The Rules of Attraction
Ok, deal with it...
Les lois de l’attraction est sans conteste l’adaptation à l’écran la plus réussie d’un roman de Bret Easton Ellis (BEE), même s’il a l’avantage d’un effet de base favorable. Le réalisateur Roger Avary est parvenu à préserver l’esprit du livre, mais surtout à retranscrire certains traits caractéristiques des romans de l’écrivain américain.
Ce long métrage se rattache à un sous-genre éminemment américain, celui des films de college, mais leur tourne allègrement le dos dans sa peinture des moeurs de ses étudiants. Si la vie de campus est une des facettes de l’american way of life qui fascine les publics étrangers - qui n’a pas souhaité, moi le premier, vivre une année universitaire sur un campus américain ? - Roger Avary ou plutôt BEE, en livre une vision désenchantée.
Le désir des principaux personnages du film gravite autour de Sean Bateman (James Van Der Beek), probable frère du Jack l’éventreur du Wall Street des années 80, Patrick Bateman. Par son travail sur le cadrage du visage de James Van Der Beek, le réalisateur parvient à capter ce qu’il peut y avoir d’inquiétant dans celui-ci, et nous faire oublier le mièvre personnage télévisuel pour lequel il est plus connu. Le carré amoureux comprend Paul Denton, l’homosexuel, brûlemment interprété par Ian Somerhalder ; Lauren Hynde (Shannyn Sossamon), ainsi qu’un personnage tout aussi important qui n’apparaît pourtant que discrètement au détour de certains plans, l’étudiante mystérieuse qui a le béguin pour Sean.
Roger Avary reprend la narration personnage par personnage du livre. Un procédé que l’on retrouve également dans d’autres romans d’Ellis. Les liens entre les personnages et la structure en flash back du film, le réalisateur les matérialise lors de la séquence d’ouverture du film. Les scènes d’introduction des principaux protagonistes sont reliées par des séquences qui défilent à l’envers. Un procédé avec lequel il joue. En effet, vers la fin du film, le réalisateur montre Lauren qui marche à reculons en quittant la chambre de Sean comme si le défilement de la scène était inversé alors que ce n’est pas le cas ! Mais surtout les personnages qu’il nous présente sont dans un cul de sac ; rien d’étonnant donc à ce que Roger Avary passe la marche arrière pour nous montrer ce qui l’intéresse : la trajectoire de Sean, Lauren et Paul.
La musique, partie prenante du film comme elle l’est des livres de BEE - qui va parfois jusqu’à discourir sur la longueur d’un chapitre à propos d’un artiste -, est un autre acteur important des Lois de l’attraction. Elle souligne classiquement certaines scènes : "Mellow is the feeling that I get when I see her" chante Donovan, lorsque Sean et Lauren "flashent" l’un sur l’autre. Mais les morceaux participent surtout au dynamisme de la mise en scène.
Les contempteurs du film ne veulent en retenir que l’aspect superficiel du récit : de jeunes étudiants aisés qui s’adonnent aux "joies" de la drogue et du sexe. Un film qui se voudrait seulement drôle et cynique. S’il l’est parfois, et ne boudons pas notre plaisir lors de certaines scènes, le réalisateur dépasse ce simple registre. La noirceur s’insinue au fur et à mesure du récit, alors que le campus bascule dans l’hiver, pour culminer sur... Non je ne le vous dirais pas, il faut préserver quelques mystères au film.
J’ajouterais simplement que cette superficialité des comportements ne demanderait pourtant qu’à céder la place à la sentimentalité. Parfois d’ailleurs le vernis craque, comme lors de la plus belle scène film qui est également une vraie bonne idée de mise en scène. Dans une très belle application du split screen, le spectateur assiste à la fois à la fusion des images et des coeurs.
Rock N’ Roll !
Les lois de l’attraction est sorti sur les écrans français le 12 mars 2003, et est récemment sorti en DVD zone 2 dans une édition double.


