Twins Mission
Utiliser une petite fille, sur le point de mourir d’un cancer, comme moyen de pression sur sa mère, héritière immobilière chinoise dont le refus de vendre des habitations protégées empêche la construction d’un colossal centre financier... Un pitch digne d’un retour au Cat III, faisant fi de toute morale ; et pourtant, ce n’est pas pour Elvis Tsui que le projet Twins Mission a été conçu, mais bien pour les Twins. D’ailleurs c’est dans le titre.
Un titre tellement pertinent qu’il ne se contente pas de mentionner ses deux charmantes héroïnes, Jade et Pearl - Charlene Choi et Gillian Chung respectivement, donc - mais englobe l’ensemble des protagonistes du film. Car Twins Mission est un peu le Gang des frères James du thriller high-tech HK... Walter Hill, le western, les chevaux, la qualité de l’écriture et de la mise en scène, et même, finalement, le high-tech en moins. Damnède, ma comparaison n’est donc pas pertinente ? Pourtant les Twins du titre sont autant « nos » Twins - délicieuses canto-stars, adulées d’aucuns et détestées des autres - que leurs camarades et ennemis, fonctionnant tous ici par paires de jumeaux, de même sexe ou non, identiques ou pas du tout. Car Charlene et Gillian rappelons-le, ne sont pas du tout sœurs, et donc encore moins jumelles, et donc encore moins identiques.
Deux faux lamas - Uncle Luck (Sammo Hung) et Lau Hay (Wu Jing) - voyagent en train jusqu’à Hong Kong, avec dans leurs bagages le précieux « Heaven’s Bead », quand ils se font attaquer par un gang de jumeaux... dénommé les Twins. Cet objet, qui n’a de valeur réelle que pour les gens qui possèdent une authentique foi bouddhiste, posséderait la capacité de vaincre la maladie et la mort. C’est pourquoi un promoteur maléfique, Mok, pourtant très proche de la belle Lilian (magnétique Jess Zhang), utilise l’objet comme levier pour tenter de lui forcer la main, et lui faire vendre les propriétés que son père a racheté au gouvernement anglais avant la rétrocession, protégées par des lois du patrimoine, et qui comme je le disais plus haut, l’empêchent de faire beaucoup d’argent. Car l’objet pourrait peut-être sauver sa fille Happy - qui ne l’est pas - de son cancer... Lau Hay par ailleurs, en profite pour rendre visite à son frère... jumeau bien entendu, qui souffre ses derniers jours dans le même hôpital que Happy. Quand son regard croise celui de la belle maman, c’est la fête aux étoiles. Mais je m’égare. Lau Hay et Luck (qui n’en a pas tellement, décidément le choix des noms est étrange) doivent tenter de retrouver l’objet. Pour ce faire, ils ont besoin de l’aide de Chang Chung (Yuen Wah). Mais qui est donc cet homme, qui a confié la garde des Twins et des autres jumeaux à un gérant de cirque alors qu’ils étaient enfants, et que Jade et Pearl ne portent pas très haut dans leur estime ? Il s’agit de l’un des anciens chefs des Twins (je ne vous ai pas encore perdu là ? Je fais pourtant ce que je peux) , celui qui penchait du bon côté de la force et qui a donc abandonné l’autre qui n’est autre que son frère... jumeau, of course ! Car les Twins sont tous surentraînés pour devenir les meilleurs voleurs de la Terre. Les Twins (les filles) et leurs camarades de la piste aux étoiles reprennent donc leur entraînement, après avoir compris que si Chang Chung les avait brûlés au fer à repasser avant de les abandonner, c’était pour leur bien, et accepté le hamburger qu’il leur avait promis dix ans auparavant. Le jeu des sept familles peut alors commencer...
Ça alors, je ne pensais pas, après Twins Effect II, assister un jour à plus grande débâcle mettant en scène nos deux fausses frangines ! Benz Kong To-Hoi se surpasse pour cette co-production entre le Mainland et son appendice, pour exploser le montage d’un scénario pourtant passablement dyslexique, et livrer une chose - car Twins Mission est tout sauf un film ! - aussi illisible que le résumé que j’ai tenté de vous en faire. Certes, il y a Sammo et Wu Jing au générique, mais tous deux sont très largement sous-utilisés, en dépit d’un plan cigare pour Sammo (passage obligé depuis SPL ?), et d’une tentative (ratée bien entendu) de faire de Wu Jing un interprète convaincant dans le rôle de son frère malade, mourant, et enfin mort. Globalement, le pitch ridicule est renforcé par l’utilisation de rebondissements absurdes (l’arrivée du "heaven’s bead" chez un vendeur de sex toys, prétexte à un cameo de Sam Lee qui joue une parodie de lui-même) quand ils ne sont pas incompréhensibles. J’ai même remonté le cours du film à plusieurs reprises pour voir si je ne m’étais pas assoupi, c’est vous dire !
Alors bon, on peut toujours prendre ce genre de spectacle à la légère et se dire qu’il est avant tout destiné aux plus petits, mais c’est oublier que les enfants sont loin d’être cons. Mon fils - 3 ans - par exemple, passerait bien dix minutes devant Twins Mission avec l’air perplexe, avant de s’en retourner à ses propres courts-circuits, autrement plus limpides. Moi qui aime sauver des scènes pour terminer mes articles sur une note positive, je n’y arrive pas vraiment ici. Ou alors au trentième degré. Il y a bien la séquence de la rencontre entre Lau Hay et Lilian, qui se fait par le biais d’un Hummer en jouet (identique à celui qu’elle conduit dans la vie, un signe du destin !), les tours de magie du même Lau Hay (tellement balèze qu’il peut faire neiger dans une chambre d’hôpital), le combat de Gillian contre les serpents (jumeaux, what else ?) en synthèse, la fin ridicule et volontairement incomplète (« if you want to know the end, keep on watching » nous annonce un carton avant le générique... alors qu’il n’y a plus rien à regarder !)... bref, c’est la débâcle. Et pourtant je les aime, moi, les Twins. Mais là, vraiment, (insérez ici un jeu de mot sur la chute des Twins que la bienséance m’empêche de faire moi-même, et terminez vous-même cet article !).
The Twins Mission est disponible en DVD HK, sous-titré anglais, en éditions classique et collector. Privilégiez la collector, pour pouvoir regarder régulièrement les cartes postales qui l’accompagnent, et vous renvoient encore plus fortement la question du « que fais ce truc dans ma vidéothèque ? ».




