Twin Dragons
Je vous l’avais bien dit, non, que j’allais tenté de combler les lacunes de SdA en matière de Jackie Chan (cf. article The Accidental Spy) ? Seven Sept, en plaçant sur le marché nouveau du "DVD en kiosque" son édition plus que correcte de Twin Dragons, m’offre l’opportunité de tenir cette promesse encore fraîche...
Twin Dragons n’est pas un film comme les autres dans la carrière de Jackie Chan, puisqu’il place l’acteur devant une caméra partagée par Tsui Hark et Ringo Lam - rien que ça ! - pour un film qui marque la fin de l’une des carrières de l’homme-orchestre : celle de réalisateur. De façon officielle tout au moins, puisque Jackie "envahira" les mises en scène de Crime Story, Drunken Master II, Who Am I ?... confirmant sa réputation de mégalo-maniaque, avide de maîtriser le moindre aspect de sa légende. Je ne suis pas trop au fait de la réputation de Ringo Lam sur un tournage, mais celle de l’ami Tsui n’est plus à faire. On se met du coup un peu à trembler en imaginant l’ambiance sur le plateau de Twin Dragons, avec deux producteurs/réalisateurs acharnés se disputant le contrôle d’un film, l’un derrière la caméra, l’autre devant - deux fois !... Mais cette histoire appartient à l’envers du décor, revenons-en aux images elles-mêmes.
...Quoique pas tout de suite. Parce qu’il convient aussi de signaler que Twin Dragons n’est pas non plus un film comme les autres dans la carrière de Ringo Lam. Comment le réalisateur de la série des "On Fire", fraîchement sorti de l’utra-nihiliste Full Contact, peut-il bien se retrouver aux demi-commandes d’une comédie cantonnaise ? Après cinq ans consacrés à la violence, la trahison, et le rejet de bon nombre de valeurs humaines essentielles, Ringo avait peut-être envie de revenir à un cinéma bon enfant, plus proche de son Aces Go Places IV...
En tout cas, le prégénérique de Twin Dragons pourrait être celui d’un film signé à 100% par Ringo Lam, puisqu’il nous présente la venue au monde de jumeaux dans un hôpital HK ; un moment joyeux interrompu par un gangster sans foi ni loi, qui échappe au contrôle des forces de l’ordre et se sert de l’un des bébés comme otage pour couvrir sa fuite. Boomer ("Casse-cou" en VF) et Ma Yau sont ainsi séparés à la naissance, au désespoir de leurs parents qui partent élever Ma Yau aux Etats-Unis pendant que Boomer grandit dans les rues de Hong Kong, auprès d’une mère alcoolique et désoeuvrée. De nombreuses années plus tard, Ma Yau est devenu un chef d’orchestre de renommée internationale, tandis que Boomer est un mécano prétentieux, bagarreur et grossier, qui passe son temps avec son acolyte Tarzan (Tyson dans la version américaine !).
C’est d’ailleurs cette fréquentation qui va amener le point de départ de la trame du film. Tarzan (Teddy Robin Kwan) demande en effet l’aide de son ami, virtuose de la baston, pour récupérer sa petite amie des griffes du boss d’une Triade locale. Sauf que Barbara n’est pas réellement la copine du petit loser, tout au plus l’objet de ses convoitises. Car même Boomer est contraint de se rendre à l’évidence : comment Teddy Kwan pourrait-il bien s’attirer les faveurs de Maggie Cheung, alors dans ses années les plus craquantes ? La tentative d’affrontement échoue partiellement, et les deux compères se voient obligés de trouver 300.000 HK$ pour participer à une course de voitures avec le mafieux, champion local des courses illégales.
Pendant ce temps-là, Ma Yau s’en revient à Hong Kong après plus de vingt ans d’absence, pour donner un concert ; les quiproquos improbables peuvent donc commencer...
Twin Dragons a souvent été comparé au Double Impact de JCVD, réalisé l’année précédente par Sheldon Lettich (Lionheart, Only the Strong) : il faut bien avouer que l’idée des jumeaux-vengeurs, partiellement signée Jean-Claude himself, lui revient. Néanmoins, au vu de l’humour énième degré de la co-réalisation de Tsui et Ringo, le film m’a plus souvent fait penser à un Cheech & Chong’s The Corsican Brothers (Tommy Chong - 1984) version Jackie Chan qu’au film mineur de la frite souple... Notamment à cause du lien unique qui unit les deux frères séparés, les mouvements de l’un pouvant se répercuter sur les déplacements de l’autre.
Pendant la majeure partie du film, Twin Dragons est en réalité une comédie cantonnaise très poussée dans ses situations, un tour de force qui demande un gros effort d’abstraction - aussi bien de la part des spectateurs que des deux actrices, Maggie Cheung et Nina Li Chi. Une série de gags qui s’accompagne d’une série de cameos de luxe : de Tsui Hark lui-même à John Woo, en passant par Wong Jing, Gordon Chan, David Wu, Eric Tsang, Liu Chia-Lang et j’en passe, la galerie d’invités est vraiment hallucinante : un bonheur pour tout fan de cinéma HK.
Mais le véritable intérêt de Twin Dragons, c’est son final époustouflant dans le hangar à voitures, siège de crash tests et autres essais de résistance (température, eau), utilisé dans toutes ses possibilités pour un combat rempli de cascades proprement mortelles. C’est là qu’intervient le talent des réalisateurs, l’ensemble étant filmé et monté avec une maestria remarquable.
Twin Dragons ne fait donc pas partie des films de Jackie qui trouveront un écho grand public en Occident, la comédie cantonnaise y occupant une part trop importante de l’histoire. C’est néanmoins une comédie excellente, qui regorge de moments de bravoure et offre l’un des combats les plus explicitement dangereux de Jackie Chan - et donc un grand moment de bonheur !
Twin Dragons était disponible en DVD HK, mais celui-ci est épuisé.
Il est aujourd’hui disponible en DVD zone 1, ou en DVD zone2 chez Seven 7/ Metropolitan Filmexport, dans une copie au format (2.35:1) de très bonne qualité, avec une bande son mono (VOstf ou français au choix).


