Vendredi 13
Bien que je ne sois toujours pas certain d’avoir réellement aimé son Pathfinder, je me suis promis de regarder chacun des films de Marcus Nispel depuis que j’ai pris conscience de la qualité de son remake de Massacre à la tronçonneuse. Alors soit, un reboot de Vendredi 13 et de la mythologie de Jason Voorhees et Crystal Lake n’était peut-être pas indispensable, mais une promesse est une promesse, non ?
Vendredi 13, cru 2008, démarre avec une réminiscence, eighties et noir et blanc, de la genèse du tueur au masque de hockey, témoin impossible – puisque récemment noyé du fait de l’irresponsabilité de ses lubriques moniteurs de colo – du meurtre de sa mère vengeresse par l’une des "coupables". Marcus Nispel reporte ensuite son attention de nos jours, sur l’excursion d’une poignée de branleurs venus tenter de mettre la main sur une plantation sauvage de cannabis. Vilains petits fornicateurs, le groupe dans lequel America Olivo a tôt fait d’exhiber sa poitrine a tout aussi tôt fait de tomber sous la machette de Jason, et sceller ainsi un premier film dans le film, prégénérique de près de vingt minutes et micro-slasher en bonne et due forme. Sympathique.
Du coup, on se doute que l’ambition de ce reboot va au-delà du simple revival. Nispel nous ressert une seconde fois l’arrivée d’un groupe d’adolescents à proximité de Crystal Lake, menés par le détestable Trent, puant gosse de riches. Lorsque ceux-ci croisent Clay, jeune homme à la recherche de Whitney, sa sœur disparue depuis six mois et accessoirement dernière victime du prologue, l’inévitable friction masculine permet de singulariser Jenna, seule âme du groupe sensible à la quête de l’outsider. La très charmante Danielle Panabaker a forcément d’emblée tout de l’héroïne, pétrie de bonnes intentions et peu sexuée, habituée à jouer les gentilles fifilles (même si sa participation récente à Girls Against Boys devrait permettre de réévaluer son image). Ne nous précipitons pas pour autant quant à ses chances de survie : la dernière fois que je l’ai croisée, elle se faisait pendre en moins de deux dans un car wash à la fin du remake moyen de The Crazies, alors que je ne m’y attendais pas du tout. Toujours est-il que pendant que ses collègues picolent, fument et s’envoient en l’air, s’exposant de fait à la morale sanglante de Jason, Jenna se rapproche de Clay, dont la quête est plus justifiée qu’il ne le pense. Car sa sœur Whitney, qui ressemble un peu à la défunte Maman Voorhees, survit, captive, dans les tunnels qui servent de refuge et charnier à l’assassin…
Vous l’aurez compris, ce Vendredi 13 propose deux slashers pour le prix d’un. Autant le premier est assez basique toutefois – mais aussi jouissif, notamment dans sa cuisson en sac de couchage de Miss Olivo – autant le second est enrichi d’une dimension nouvelle, visant non pas à humaniser mais à épaissir la menace Jason Voorhees, la rendre plus crédible. En perçant le sol de Crystal Lake de tunnels sordides, les scénaristes du film explicitent notamment les mécanismes mis en place par le tueur pour repérer et atteindre ses victimes (de simples câbles tendus, façon Castor Junior, qui font sonner autant de clochettes). Une astuce qui permet enfin d’expliquer la capacité de sieur Voorhees à être toujours là où il faut, quand il faut, et à se téléporter d’un crâne fendu à l’autre.
Pas fous, les scénaristes n’exploitent pas la captivité de Whitney (Amanda Righetti) pour tenter de nous servir une facette romantique de Jason, pas plus qu’ils ne justifient réellement son masque de hockey (il le trouve simplement dans un grenier pour remplacer le sac de jute qui couvrait son visage difforme) ou tranchent sur son caractère surnaturel (après tout, Jason reste une espèce de mort vivant). Ce qu’ils font par contre, c’est mettre en place un gentil massacre méthodique d’acteurs qui s’y prêtent bien, en introduisant intelligemment les décors et instruments de mort potentiels (ce petit détour par une grange dotée d’un broyeur à bois, ou une belle cabane à outils…), et en respectant les canons du genre et de la série - jusqu’à la fin ouverte au bord du lac, obligatoire.
Pas mal de peau (merci Julianna Guill) et de stupidité tout juste pubère, une touche d’humour pertinente (ce jeune homme qui tend une crosse de hockey à Jason pour compléter sa tenue), une violence sèche qui résonne parfaitement avec la simplicité brutale des films originaux… ce Vendredi 13 ne fait pas peur certes, et n’a pas la carrure de Massacre à la tronçonneuse (quelle que soit la version considérée), mais ses prédécesseurs non plus, catalogues décérébrés et jouissifs de meurtres bien outillés et de poitrines dénudées. Pour ma part, Jason a toujours incarné le Steven Seagal des psycho killers des années 80 - époque où je me caressais autant devant Ciné-News que devant Mad Movies -, inexpressif et monolithique à souhait, mais appliqué et efficace ; en le ressuscitant tel quel, avec juste ce qu’il faut d’inventivité d’écriture et de mise en scène et une lame bien aiguisée, Marcus Nispel s’en sort une fois de plus avec les honneurs. Tout au plus peut-on regretter l’absence totale de cameo : j’aurais bien repris une tranche de (Kevin) Bacon !
Disponible partout, sur tout support, et pour l’instant sans 3D (et c’est bien comme ça).







