octobre prochain. En attendant, il est disponible sur tous supports, sous-titré anglais, en Corée comme chez nos amis HK.






