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Hors-Asie

Seed

USA / Allemagne / Canada | 2007 | Un film d’Uwe Boll | Avec Will Sanderson, Michael Paré, Ralf Moeller, Jodelle Ferland, Thea Gill, Andrew Jackson, Brad Turner, Phillip Mitchell

Enfermement, panique, mort et décomposition ; telles sont les phases du cycle que le tueur en série Max Seed inscrit, à répétition, en noir et blanc sur bande magnétique, dans le seul but de narguer les forces de police qui tentent de mettre un terme à une série de 666 meurtres. Les victimes au menu de la VHS sont variées ; insectes, chien, femme et même un très jeune enfant en proie au désespoir. Traumatisé par ce jeu morbide qu’il ne comprend pas, le détective Matt Bishop parvient tout de même à délaisser ses interrogations existentielles le temps d’identifier la demeure de l’assassin, s’y rend avec ses hommes. Si ces derniers expirent tous, brutalement, leur dernier souffle aux mains de Seed au cours de cette descente nocturne, Bishop parvient à arrêter le monstre, rapidement condamné à s’asseoir sur la chaise électrique. Mais dans l’établissement pénitentiaire où Seed attend son exécution, muré dans le mutisme derrière un étrange masque, l’équipement est vétuste et l’homme survit à deux tentatives d’électrocution. Pour éviter de tomber sous le coup d’une loi fédérale, offrant la liberté sans condition à quiconque survivrait à trois exécutions successives, le directeur de la prison et ses hommes décident, en accord tacite avec un Bishop de plus en plus torturé, de prendre la justice entre leurs mains et d’enterrer Seed vivant...

Avec Seed, faussement marketé comme l’adaptation d’une histoire vraie, Uwe Boll délaisse l’univers des adaptations vidéoludiques qui ont construit son mythe polémique, et s’éloigne de ses virulents détracteurs pour connaître le réconfort d’une partie de la critique et des spectateurs. Objet diablement indépendant, produit, écrit et réalisé par sieur Postal, Seed est de ces petits films rageurs et fauchés, affranchis de retenue et de barrières morales, qui naviguent entre la franche réussite et l’amateurisme télévisuel, tout en se forgeant une personnalité, iconoclaste, mémorable – et surtout volontairement détestable.

Pour vous en convaincre, il faudra toutefois avoir le cœur bien accroché, passer outre les premières images du film qui, par le biais de la petite lucarne, distillent une redoutable absence d’humanité. Avant que le spectateur halluciné soit confronté à la terreur basse définition d’un enfant capturé par Seed (la bande son de son désespoir est insupportable), le film s’ouvre en effet sur des images d’archives présentant des massacres animaliers, pratiqués sans vergogne dans le but de faire négoce de leur fourrure. Une mise en abîme de la brutalité qui, si j’en crois mes camarades qui ont eu la chance de s’asseoir devant Amoklauf lors de la dernière édition de l’Etrange Festival, tisse une parenté directe avec les thématiques originelles de l’auteur allemand, et devant laquelle se détache la silhouette de Max Seed, tueur fantasmé et fascinant, alter ego débridé et muet d’un réalisateur en guerre contre ses juges et bourreaux.

Par le biais d’une narration quasi-expérimentale, exempte de véritables dialogues puisque Matt Bishop se parle le plus souvent à lui-même, et que l’intrigue avance, par bonds irréguliers reliant des scènes éparses, au travers de coupures de presse fugitives, Boll entraîne donc logiquement Seed de la condamnation biaisée – qu’importe que ses crimes soient avérés – à sa résurrection vengeresse, qui lui permettra de reprendre le fil de sa violence et de l’exercer sur ceux qui l’ont puni sans respecter les règles du jeu. La violence sortira alors de l’écran dans l’écran, pour s’installer avec force malaise en plein cadre. Ainsi, dans le dernier tiers du film, qui conduit Bishop et les siens à leur perte, Boll filme-t-il longuement le meurtre détestable d’une femme, ligotée à une chaise, taquinée par le marteau de Seed avant d’être réduite à néant sous le coup d’assauts répétés, ravageurs, improbables, interminables.

Cette seule séquence, qui précède la conclusion désespérée du métrage (qui nous donne d’ailleurs l’occasion de retrouver quelques instants l’étonnante Sharon du Silent Hill de Christophe Gans, Jodelle Ferland), fait de Seed une œuvre à part, et d’Uwe Boll un réalisateur tout aussi singulier. Rarement la brutalité aura-t-elle été aussi insistante, gratuite et nihiliste, dépourvue de conscience autre que cinématographique. Preuve que l’homme est un authentique auteur, n’en déplaise au plus grand nombre ; et si le jeu tout en culpabilité de Michael Paré paraît quelque peu détaché de la réalité, rappelant que la plus grande lacune de Boll reste la direction d’acteurs, cela n’entache que peu un tableau noyé dans une haine rare et, d’une bien désagréable façon, précieuse dans sa franchise faussement impartiale.

Seed est disponible en DVD aux US, uncut et en zone 1, dans une édition proposant un jeu PC parfaitement hors-contexte (Advent Rising) en cadeau. Ne pas rater l’insert proposant des ringtones Uwe Boll (!!!).

- Article paru le mercredi 14 octobre 2009

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