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Hors-Asie | Etrange Festival 2003

Una Gota de Sangre Para Morir Amando

aka Le Bal du Vaudou - Clockwork Terror - Murder in a Blue World | Espagne | 1973 | Un film de Eloy de la Iglesia | Avec Sue Lyon, Chris Mitchum, Jean Sorel, Ramon Pons, Charly Bravo, Alfredo Alba, Antonio Del Real, David Carpenter

Ayant découvert la patte du cinéaste espagnol Eloy de la Iglesia avec son film La Semana del Asesino, œuvre étrange dans la longue lignée cinématographique des tueurs, c’est animé d’une certaine curiosité que j’entrais dans la salle 300 du Forum des Images en septembre dernier pour assister à la projection d’un autre de ses films : Una Gota de Sangre Para Morir Amando, renommé Le Bal du Vaudou en français. N’allez pas croire pour autant que l’action se passe en Haïti ou que la pellicule regorge de volatiles égorgés et de poupées transpercées d’aiguilles ; présenté comme un remake espagnol d’Orange Mécanique, l’intrigue traite davantage des dérives d’une société futuriste, telle que les années 70 pouvaient encore l’imaginer, dans laquelle une violence exponentielle tend à être contrôlée.

Effectivement, nous retrouvons certains éléments du film de Kubrick comme le gang en uniforme, le mobilier en plastique blanc, la reconversion des criminels par traitement musclé en institut de recherche psychiatrique... Mais fort heureusement, le film d’Eloy de la Iglesia ne s’est pas pris la même claque de moisissure (mes excuses aux adorateurs de Kubrick...) ; si Una Gota de Sangre Para Morir Amando renferme quelques hommages évidents à Orange Mécanique, il n’en est donc nullement une relecture.

Son principal intérêt réside dans le traitement, une fois de plus assez étrange, appliqué à un sujet d’anticipation. Situons l’action : une série de meurtres perpétrés en secret par une infirmière sur de beaux mâles, un gang de jeunes qui sévit lors d’agressions particulièrement violentes et l’établissement d’une société aux idéologies douteuses (pensée unique, asservissement insidieux des populations...) ; trois conceptions différentes de la violence qui se croisent sans se connaître.

Tout comme dans La Semana del Asesino, Eloy de la Iglesia se joue des conventions et mêle des éléments que l’on a rarement l’habitude d’apprécier dans un même film ; le résultat n’en est que plus intéressant puisqu’il annule toute anticipation non souhaitée du spectateur (ce qui n’est pas le cas du dernier film de Ridley Scott, Les Associés, mais je m’égare...). De plus, cet éclectisme des contextes apporte une certaine fraîcheur qui n’est pas si loin du fourre-tout de Bollywood, même si son traitement n’est pas aussi extrême.

Autre référence extrême : Audition. Je serai probablement le seul à tenir un tel propos, mais Una Gota de Sangre Para Morir Amando se rapproche du film de Takashi Miike dans les effets de sa conclusion. Anna l’infirmière, interprétée par Sue Lyon, conserve tout au long du film une part d’innocence en dépit des meurtres qu’elle commet ; son physique angélique, assez proche de la beauté fragile d’Anna Thomson, ainsi que son rattachement à l’enfance (phénomène inconscient ou volonté d’échapper à l’évolution malsaine de la société ?), illustré notamment par le fait qu’elle ne veut pas quitter la gigantesque demeure de ses défunts parents, contribuent à l’acquitter au regard du spectateur.

Le contraste n’en est que plus efficace lorsque la psychologie d’Anna navigue non loin des rives du sadisme dans la dernière scène. Motivée par une soif de vengeance, elle se complaît dans sa position dominatrice sur le personnage de David, paralysé et silencieux suite à un accident. Certes, le choc est moindre que celui d’Audition, mais l’on ressort refroidi de la projection.

À noter enfin la présence d’un rythme régulier qui précède chacun des meurtres : ici, les battements de cœur des victimes, dans La Semana del Asesino, le décompte d’une horloge. Devrait-on y relever une signature d’Eloy de la Iglesia ?

Diffusé dans le cadre d’un hommage à Eloy de la Iglesia lors de la onzième édition de l’Etrange Festival, Una Gota de Sangre Para Morir Amando est disponible en VHS UK chez Pagan (Redemption).

- Article paru le lundi 13 octobre 2003

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