The Spy Dad
Wong Jing réinvente le "non-film"...
Héros sur grand écran, zéro dans la vie... Tony Leung Ka-Fai illustre ce célèbre adage scénaristique au travers du personnage de Jimmie Bon, populaire acteur de films d’action "à la James Bond". Invincible lorsque décomposé en 24 images / secondes, il s’endort lors d’un cambriolage à domicile, pendant que sa femme Isabel (Candy Yu) se charge des malfrats. Elle aussi actrice, Isabel quitte son couard de mari pour entamer une carrière aux USA. Leurs deux filles, Cream (Gillian Chung) et Ice-Cream n’ont que peu de respect pour Jimmie, parfaitement incapable de tenir tête ne serait-ce qu’aux demoiselles qui maltraitent Cream à l’école. Quant à affronter les parents des ces "bully" locaux... il faut dire aussi que, parmi les parents d’élèves, se trouve notamment un certain Dr Donno (Eric Kot), terroriste auto-proclamé bien décidé à conquérir le monde. Criminel par choix ("Ton grand-père était collabo, je suis terroriste, il faudra au moins que tu sois tueur en série !"), Donno traite avec "the real thing", à savoir Lungyi (Elvis Tsui) - super-criminel recherché par Interpol, et plus particulièrement par l’agent Tienan (Jordan Chan). Lequel Tienan, alors qu’il tente de récuperer le "Super SARS Virus" mis au point par Donno, est contaminé par un autre agent chimique de sa création, qui ramène son intelligence à celle d’un enfant de quatre ans. Réduit à l’état de grand benêt, Tienan se réfugie chez les Bon, et décide que Jimmie doit être sa mère...
Bienvenue dans un univers où les enfants de quatre ans ne se nourrissent qu’au biberon et pissent sur des baies vitrées, où l’on dépense tout le budget d’un film au cours de ses dix premières minutes, où chaque idée potentielle d’un scénario est volontairement jetée aux oubliettes et où Gillian Chung apprend à se battre par téléphone...
Cet univers c’est celui maintes fois abordé dans nos pages de Wong Jing, mogul-scénariste-producteur-acteur-racaille de luxe, fanatique du plagiat et de la parodie bas de gamme, du politiquement incorrect et de l’humour déplacé. Tenez par exemple, Wong Jing est le premier à faire de l’humour sur grand écran à base de SARS, au milieu d’un "scénario" certainement pensé à l’envers au cours d’un soir de beuverie, et régurgité sur papier parfumé pour validation. Et le plus étonnant dans tout ça, c’est qu’un "all star cast" devait être de la fête au moment de la conception - sinon pourquoi autant d’acteurs de renom figureraient-ils au générique d’un tel non-film ?
Passé le prégénérique de The Spy Dad - au cours duquel Jordan Chan se la joue pour la énième fois agent cool et high-tech - le film dévoile rapidement des atouts, stupides mais alléchants, qui ne lui serviront jamais. Parodies de Matrix, James Bond... à grand renfort d’effets spéciaux, quelques idées sont jetées à la va-vite pour ne jamais être réutilisées. D’ailleurs lorsqu’il retombe en enfance, Tienan se débarasse de son sac à dos "Terminator", élément que l’on croyait essentiel mais que nous ne reverrons plus jamais alors qu’il vient de nous être présenté. De la même façon, Gillian Chung pénètre hyper vite dans la "matrice" d’Interpol via le téléphone de Tienan et y apprend le kung-fu - pour ne se battre que quelques secondes dans le film, soit le quart de son temps de présence à l’écran (ce qui est peu pour une tête d’affiche, vous en conviendrez). Chaque scène d’action potentielle est ainsi esquissée avant d’être écartée, jusqu’à ce qu’il n’y en ait plus du tout - objectif remarquablement atteint en moins d’une demi-heure...
En fait, The Spy Dad n’est pas du tout un film d’action. Il a été vendu de la sorte pour attirer le chaland en salles, certainement, mais n’est en réalité qu’une comédie de quiproquos tout ce qu’il y a de plus surjoué, mal monté et... pas drôle. La réputation de Tony Leung en prend un sacré coup, on se fait carrément voler en terme de Gillian Chung, et les scènes infantiles avec Jordan Chan sont hallucinantes de stupidité. Les méprises sexuelles sont légions et toutes plus lourdes les unes que les autres, les personnages sans intérêt, la fin ahurissante de mièvrerie syndicale - en plus d’être parfaitement injustifiée... c’est horrible en fait ! Rarement un scénario aura-t-il aussi volontairement fait fi de ses propres implications narratives, pour vivre pleinement son infantilisation chaotique !!!
Mais comme le scénario n’en est pas un, que la réalisation et le montage ne peuvent prétendre à ces dénominations, que le jeu d’acteurs n’est pas pris au sérieux et que l’ensemble se dégonfle de façon programmée comme un vieux soufflet au pet, ce n’est pas très grave. The Spy Dad ne peut pas être un mauvais film, pusiqu’il n’en est pas un !
The Spy Dad est disponible en VCD et DVD HK chez Panorama Entertainment.


