Coed Fever
Ce n’est plus tolérable : les filles de la fraternité supervisée par la belle Kimberly fricotent avec la lie de leur université, les membres de « Uppa U Omega ». Étant donné que le paternel de la demoiselle, patron d’un grand magazine, veut faire un reportage sur ces étudiantes supposées modèles, il est hors de question qu’elles soient aperçues en compagnie de leurs losers libidineux. La doyenne demande donc à Kimberly de tenir Janice, Angela, Alice et les autres en laisse pendant près d’un an : les très sexuées jeunes femmes n’ont plus le droit de voir leurs mâles sous peine d’être radiées de l’ordre factice des little miss frigides. Mais nos étalons ne l’entendent pas de cette façon, et déploient leur ingéniosité pour ternir la façade dressée par l’université. Notamment grâce à l’aide de Vanessa, sculpturale stripteaseuse penchée sur l’habit de nonne, qui va épicer le reportage d’un tout jeune Ron Jeremy...
This isn’t Dallas anymore, Debbie...
Coed Fever démarre sur les chapeaux de roues, par la prise en bouche par une étudiante de l’un de ses professeurs, le temps de faire remonter une mauvaise note. Sitôt le générique écoulé, Robert McCallum enchaîne sur l’appétit de Janice, désireuse d’être possédée par son homme dans la laverie de l’université. D’emblée, Coed Fever affiche des intentions bien différentes de son compagnon de rayonnage, Debbie Does Dallas, aux côtés duquel il ouvre le bal de la collection de Wild Side consacrée à l’Age d’or du X américain. Il n’est plus question d’ingénues et d’initiation ici, mais simplement de sexe, dans une parodie de college movie qui place des adultes dans la peau d’étudiants. Ainsi Janice par exemple, est-elle interprétée par la sublime Serena, dans la beauté de laquelle les fans de Marilyn Chambers reconnaitront la partenaire lesbienne de la scène de la piscine d’Insatiable.
Janice, son érotisme flagrant, ses encouragements légèrement grossiers, et la sueur qui parsème sa nudité... autant de choses qui placent Coed Fever dans le cadre d’une pornographie en évolution, certes toujours placée sous le signe de l’humour, mais en marche vers la performance sexuelle. Celle-ci prend notamment les traits de la sculpturale Vanessa del Rio, actrice un peu effrayante mais enthousiasmante, surnommée « l’ogresse portoricaine » par l’éditeur, qui s’offre avec force, fétichisme religieux et second degré à sieur Ron Jeremy et son compère photographe. Une sexualité très physique s’exprime aussi le temps d’une partie à trois, dans une chambre peu commune puisque dotée d’un portique, qui permet - nous n’y pensons pas assez souvent - de pratiquer le cochon pendu pendant le coït.
Le reste du temps toutefois, Coed Fever dépeint une sexualité plus classique, mise en valeur par les compétences du réalisateur, chef opérateur confirmé sous son vrai nom (Gary Graver), notamment pour Orson Welles. Les orifices sont moins présents à l’écran que les visages et corps des actrices ; ce qui permet notamment à la magnifique et regrettée Lisa De Leeuw de voler la vedette à Annette Haven. La rousse est magnifique, porte le plaisir sur le visage et dans le regard ; autant que sur ses doigts, lorsqu’elle malaxe avec vigueur sa poitrine naturellement généreuse, aux contours renforcés, en pointillisme, par la densité de ses taches de rousseur... Lisa De Leeuw, l’une des futures premières Vivid Girls, est cependant de celles qui éloignent le sexe dans sa conception cinématographique, du quotidien de tout un chacun, tout comme Serena et Vanessa del Rio. Le spectacle est plaisant, bien entendu, mais la proximité, le terrain de possibles à l’œuvre dans Debbie Does Dallas s’étiolent quelque peu.
Tout comme la camaraderie d’ailleurs ; les jeux de regards qui séduisaient dans les aventures de Bambi et ses copines sont absents dans Coed Fever, remplacés par une grivoiserie plus ouvertement expérimentée et égoïste, gentiment transcendée dans l’orgie finale du film. Sa leading lady, charmante Annette Haven, s’y dévoile enfin, le temps de voir sa frigidité bafouée par derrière. Enfin, « frigidité » est peut-être un bien grand mot pour une jeune femme qui se plaît à punir ses consœurs en s’équipant d’une ceinture gode... Une dualité qui se retrouve dans l’équilibre réussi entre étalage charnel et parodie outrancière, et qui fait de ce Coed Fever un digne représentant de son époque : si les nuits de l’industrie lorgnent vers le Boogie, l’écran reste empreint d’une certaine affection pour les personnages et leurs interprètes, d’une volonté de faire rire et jouir en même temps. On regrettera simplement que la doyenne de l’établissement, tout en surjeu et maturité - elle rejoint en cela le cast masculin et surtout un très vulgaire John Leslie -, ne passe pas elle aussi à la casserole.
Coed Fever est disponible en DVD chez Wild Side, dans la collection L’Age d’or du X américain, qui sera riche de 20 titres, à terme, au rythme de deux sorties tous les deux mois. Image 4/3 très propre, et, en guise de suppléments, des entretiens avec Vanessa del Rio et l’équipe du film.
Remerciements à Cédric Landemaine, Benjamin Gaessler et Wild Side.




