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Japon

Star Reformer

aka Kencho no Hoshi - Star of the Prefectural Government | Japon | 2006 | Un film de Hiroshi Nishitani | Avec Yuji Oda, Kou Shibasaki, Koji Ishizaka, Hisashi Igawa, Gaku Yamada, Bengal, Mahiru Konno, Toru Masuoka, Jin Nakayama, Setsutan Oh, Kaoru Okunuki, Wakako Sakai, Kunanosuke Sasaki, Toshihiro Wada, Kenichi Yajima, Sayaka Yamaguchi

Nomura est l’une des stars d’une administration japonaise anonyme, œuvrant au niveau préfectoral. Carriériste forcené, il se bat pour faire adopter un projet ambitieux de maison de retraite baptisé Renaissance, chantier à même de l’emmener au sommet de l’administration. Passé maître dans l’art de la communication et de l’échine courbée, il convainc l’une des forces politiques en présence de sa capacité à mener le dossier à terme avec la faveur des habitants de la préfecture, en déclarant vouloir prendre en compte leur savoir-faire au quotidien. Bien mal lui en prend, puisqu’il se retrouve, avec quelques collègues, fer de lance d’un programme d’échange de personnel consistant à intégrer pour six mois des fonctionnaires dans des établissements privés de la région, pour apprendre ces divers savoir-faire. Sa destination ? Un supermarché banal de la chaîne Mantendo. Sur place, il se voit placé sous le coaching de Ninomiya, jeune femme assurant la gérance de l’établissement à temps partiel. Le bureaucrate, spécialiste en procédures et autres banalisations inhumaines, se retrouve alors confronté à la réalité de la gestion humaine, loin des statistiques et des manuels impersonnels...

Adaptation d’un roman de Nozomi Katsura, Star Reformer est un pamphlet léger, qui s’attaque au fossé qui sépare la conception bureaucrate du travail – perçu au travers de bilans et autres chiffres réducteurs – et sa réalité au quotidien. Incarnation de ce fossé, Nomura est un personnage relativement abject, machine de travail inadaptée au contact humain. D’une pertinence étonnante dans l’immédiat, il semble toutefois incapable de percevoir les effets à long terme de sa répartie à toute épreuve. Naïf, il symbolise le paradoxe de l’administration locale, rouage d’une machine politique nationale, persuadée d’être autonome alors qu’elle répond elle-même à une entité supérieure. Le mépris dont il fait preuve envers les individualités qui gèrent le supermarché, il le subit sans le reconnaître dans son propre rôle de pion dispensable.

Star Reformer vous vous en doutez, est un film initiatique. L’histoire d’un égoïste qui apprend au contact de l’autre – ici incarné par la charmante Ninomiya – que travailler efficacement dans l’intérêt des gens passe par la connaissance et le respect de ceux-ci. Récit un tantinet longuet de cette ouverture difficile, le film de Hiroshi Nishitani ne fait pas particulièrement preuve d’originalité, que ce soit au niveau de sa mise en scène – tout de même très second degré, comme lorsqu’elle présente l’arrivée de Nomura sur la parking déserté du Mantendo - ou de son écriture. Star Reformer repose comme il se doit sur l’antagonisme qui oppose Ninomiya et Nomura, nourri par les obstacles que représentent chaque employé de l’établissement.

Initialement détestable, Nomura est tout de même un personnage fascinant, aveuglément appliqué à la satisfaction de ses supérieurs et de son égo. Plutôt que d’apprendre de ses collègues, il tente de réformer le supermarché pour augmenter ses bénéfices annuels. Et il s’avère que, même si ses méthodes sont erronées puisque bêtement théoriques - voire l’échec de son plateau repas de luxe -, le bougre a raison de vouloir changer les choses, le supermarché (lui aussi terrain de critiques) étant menacé de fermeture en raison de sa gestion hasardeuse. « Kencho san » (« Monsieur Préfecture ») pourra alors user de son amour des procédures pour remettre le Mantendo à flot ; mais pour être efficaces, celles-ci devront résulter d’une analyse non pas mathématique, mais humaine.

Si Star Reformer est un film si agréable à regarder, ce n’est donc pas grâce à son histoire, maîtrisée mais classique, d’ « overdog  ». Le point fort de ce produit de divertissement tout de même très critique – Nomura se faisant au final avoir par le gouvernement, par le biais de promesses vides dont il a lui-même explicité l’usage dans un guide interne à l’administration – réside dans son couple protagoniste. Yuji Oda, fantastique héros de l’univers Bayside Shakedown, est excellent dans son interprétation d’une élite déracinée, exaspéré par l’imperfection de ces gens qu’il considère comme inférieurs avant d’être lui-même exclu de l’élite. Face à lui, Kou Shibasaki, plus belle au fil des années, joue à merveille la jeune femme revêche puis craquante, combinant dans sa démarche iconoclaste les jambes en X et les pieds traînants à même d’en faire une figure de fascination culturelle. Ensemble, ils portent ce film sympathique, ancré dans une réalité politique japonaise facilement transposable à bon nombre de découpages administratifs... dont le notre.

Star Reformer est disponible en VCD et DVD HK, sous-titré anglais. Pressage plutôt correct pour une fois, qui plus est au format.

- Article paru le lundi 29 septembre 2008

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