Zero Woman 5
La très soutenable légèreté du v-cinema.
Comme toutes ses précédentes incarnations, Rei travaille dans la section zero, une division des forces de l’ordre qui s’acharne sur les mafieux en tous genres, si possibles occidentaux et mauvais acteurs, par le biais de jeunes femmes charmantes et généreuses, amnésiques pour certaines, au passé incertain pour d’autres. Lorsque ce cinquième épisode de la série nineties déclinée du manga de Tôru Shinohara démarre, Rei commet un assassinat osé et improbable dans une piscine privée, éliminant un gangster allemand sous les yeux de ses gardes du corps nippons. Un joli coup en maillot de bain, qui lui voudra d’être poursuivie par un assassin pendant une bonne partie du film. Mais ce qui intéresse vraiment Rei, c’est cette jeune femme qui a failli se faire aggresser sous ses yeux, esthéticienne qui porte la même cicatrice au bras que sa sœur violentée et disparue. Ce qu’elle ne peut pas savoir, trop occupée à être éprise du serveur d’une pizzeria, c’est que cette sœur retrouvée est elle aussi un assassin, qui plus est son ennemie...
Cela faisait longtemps que je ne m’étais pas laissé tenté par ces délicatesses que constituent les innombrables opus de Zero Woman. Cinquième épisode de la série - juste avant celui avec Miss Shiratori - The Hunted n’est pas le meilleur du lot ni le plus mauvais. C’est un v-cinema classique, dans lequel la nuit est bleue, et les souvenirs enfumés et chromatiques autant que traumatiques (tout le monde sait que l’on stigmatise mieux le passé avec un peu de brouillard, un grand angle et des couleurs saturées façon vision thermique). Mikiyo Ono y incarne une Rei inhabituelle, pas du tout chagasse contrairement à Kumiko Takeda par exemple, silencieuse pendant 90% du métrage mais tout de même assassin hors-pair. Son talent ? Faire en sorte, par magie certainement, que tout ses adversaires visent plus mal qu’elle, incapable de la toucher même à bout portant, tandis qu’elle fait mouche à chaque fois, même lorsque son arme ne pointe pas dans la bonne direction. Un atout certain au cours des nombreux combats étriqués du film.
Autre atout de Mikiyo Ono, sa propension à être une fashion killer et non une fashion victim. Jamais vulgaire même lorsqu’elle se dénude (par exemple à l’issue de chaque contrat, après avoir compté ses morts à l’aide de billes dans un bocal, ce que ferait n’importe qui), Mikiyo porte à merveille le maillot de bain, la robe de soirée, moulante et trop courte, un polo accompagné d’un tailleur, un chemisier chinois et un pantacourt, le peignoir et j’en passe... C’est un véritable défilé de l’assassin BCBG qui nous est offert ici ; peut-être devrait-on lancer une ligne Zero Woman ? Côté visuel donc, rien à dire, tout est en ordre. Et comme cette Rei est plutôt silencieuse - au point que l’on se demande longtemps si elle est muette - on ne peut pas vraiment dire que Mikiyo Ono joue mal. Tout au plus gravit-elle les escaliers de façon un peu trop marquée, avec des poses à chaque palier qui feraient pâlir de honte OSS 117.
Bien entendu, un Zero Woman ne serait pas complet sans une bonne dose d’érotisme désuet. Comme souvent, ce n’est pas tant par l’actrice principale que celui-ci arrive - Mikiyo se dénude principalement seule, de façon assez contractuelle - que par une compagne ou adversaire ; sa sœur en l’occurrence. Pour ceux qui connaissent Mystical Breasts, il faudra désormais compter avec Poisonous Breasts, puisque la demoiselle s’enduit les seins de poison avant de les offrir en pâture à ses victimes masculines, et les voir mourir en crachant une gerbe de sang sur sa poitrine. Une petite touche sympathique pour un v-cinema qui ne l’est pas moins, trop court pour être ennuyeux de toute façon, à la réalisation aléatoire - pendant les combats, on a parfois l’impression que le réalisateur a du mal à suivre des actions qui tiennent pourtant plus du catfight que kung fu - et à la féminité armée toujours agréable. Ah oui j’oubliais : il y a même de l’émotion avec un grand É, au travers de la mise à mort d’une petite tortue (au flingue, au travers d’un oreiller !), sacrifiée pour ne pas la laisser vivre seule. Quel poète, ce Norihisa Yoshimura !
Zero Woman 5 est notamment disponible en DVD Zone 1 chez Central Park Media, sous-titré anglais.




