Twist
Quand Danny Lee s’affranchit des conventions de Genève.
Quand les journées vous paraissent trop longues et l’apathie vous guète, mieux vaut éviter de se passer le dernier Tsai Ming-liang, et opter pour un bon vieux Cat III, qui comme le bon vin, vieillit plutôt bien, et se consomme avec modération. Eu égard au respect que je porte au tandem Danny Lee / Simon Yam et son très jouissif Dr. Lamb, la vue de ces deux noms accolés et apposés sur la jaquette de la galette en question m’incita vivement à commander l’objet coupable, et l’insérer la nuit venue, dans la platine.
Tourné par le champion de la promo en faveur de la brutalité policière (sa maison de production ne s’appelle pas Magnum pour rien !), le toujours placide et nerveux Danny Lee, Twist nous plonge dès son introduction dans la frénésie d’un hold-up d’un véhicule de convoyeur de fonds de la Securicor. Aux commandes, le fringuant John Yam (Simon Yam), flanqué de deux acolytes emmanchés venus du Mainland. Loin de la fougue brutale des braquages version polar HK à la sauce Kirk Wong, ce dernier la joue tout en finesse, en cerveau calculateur, adepte du déguisement, et apôtre de la non violence.
Au vu de l’exorbitance du montant dérobé - 170 millions de dollars hong-kongais, la réponse ne tarde pas à venir en la présence de l’OCTB, emmené par le volontaire inspecteur Lee Tin-kin (Danny Lee). La perspicacité de son équipe, ayant pour une grande majorité déjà fait ses preuve dans Dr Lamb, ne tarde pas à flairer l’embrouille et fait suivre la ravissante Ann Kwan (Suki Kwan), secrétaire de la banque détroussée. Celle-ci ne tarde pas à rejoindre son complice John Yam afin de fêter dignement leur coup mûrement planifié, en tirant leur coup dans une version cheap de 9 semaines 1/2. Manquant de preuves, l’OCTB s’engage alors dans une traque féroce faite de provocations, filatures et poursuites, qui se transforme vite en course contre la montre, quand les deux suspects sont finalement arrêtés, pour une garde à vue qui restera sans doute dans les annales de la police Hong-Kongaise.
Donnant du rythme à un scénario, très librement inspiré - dirons-nous par euphémisme - d’un fait réel advenu en Chine, et s’avérant plutôt convenable au vu du niveau habituel des produits du genre, Danny Lee semble davantage parti pour un thriller haletant version Organized Crime & Triad Bureau (1994) que du côté glauque et malsain de la Cat III version The Untold Story (1993). D’ailleurs la fourberie et la sagesse de Simon Yam fait davantage penser à Thomas Crown, qu’aux hold-up furieux du très bon King of Robbery (1996) de Billy Chung. Il faut donc s’armer de patience pour voir finalement le métrage partir en vrille et mériter dignement son estampillage. Qu’à cela ne tienne, on ne s’ennuie pas pour autant aux côtés de l’extravagant couple Simon Yam / Suki Kwan qui ferait presque de l’ombre à notre cher couple présidentiel au bling-bling style. On se demande même si le tailleur de Simon Yam n’a pas fini par travailler pour Eddie Murphy dans Le Prince de New York, tant ses fringue en jettent... de ridicule. Bon, c’est vrai aussi que le yacht de Yam fait plutôt pâle figure à côté de celui de Bolloré.
Malgré le défaut de violence requis pendant toute la première heure du métrage, le cinéaste n’oublie pas de nous faire admirer la plastique avantageuse de Suki Kwan qu’on avait peu vu à ce niveau d’érotisme, et dont la performance convaincante dans ce Twist, mérite d’être saluée. C’est donc, vous l’aurez compris, à la faveur du titre du film, dans la toute dernière partie de celui-ci qu’il faudra rendre hommage à Danny Lee, signant là un authentique manuel de conduite d’interrogatoire de police qu’on ne recommanderait même pas à la prison d’Abou Ghraib. Afin de préserver les apparences de la légalité : aucunes traces visibles de blessures sur les suspects, l’inspecteur Lee et son équipe vont faire preuve d’une réelle créativité (si on peut dire) afin de tenter de faire plier l’endurant John Yam et sa complice, et leur extorquer des aveux complets.
Mais là ou Herman Yau en aurait profité pour livrer un discours socio-politique sur l’institution policière, Danny Lee échoue, en désamorçant le sadisme des tortures, par un humour peu subtil et coutumier dans le genre (en témoigne la scène grotesque du tuyau d’arrosage). Certes le réalisateur se moque avec humour des méthodes d’interrogatoires du Mainland lorsque les deux complices de Yam sont arrêtés dans leur village natal, mais ce traitement second degré empêche au final Twist de franchir le seuil de l’honnête produit de genre, qui aura néanmoins le mérite d’éviter tout temps mort, tout en nous enseignant un nouvel usage du préservatif. A recommander néanmoins aux fans du genre.
Twist est disponible en DVD HK chez City Connection, avec sous-titres anglais optionnels.


