Tenshi no Harawata : Akai Memai
Le cinquième volet de la série de ’Pinku Eiga’ de la Nikkatsu, Tenshi no Harawata, marqua les début de Takashi Ishii derrière la caméra...
Nami (Mayako Katsuragi - Bakayarô !, The Toxic Avenger part.2), une jeune infirmière, est victime d’une tentative de viol par deux de ses patients. Choquée, elle s’enfuit de l’hôpital pour aller retrouver son petit ami, un photographe de charmes ; malheureusement pour elle, Nami le découvre dans les bras d’une autre. Blessée au plus profond de son être, elle part sans réellement savoir où aller... Muraki (Takenaka), un salaryman endetté qui a perdu femme et boulot, percute une jeune femme avec sa voiture alors qu’il fuit sa vie ; sa victime n’est autre que Nami. Apeuré et la croyant morte, il l’emmène avec lui dans sa fuite désespérée...
Créateur du manga éponyme et scénariste de la série Tenshi no Harawata, Ishii qui se vit confier la réalisation de cet épisode y pose toutes les fondements de son œuvre. Akai Memai va bien au-delà du Pinku classique, et bien plus qu’une prémice on peut parler de concrétisation de sa thématique récurrente dans l’avenir. Nami est au départ un objet sexuel qui renvoie aux mâles nippons l’image de la femme en tant que propriété masculine acquise, qui véhicule bon nombre de fétichismes de notre époque. Mais son personnage évolue, et elle passe de la détresse et de l’état de victime à une sorte de rébellion, à un sursaut d’ "orgueil" qu’Ishii insuffle à tous ses personnages féminins. Et cet acte rebelle est caractérisé à l’image par une gifle ; geste ultime qui survient au milieu du film, quasiment à la seconde près, qui rarement n’aura eu autant de significations. Nami a remporté la bataille décisive et prouve alors que le corps de la femme n’est pas cette chose dont l’homme peut disposer à sa guise... Cette relation basée sur la crainte et la peur pour l’une, et sur la domination physique pour l’autre, se transforme alors en un rapport qui mêle désir et passion, en une dépendance physique mais surtout morale ; en un mot, en amour.
Dès le début, Ishii se ré-approprie les codes du Pinku pour les façonner à sa manière ; le but premier du ’film rose’ est de montrer de jolies jeunes femmes dans le plus simple appareil afin de satisfaire la libido du public. Pourtant, même si les scènes de nu sont présentes dans Akai Memai, elles ne sont pas l’attrait principal du film ; ce qui intéresse Ishii ce sont les personnages, leurs sentiments, leurs états d’âmes et leur transformation psychologique... Epaulé par un casting sur mesures dont le couple phare est composé de l’ancienne actrice de films X et Roman Poruno de la Nikkatsu, Mayako Kutsaragi, et de l’incommensurable Naoto Takenaka que l’on ne présente plus, Takashi Ishii signe ici en même temps que sa première œuvre, un film troublant, baignant dans un onirisme quasi-constant...
Tourné en une semaine ( !), Tenshi no Harawata : Akai Memai imposait Takashi Ishii en réalisateur talentueux et reconnu par ses pairs. Aujourd’hui, treize ans après ses débuts derrière la caméra, ce sont les mêmes thèmes qui hantent son œuvre, explorés sans relâche par l’un des rares "cinéastes de la femme" de notre époque. Akai Memai est une première œuvre impressionnante de noirceur, qui pendant une heure-et-quart vous transportera dans l’esprit torturé de son auteur... un grand film.
DVD | Pioneer (en association avec Nikkatsu) | NTSC | Zone 2 | Format : 1:1:85 - 16/9 | Images : Un pressage anamorphique plutôt réussi si l’on excepte une granulation plus ou moins prononcée lors de certaines scènes. | Son : Un Mono très "classique" sans problème. | Suppléments : Commentaire audio de Takashi Ishii et de son chef-op’ Yasushi Sasakihara, une interview de Ishii avec Naoto Takenaka (45’), le trailer et un livret de 4 pages... bien entendu, pas de sous-titres !

