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Chine

The Matrimony

aka 心中有鬼 | Chine | 2007 | Un film de Teng Hua-Tao| Avec Leon Lai Ming, Rene Liu, Fan Bing-Bing, Xu Songzhi, Zheng Yuzhi

Les premières minutes de The Matrimony affichent clairement les intentions de son réalisateur Teng Hua-Tao : les retrouvailles de deux amoureux enfin décidés à se marier, dans la Chine des années 30, sont avortées par un très déplacé accident en synthèse, le corps de Fan Bing-Bing victime de rebonds improbables après avoir été percuté par une voiture, le film effaçant dès lors la bluette au profit d’un générique qui ressemble à s’y méprendre à la bande promo d’une attraction de maison hantée, avec mains qui sortent de l’ombre et j’en passe… En même temps, comment The Matrimony pourrait-il ne pas œuvrer dans le surnaturel, quand Fan Bing-Bing s’y éprend de l’endive Leon Lai ? A moins qu’elle n’ait pas vu Dream of a Warrior, ni Bullets of Love ?

Après le décès de Manli (Fan Bing-Bing), l’amour de sa vie, Junchun (Leon Lai), célèbre caméraman, a pris Sansan (Rene Liu) pour épouse. Un mariage qu’il s’efforce de rappeler arrangé, et qu’il honore donc de mépris et insultes ; quand il n’est pas simplement absent, travaillant à quelque projet secret. Pénétrant, contre les injonctions de son mari, dans une pièce de leur maison isolée en forêt, qui abrite les reliques de la relation du goujat avec Manli, Sansan y rencontre le spectre de cette dernière, bien décidée à l’aider à conquérir l’affection de Junchun pour qu’enfin il retrouve goût à la vie. Une assistance inattendue, qui passe notamment par une possession volontaire du corps de l’épouse éconduite. Alors que, grâce à l’intervention de Manli, Junchun se rapproche enfin de Sansan, les véritables intentions du spectre commencent à se dessiner…

Il est parfois bon de laisser décanter quelques jours le visionnage d’un film ; dans le cas de The Matrimony, cela m’a permis d’estomper ses maladresses au profit de ses nombreuses qualités, d’ambiance et visuelles. Passé son introduction racoleuse, et si l’on excepte quelques effets de mise en scène trop modernes (les déplacements de la caméra dans les conduits d’aération de la maison, notamment), le film de Teng Hua-Tao s’affirme dès l’apparition de Sansan – superbement fragile Rene Liu, engoncée dans de somptueux costumes d’époque – comme une œuvre bien plus raffinée qu’elle prétendait initialement l’être. Certes, Fan Bing-Bing, toute de rouge vêtue, y incarne une féminité légèrement anachronique, mais la relation des deux femmes, vivante et défunte, possède un caractère distingué, presque désuet ; une impression renforcée par la superbe photographie de l’ensemble, le jeu des deux actrices, et l’ambiance de cette étonnante demeure, mélange de styles architecturaux, où se dénoue l’intrigue du film.

Cette maison si particulière, contrastée et pour autant sous-exploitée, symbolise bien The Matrimony dans son ensemble : intéressant dans ses juxtapositions – une approche très J-Horror du fantomatique y côtoie celle, plus traditionnellement chinoise, des parchemins protecteurs et autres tantes exorcistes, et s’y disputent le frigide et le chaleureux, tout autant que l’épouvante et le romantisme – le film reste souvent superficiel. Certainement parce que, prises indépendamment et développées, ses parties manqueraient trop d’originalité. Mais si le décorticage de sa collision de genres et de tons révèle un certain classicisme, il est indéniable que The Matrimony parvient à y trouver une certaine originalité, une identité et une esthétique. Dommage que Leon Lai y soit si inconsistant, et que l’ensemble soit emballé dans une pirouette narrative dispensable (mais certainement à même de faire passer la pilule de la représentation des superstitions aux yeux des autorités), car il y a là une belle mise en scène de l’épouvante feutrée.

The Matrimony est notamment disponible en DVD HK, sous-titré anglais, ainsi qu’outre-Manche, dissimulé derrière une hideuse et trompeuse jaquette façon torture porn.

- Article paru le mercredi 7 novembre 2012

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